CORONAVIRUS: Histoires insolites du confinement
SANTE/SOCIETE :Des États-Unis au Mali, en passant par la Grèce et la Belgique, les histoires de confinement insolites se multiplient, témoignant d’une humanité qui continue de vivre, de rire et d’aimer.
Beaucoup résistent à l’isolement et lancent des initiatives via les réseaux sociaux, mais pas seulement.
Ils se sont rencontrés à Bruxelles le 15 mars, trois jours avant le confinement, et ont décidé de plonger ensemble, alternativement chez l’un et l’autre. Ils vivent depuis près d’un mois un rêve éveillé.
Une magnifique histoire d’amour au temps du Coronavirus est née, malgré les sirènes des ambulances et les patrouilles de police. À New York, la ville la plus touchée des États-Unis par la pandémie du Covid-19, où le confinement est effectif depuis le 22 mars, les témoignages abondent de co-locataires ou de voisins tombant dans les bras les uns des autres.
L’amour et la fête au temps du Coronavirus
À tel point que Katie Cicatelli-Kuc, qui a publié en mars 2019 aux États-Unis le roman d’amour Quarantine : A love story, sur deux jeunes qui se rencontrent en quarantaine après un voyage à l’étranger, connaît maintenant le succès. Prémonitoire ? Certes pas autant que le roman L’année du lion (Seuil, 2017) de l’auteur sud-africain Deon Meyer, qui avait anticipé sur une pandémie mortelle sans se tromper de nom sur le « viruscorona ». « Je n’aurais jamais imaginé que le mot quarantaine deviendrait si commun, témoigne la romancière américaine, et depuis le début de la pandémie, des lecteurs m’écrivent ».
Le 21 mars, au deuxième jour du confinement en Argentine, un couple de la ville de Cordoba a décidé de célébrer sa noce en ligne, au lieu de reporter son mariage.
Les 400 invités de Diego Aspitia et Sofia Cuggino les ont rejoints sur Internet. En attendant de pouvoir organiser une vraie fêtes, les heureux époux se sont dit « oui » sur leur canapé, sans flonflons ni robe de mariée, et ont ouvert un compte Instagram dénommé Mecasoencasa, « Je me marie à la maison ». Le 11 avril, un couple sud-africain a suivi la nouvelle tendance, avec un mariage fait maison.
Alors que les autorités, de Bruxelles à Dakar, s’inquiètent du phénomène des « lockdown parties », des soirées interdites où se retrouvent des jeunes en mettant leur santé en danger, au Maroc, une jeune femme trentenaire fait la fête avec les moyens du bord.
Tous les samedi soirs, elle se met sur son 31 « comme si elle allait dans la fête la plus chic de Casa », et danse dans sa salle de bain avec d’autres amis, qui en font de même en ligne.
De l’art pour évoquer le confinement
À Amsterdam, une designer belge a lancé une initiative sur Facebook dénommée « View from my window », pour connecter les confinés et parer à l’ennui.
Barbara Duriau rassemble des photos du monde entier, ce qui lui a valu une popularité digitale très rapide, avec 200 000 followers en quinze jours, de Tokyo à Mexico, en passant par Paris et Tel-Aviv. « Au début du confinement, je me suis dit que pendant un certain temps, chacun allait avoir une seule image en étant collé à sa fenêtre, explique-t-elle au Soir de Bruxelles. J’étais curieuse de connaître la vue d’une personne à 10 000 km de chez moi. Chacun a ce besoin de voyager et partager. » Une maison d’édition l’a contactée en vue d’un livre…
Maxime Mattys, un jeune artiste belge installé à Rennes, lui, a fait le 23 mars une performance dénommée « Sortez couverts », inspirée par le confinement français. Transformé en bonhomme de papier, il s’est recouvert des pieds à la tête de 150 attestations bien remplies pour sa sortie, afin de questionner une quarantaine qu’il juge « moyennâgeuse et contraignante ». « Jamais je n’aurais imaginé avoir besoin d’une attestation pour sortir dans la rue », proteste-t-il. Il s’est cependant conformé à la règle, en sortant moins d’une heure et à moins de un kilomètre de son domicile. La police, qui l’a contrôlé, n’a pas pu le verbaliser puisqu’il avait ses attestations. Elle lui a demandé de détruire son costume.
À travers l’Afrique, les artistes sont à la manoeuvre pour diffuser des messages simples sur les règles d’hygiène à respecter. De Bobi Wine, chanteur et opposant ougandais à Alioune Ifra N’Diaye, homme de théâtre malien et patron de la troupe BlonBa, les vidéos circulent pour donner les bons conseils.
À Dakar, les messages passent par les graffitis sur les murs, tandis que certains se sont approprié le virus pour le tourner en dérision, avec des coiffures corona de petites tresses roses, vues en République démocratique du Congo (RDC) et en Côte d’Ivoire, ou encore un modèle de pagne en wax baptisé Corona, en raison de son graphisme qui rappelle le virus.
Marathon dans un jardin
Les initiatives de yoga sur les réseaux sociaux ont fleuri avec le confinement. De là à se lancer dans un marathon… C’est ce qu’a pourtant fait un habitant de Plouay, dans le Morbihan. Anthony Le Masson a couru 100 km dans la nuit du 11 au 12 avril, en faisant 833 fois le tour de son jardin. Pour rompre l’isolement en partageant leur passion du sport, des Français se connectent à Confined Sport Challenge.
Le 4 avril à 10 heures, ils étaient un millier à se lancer dans deux heures de sport à la maison, les uns sur leur balcon, les autres dans leurs escaliers, certains sur leur vélo d’appartement. « L’idée, c’est de se changer les idées en faisant du sport chacun chez soi, mais de partager l’effort ensemble et se donner rendez-vous pour ponctuer ces semaines monotones », déclare à Ouest-France Bernard Dufour, le Breton et adepte du trail (course à pied dans la nature) à l’origine de l’initiative.
Autre histoire de sport : un père de famille et supporter de football, sorti sans attestation dans sa banlieue d’Athènes de Nea Philadelphia, pour voir le chantier du nouveau stade de son club favori, l’AEK, s’est fait verbaliser. Coût de sa curiosité : 150 euros. Le patron du club, Dimitris Melissanidis, a demandé à l’AEK de payer l’amende et de donner à cet homme une carte d’abonné pour la saison 2021.
Un café d’Athènes se recrée en ligne
En Grèce, le lien social est mis à rude épreuve par le confinement décrété le 23 mars, qui a permis de juguler la pandémie (2081 cas et 91 morts le 13 avril). Mais les habitudes ressurgissent online…
Le premier café virtuel d’Athènes a représenté un événement dans la capitale : le Kimolia (la Craie) du quartier touristique de Plaka, l’un des cafés les plus courus d’Athènes, a lancé le Online Kimolia Art Café pour recréer l’atmosphère du parfait « steki », la taverne grecque. Muni d’un code gratuit, on peut s’asseoir à l’une des dix tables virtuelles, bavarder avec ses amis, faire une réunion privée avec ou sans caméra, en « chat » ou partage d’écran.
Autre alternative : s’installer au bar ou à la « table de Maman », ouverte à tous ceux qui ont le code du café, pour engager la conversation avec des inconnus.
En Espagne, les histoires insolites de confinement se multiplient, elles aussi, chroniquées par la journaliste Perrine Laffon. Dans la commune de Vilagarcia, une femme a ainsi fait très peur à ses voisins, en s’installant en bikini pour bronzer sur le toit pentu de sa maison, sans aucune sécurité. Ailleurs, un homme sort chaque jour sur son balcon avec un nouveau déguisement, catcheur, plongeur, princesse ou sorcière, hurlant dans son haut-parleur « Je m’ennuie ! ». Un curé du village de Caceres, lui, a décidé de faire une messe acrobatique sur le toit de son église, avec autel et croix, relié par vidéo à ses ouailles. Il semble avoir été inspiré par la performance donnée le 15 mars à Rome par quatre prêtres qui, à la suite d’un pari entre eux, ont installé un autel et des haut-parleurs sur le toit de leur église, pour donner une messe dont a profité tout le voisinage.
Toutinfo.net (avec RFI)