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CHRONIQUE DE MAME GOR NGOM :  Les illustrations d’une décrépitude sociétale…

La cruauté a un visage. Le visage hideux de la violence inouïe qui fixe d’un regard ignoble une jeune fille innocente.  Seynabou Ka Diallo étudiante à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, retrouvée morte dans un village à proximité de ce temple du savoir, est l’illustration maléfique de la sauvagerie qui gagne de plus en plus du terrain dans une société qui se métamorphose. 

Si les meurtres ont toujours existé dans notre pays, si les drames font partie de notre quotidien, leur multiplication et leur banalisation notées actuellement intriguent.  Le cas de Seynabou est l’exemple parfait d’une décrépitude qui annonce la fin  d’une humanité et le règne du danger. Cette étudiante est victime de la négligence et du manque de rigueur ambiant. Si l’université, lieu par excellence de tranquillité, n’est plus sûre pour ses occupants, les citoyens peuvent se faire tuer « tranquillement » dans les rues et dans leurs lieux de travail. C’est d’ailleurs ce qui est noté avec une multiplication des agressions à Dakar ailleurs dans le pays. De sales besognes en plein jour. Au vu et au su de tous.  Des portables arrachés, des sacs à mains extirpés, des couteaux et coutelas exhibés, des injures proférées. La menace est omniprésente. Ĺa passivité est dominante.  Si le « ça ne me regarde pas » prend de grandes proportions, la marge de manœuvres des bandits s’élargit. Nous sommes tous exposés à la mort, aux brimades, aux humiliations. Hélas, c’est le cas. Ici, on dépouille les gens devant leurs demeures, on les traumatise.  Facilement ! Pourtant, la logique voudrait que la peur soit du camp des imbéciles, de ces êtres sans foi ni loi. Si l’insécurité est galopante ce n’est pas seulement du fait de l’État occupé à des choses moins importantes, mais notre responsabilité collective doit être interrogée. Les faiseurs de trouble sont dans nos quartiers, les trafiquants de toutes sortes, promoteurs de l’illégalité sont avec nous. Nous les protégeons d’une manière ou d’une autre si on n’a pas peur de les vilipender. Une posture qui sanctifie le mal et sacrifie le bien, les gens de bien. La pauvre Nabou qui vient de si loin… de Bambey, après des études primaires et secondaires sanctionnées par le baccalauréat, a rencontré la faucheuse dans des conditions si effrayantes. Si elle est lâchement assassinée selon les premiers éléments de l’enquête, c’est aussi à cause des cassures dans une société qui joue faussement un individualisme de mauvais aloi alors que ses composantes passent leur temps à disserter sur les problèmes personnels des uns et des autres. 

Si la solidarité était vraiment de mise, si la chaleur humaine, les relations sociales n’étaient pas si fragiles, si distendues, peut-être, Seynabou Ka ne serait pas obligée de quitter le campus social pour aller se faire tuer à des kilomètres. Elle n’allait certainement être victime de cette violence extrême, cette souffrance inimaginable. 

Ce  mal qui nous ronge….

L’étudiante de la 31éme  promotion de  l’Unité de Formation et de recherches (Ufr) de Sciences Agronomiques, de l’Aquaculture et des Technologies Alimentaires de l’Ugb est une preuve suffisante d’un mal qui nous ronge. 

Espérons qu’une enquête sera vite diligentée , les coupables identifiés et sanctionnés sévèrement.  A côté de l’indifférence, il y a cette hypocrisie cruelle qui a conduit au meurtre d’un enfant de sexe masculin à Saré Maoundé Ba, un village de la commune de Kandiaye du département de Vélingara. Acte bestial qui a conduit cet enfant de 16 mois au fond d’un puits du domicile familial. La coépouse de la mère de la victime et un autre suspect sont entre les mains de la justice.  Si l’on sait que ces derniers ont versé de chaudes larmes aux premières heures de l’annonce de cette mort, on mesure la profondeur de la maladie.

 Une société imparfaite donc mais pas vraiment réfractaire au « Bien », comme semble le dire Eric Zémmour pour qui, en France, « tous les trafiquants de crack sont Sénégalais ». L’ambassade du Sénégal en France a bien raison de condamner dans un communiqué cette dérive d’un raciste dite en pleine campagne électorale ce 27 mars. En réalité, il s’agit d’une réitération d’une conviction tenue en mai 2021. Ses explications de l’époque ont été puériles à l’image de son auteur.  « Je n’ai pas dit “tous les Sénégalais sont trafiquants de crack”, j’ai dit “tous les trafiquants de crack sont Sénégalais”, ce n’est pas la même chose ! », twittait-il. Même les plus bêtes se croient très intelligents.  Une des lois de la nature. Quelle crasse !

MAME GOR NGOM