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Idy, l’art de plaire ou de déplaire

Sa lettre de démission du CESE restera à jamais gravée dans les annales de la République sénégalaise. Rarement Élégance républicaine n’a atteint un tel paroxysme en dehors de la Mission égyptienne confiée au Président Diouf par son successeur au lendemain de l’Alternance du 19 mars 2000. Idrissa Seck ne laisse pas indifférents les Sénégalais. C’est sûr! Qu’on l’aime ou qu’on le haïsse, l’ex-Premier de Ministre de Me Wade et non moins Président du Rewmi est une véritable identité remarquable sur la scène politique nationale. En quittant de fort belle manière son allié de Président, il a trouvé les mots et le discours adéquats en une si tumultueuse période de notre histoire politique pour rendre hommage au Pdt Macky Sall et saluer son œuvre. Il pouvait être le plus redoutable de ses adversaires au détriment des intérêts et de la stabilité du Sénégal. Idrissa Seck n’est pas de ce bois. Il ne sera jamais non plus du fagot qui servira de combustible à ce pays qui lui est si cher. L’homme est entier. En associant la défunte mère du PR à sa lettre de séparation, il la prend à témoin pour le futur de ses relations avec Macky Sall. Idy a l’art de parler sans fioritures à ses compatriotes, de toutes les couches sociales et délivre des messages aux hôtes étrangers vivant avec nous et même au delà. Il peut rassurer au plus haut point les tenants de la République et du continuum de l’État comme il peut agacer voire irriter ceux qui voient en lui l’obstacle à leur rêve de grandeur

Sur la scène politique nationale depuis plus de 40 ans en dépit de sa ‘’jeunesse’’, Idy a fréquenté le summum du pouvoir sans en être le dépositaire légitime et le tréfonds de l’opposition la plus traquée par le Pouvoir sans faillir ni manquer de respect aux Institutions. Les récentes sorties et prises de paroles publiques du Leader de Rewmi ne sont pas anodines ainsi que la nature de son discours. Alors que certains parlent de père fouettard s’en prenant à tous les Sénégalais et à ses adversaires, pour notre part nous préférons aller plus en profondeur dans la réflexion sur la nature de ses discours et la stratégie politique de l’homme. Pour qui veut mieux savoir.

Idrissa Seck est avant tout silence. L’homme n’aime pas prendre la parole à tout va depuis qu’il est présent en politique. Son histoire politique et sa trajectoire le montrent et le démontrent. Faut-il replonger ici dans le passé pour mieux comprendre le présent et le futur?

De 1988 à nos jours, Idrissa est maitre de sa Communication surtout depuis sa séparation d’avec son Mentor Me Abdoulaye Wade en 2004. Se sachant épié dans ses moindres faits et gestes, surveillé jusque dans son intimité par la répression wadienne d’alors, Mara avait réduit drastiquement toute forme de contact avec ses sympathisants et militants mais également avec ses amis et famille leur évitant les foudres des faucons ‘’desseckisant’’ de l’Avenue Senghor. N’empêche, certains en ont fait les frais. Et lui-même y compris. Jeté en prison pendant 7 mois et calomnié pendant 3 longues années, Idrissa Seck n’avait pu mener une campagne digne de ce nom à sa première candidature à une élection présidentielle face à la toute puissance de Wade. Occupé d’un coté à expliquer ses audiences de Midi à l’opinion nationale qui lui en voulait d’avoir répondu à Wade par l’entremise des chefs religieux, et de l’autre à faire face à divers obstacles du camp présidentiel, l’alors 2eme de la compétition, n’avait pu dérouler son programme et présenter ses ambitions pour le Sénégal même au dernier jour du marathon qu’il boucla à Thiès. Devant autant de mobilisation populaire jamais vue dans cette ville, Idrissa Seck aux larmes devant tant d’affection à lui montrée par les Thiessois, n’avait pu sortir un seul mot de la bouche. La vague Orange de 2007 à Thiès, n’a été battue en termes d’affluence que par le Benno Bokk Yakkar de 2012 dans la ville du Rail entre les deux tours de l’élection qui consacrera l’arrivée de Macky Sall aux affaires. En février 2007, le peuple souverain lui envoya un message qu’il décryptait ainsi à ses visteurs : le peuple vient de dire qu’après Wade, c’est Idy. Qu’en aurait-il été s’il n’y avait pas eu d’audience de Midi? Idrissa Seck ne regrettera jamais sa posture. Encore aujourd’hui il assume d’avoir répondu sur injonction du vénérable Cheikh Salih Mbacké et de Serigne Abdoul Aziz Al Amine. Il le referait également.

Idrissa Seck avait bâti son discours politique et posé ses actes de 2007 à 2012 en fonction du message reçu du peuple sénégalais et n’avait communiqué qu’autour de cette distribution des cartes faite par les électeurs. Et de bon aloi. Il avait été le premier à dénoncer et avertir sur la dévolution monarchique du pouvoir. La montée en puissance de Wade fils et son OPA sur le PDS que tant de bras avaient érigé depuis 1974, n’étaient pas du gout des caciques de ce vieux parti mais peu avaient le courage de Idrissa Seck pour en parler publiquement et rappeler au vieil opposant et père des Libéraux sénégalais qu’il déviait de la trajectoire convenue pendant les années de braise. On lui reprocha son absence le 23 juin pendant qu’il travaillait ailleurs à trouver les arguments juridiques contre la troisième candidature d’Abdoulaye Wade. A la naissance du M23, d’aucuns pour leurs propres intérêts et leur visibilité politique firent des pieds et des mains pour que le Leader du Rewmi ne figure pas dans les tablettes de cette organisation. C’était sans compter avec la capacité mobilisatrice de Idrissa Seck. Pour retrouver un nouveau souffle et décloisonner le mouvement populaire dans les régions, Idrissa Seck apparut comme l’effet mobilisateur. En Octobre 2011, la grand-messe du M23 qu’il avait présidée à Thiès en fit l’une des principales figures de ce mouvement de contestation. Idrissa Seck, chef de l’Opposition, ne pouvait être absent d’un si grand cadre politique et citoyen. Son parti en devint un des principaux animateurs et mobilisateurs. Après plusieurs semaines de tension politique, la candidature de Me Wade était validée. La messe était dite et les élections devaient se tenir. Les candidats acceptés par le Conseil Constitutionnel étaient face à leur responsabilité au sein du M23 et avaient aussi rendez-vous avec leurs compatriotes. Idrissa Seck décida de suivre le mot d’ordre du M23.

N’eut été sa propension à respecter sa parole et sa signature, il ne serait pas resté à Dakar avec le M23 pour protester contre la candidature validée de Me Wade par le CC en 2012. Erreur stratégique ou loyauté et respect des engagements? Il vient d’admettre qu’il ne le refera plus. Le mouvement contestataire né du quart bloquant et du ticket présidentiel en juin 2011, n’avait pas en 2012 fait une lecture détachée de la sociologie politique du pays sauf à se balader entre séminaires et conférences dans les hôtels de Dakar. Au plus profond de la crise, la venue de Obasanjo au Radisson Blu n’était, avec le recul, qu’un plan pour adouber les ambitions de certaines personnalités de la Société civile. Me Wade et le peuple sénégalais firent échec à tout ca. A 5 jours d’un premier tour, il était illusoire de reporter la présidentielle. Idrissa Seck tenait à son principe de loyauté à ses engagements malgré l’insistance de certains de ses amis dans des familles religieuses et de sa base politique. Il tenait à respecter son engagement avec les forces vives du M23 tout comme il tenait à respecter l’engagement de soutenir tout candidat de l’Opposition arrivé au 2eme tour. Du vrai Idrissa. Il ne veut jamais être pris à défaut. Le 26 février 2012 au soir du 1er tour, se sachant recalé, il distilla à ses militants et alliés qu’il soutiendra Macky Sall sans aucune condition nonobstant les envoyés de Wade et les clins d’œil faits au Maire de Thies. C’est aussi cela Idrissa Seck. Le respect des engagements pris. Plusieurs procès lui sont faits en toute ignorance ou à dessein par ses détracteurs pour le confondre à la tortuosité. L’homme est très loin de certaines façons politiciennes de faire. Seul le temps finit toujours par le réhabiliter.

Idrissa Seck a le don de lire et de décrypter les signaux politiques. En 2019, A la tète d’une Coalition XXL qui en menait large de par les noms qui le composaient, il est battu au premier tour par Macky Sall. Arrivé 2eme et nouveau chef de l’Opposition à la place du Pdt Wade, il entreprit de calmer le jeu des contestations post-électorales et assura aux chefs religieux notamment à Serigne Mountakha Bachir et à Serigne Babacar Sy Mansour qu’il ne troublerait jamais la quiétude du Sénégal pour accéder au Pouvoir. Et ce d’autant plus que ses alliés dans la Coalition XXL n’étaient pas prêts à la contestation dans la Rue encore moins à lui faire porter la toge du chef de l’Opposition eu égard aux avantages qui doivent aller avec. Dans la totale discrétion, Idrissa Seck a discuté et dialogué avec Macky Sall pour que le pays soit sauf. A la survenance de la Pandémie, il rejoignit à la surprise générale la tête du CESE et la coalition présidentielle et fait entrer des Ministres au Gouvernement afin de donner un signal fort pour la stabilité du Sénégal. Beaucoup de Sénégalais y compris dans son propre camp lui en voulurent et il en perdit certains lieutenants. L’homme sait taire ses intérêts personnels pour l’intérêt vital national sénégalais comme il le répète pour l’enseigner. L’effet Pangolin que prédisaient les services occidentaux sur l’Afrique a rudement impacté la sous-région ouest-africaine mais épargné le Sénégal. Comme une grande Démocratie et comme partout ailleurs dans le Monde, notre classe politique dans sa majorité a su converger vers l’essentiel et faire face aux nouveaux défis pandémiques, sécuritaires et économiques à la survenance additionnelle de la guerre en Ukraine. C’est aussi cela la vision et le patriotisme de Idrissa Seck que d’aucuns ne lui reconnaitront jamais. Tant pis. Le Mbourok Soow il l’assume. Et l’affabuler de ‘’Nittu Thies’’ ne le froisse guère. Tout comme des centaines de milliers de Thiessois ou Dommi Thies qui sont conscients que Nittu Thies depuis 1937 sur la scène politique du Sénégal et de l’AOF a toujours symbolisé la Résistance, la Décolonisation et le Refus du déshonneur incarné par leurs vaillants ancêtres du Kajoor. De son compagnonnage avec le Président Macky Sall, Thiès sa région a beaucoup bénéficié. Des 1500 milliards de CFA investis aux Classes Préparatoires aux Grandes Ecoles, un projet qu’il porte depuis 2013, en passant par la relance des Chemins de Fer, l’érection de la Nouvelle Ville et l’extension du TER de l’Aibd vers Thies entre autres.

Idrissa Seck le sait. Il peut déplaire par sa façon de parler mais il l’assume. Ses derniers face-à-face avec la presse sénégalaise sont assez éloquents. Mara ne fait pas dans la langue de bois pour épater. Il crache ses vérités aussi dures soient-elles. Il a bien raison de dire qu’il ne veut pas diriger un peuple qui n’aime pas le travail, il ne veut pas du ‘’Tokk mouy dokh’’* en vogue dans certains milieux, il ne veut être le Président d’un Sénégal refusant de se hisser par le culte du Travail comme nous l’enseignait Cheikh Ibrahima FALL LAMP. Mara est conscient de tout cela et l’exprime ouvertement. Si d’aucuns lui reprochent son franc parler au point de s’en être pris à Wade, certains s’interrogent sur ce que Me Wade lui a coûté ou pris de sa vie.

En proie aux doutes et à l’absence de finances solides, Abdoulaye Wade n’avait battu campagne en 2000 que par la persuasion de Idrissa Seck et Abdoulaye Bathily son futur allié dans la CA2000. C’est après l’accession à la Magistrature suprême de Wade que les déboires de Idrissa Seck ont commencé. On avait commencé à lui préférer le fils biologique. La suite est connue. Me Wade non plus n’a jamais aidé ou soutenu Idy dans son projet. Il est resté concentré à mettre le pied à l’étrier à son fils. C’était d’ailleurs le début de ses déboires avec les Sénégalais. Idrissa Seck, Macky Sall et bien d’autres ont fait les frais de l’ascension du fils vers le sommet. Ambition légitime ou non d’un père pour son fils? Le PDS, navire amiral de la Flotte libérale en pâtit depuis sa perte du pouvoir.

En s’adressant aux Sénégalais au mois d’Avril, plutôt en programmant de leur parler au Mois de Mars avant de le reporter, Idrissa Seck se savait attendu. L’annulation a pu agacer mais la teneur de son message était attendue par ses compatriotes. Ce n’était que partie remise. Face à la presse et en directs sur plusieurs médias l’homme est apparu décontracté et ouvert à toutes questions même à celles qui fâchent. Le tout avec un fil conducteur qui semblait échapper par moment aux profanes mais cadencé et millimétré dans la tête de Idy. Des piques à Wade, le rappel des péripéties de sa carrière politique, l’acceptation du poste de Président du CESE, tout était bien agencé dans la Communication de Mara. Il adore cet exercice. Il se savait attendu sur sa candidature, il a fini par lâcher le mot. Il sera au rendez-vous de 2024 s’il plait à Son Seigneur! Sur le 3eme mandat également, il en a dit ce qu’il pensait sans violence aucune et avec respect pour celui à qui les Sénégalais ont confié leurs suffrages de 2019. Aux tenants de l’opposition, il a montré comment par le passé Pouvoir et Opposition se parlaient sans se compromettre. Jean Collin, Ousmane Tanor, Famara Sagna, Abdoulaye Wade et lui.

Idrissa Seck de 2023 est bien décidé à se dévoiler à ces compatriotes dont la majorité des milléniaux semble ne pas le connaitre. Pour cela, il parle cash sans fioritures, assène ses vérités et attend leur verdict en 2024, celui des Thiessois aussi. Il s’affiche décontracté sur les réseaux sociaux au contact de ses compatriotes ou dans son champ cultivant la terre et nourrissant les bêtes de sa ferme. Il pourrait déplaire mais il l’assumera. Il va solliciter le suffrage des sénégalais mais ne manquera pas de nous dire ce qu’il pense sur nos défauts et nos qualités. Ce langage sincère et de proximité n’est pas commun dans l’espace politique national. De plus en plus de politiques miroitent un eldorado utopique et populiste à leurs compatriotes pour leur plaire. Idy n’en fera rien. Il fera campagne sur le Travail. Rien que le Travail sans qui aucune Nation, aucun peuple ne parviendra à se garantir une indépendance dans le concert des Nations. Le Sénégal, notre pays, a besoin de travailler, beaucoup travailler, toujours travailler et encore travailler, pour rompre avec les sempiternelles jérémiades sur les importations, l’inflation, la dépendance à l’extérieur, la mainmise étrangère et j’en passe. La Pandémie de 2020 et la guerre d’Ukraine nous ont appris pour ne pas les révéler que les enjeux et défis du 21eme siècle, dans un contexte mondialisé, sont d’abord de Souveraineté et de Sécurité. Ne pas le savoir ou ne pas se mettre à travailler à faire face à ces défis, c’est s’exposer ou exposer son pays à des crises aux conséquences imprévisibles.

Idrissa Seck le sait et y travaille depuis fort longtemps. Pour l’avoir fréquenté et écouté parler du Sénégal, de géopolitique africaine et mondiale, je lui confierai, sans hésitation aucune, les destinées du pays. Il en a les compétences et l’expérience et sait à priori les décisions à prendre pour l’intérêt vital national. Sa pensée ainsi que son discours sur la conduite des affaires de l’État sont si structurés au point que réveillé en pleine nuit il serait capable de vous former un gouvernement au pied du lit sans distinction partisane et de nommer aux fonctions civiles et militaires. L’homme est structuré. Sa pensée l’est tout autant. Et si certains intellectuels ne citent que savants et auteurs d’ailleurs, lui trouve références dans les Saintes Écritures avant tout et la science de nos guides religieux locaux. Discuter avec lui sans protocole et à bâtons rompus est une Masterclass de science politique ou d’économie politique. Un de ses vieux compagnons du PDS le décrit comme un homme qui s’est doté de tous les savoirs et compétences nécessaires à la conduite d’un État. C’est un domaine où il ne tergiverse pas. Et de ces pérégrinations dans le Monde, il trouve toujours des idées à implanter au Sénégal ou des modèles d’infrastructures dont il veut doter le pays. Il n’a de pensées que pour la construction du Sénégal et l’accès au savoir et à l’avoir pour tous.

Oui Mara peut nous titiller, nous agacer même et nous critiquer sur nos insuffisances mais il aime profondément le Sénégal et les Sénégalais. Et il est prêt à servir son pays et l’Afrique. On peut tout lui reprocher sauf de n’être pas gage de paix, de stabilité, de sécurité et de cohésion nationale. Il les incarne dans sa démarche de tous les jours comme au plus fort de ses déboires avec la Justice de son pays. Idrissa Seck n’a jamais outragé les membres de cette Institution. Son maitre mot était et restera toujours de ne jamais détruire ce qu’on aime et qu’on souhaite améliorer. A la jeune génération, il veut offrir des lendemains prometteurs dans un Sénégal rayonnant en Afrique et dans le Monde. Il ne l’appellera jamais dans la rue face aux forces de défense et de sécurité ni dans des pillages de biens d’autrui. Cette nouvelle façon de faire est en dehors de son logiciel politique de conquête du Pouvoir. Si, comme le veulent et le souhaitent de grands esprits du Sénégal et d’ailleurs, nous lui faisons confiance en 2024 pour le porter à la tète de notre Pays, il sera le remplaçant idéal du Président Macky Sall pour les grands projets nationaux en cours et la stabilité du pays. Il sera aussi le redresseur des torts inhérents à l’exercice de tout Pouvoir sans verser dans une chasse aux sorcières. Il aura été dans la Vérité et la Patience.

Idrissa Seck en 2024, ce sera au grand bonheur des Sénégalaises et des Sénégalais, qu’Il Plaise à Allah!

Moussa A. DIAW

Citoyen sénégalais au service de la Nation

*Faire de l’argent sans travailler