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SUPPRESSION ACTEE DU POSTE DE PREMIER MINISTRE SAMEDI DERNIER: Une nouvelle page se tourne sous l’ère Macky

Avec le soutien de sa majorité mécanique  à  l’Assemblée  nationale,  Macky  Sall  tourne une  nouvelle  page  de  l’histoire  du  Sénégal.  Elle  portera fortement  son  empreinte  de par  l’annonce  inattendue  de la  suppression  du  poste  de Premier ministre après sa réélection  dès  le  premier  tour mais  également  par  la  rapidité  dans la mise en œuvre de la  réforme  constitutionnelle. 

Après neuf tours d’horloge, l’Assemblée nationale a approuvé à la  majorité  des trois cinquièmes (3/5)  de  ses  membres  le  projet de  loi  constitutionnelle  portant suppression  du  poste  de  Premier  ministre.  Ainsi,  sur  138 inscrits,  124  députés  ont  voté pour contre 7 rejets et 7 abstentions.  Aussitôt,  Moustapha Niasse tonne : «En conséquence l’Assemblée  a  adopté  le  projet de  réforme  constitutionnelle  à travers  l’article  unique  de  cette loi.»   Mais sans l’intervention  du député Abdou Mbow, les débats seraient  prorogés pour bien des heures.  Le député de la majorité a  ainsi  écourté  le  supplice  en proposant la clôture des débats. Ce  qui  a  été  accepté  par  la  majorité après  vote.  L’avis contraire  du député de Bokk Gis Gis,  Cheikh  Abdou  Mbacké  n’en fera  rien.  «Le  ministre  Malick Sall  ne  nous  a  pas  convaincu dans  ses  réponses.  Donc,  il  faut nous donner la possibilité de lui demander des éclaircissements par  rapport  à  certains  points», lance-t-il  dépité.    Malgré  tout,  il a  proposé  19  amendements dans  le  projet  de  révision constitutionnelle.  Là  aussi,  ce sera  sans effet.  Puisque le garde des  Sceaux  s’est  levé  pour  rejeter  les  amendements  soulevés en  plénière  avant  de  demander que  le  texte  soit  voté  tel  qu’il  a été  présenté  en plénière au sortir  de  la  Commission des lois. Ce que  la  majorité  lui  a  également accordé.

L’OPPOSITION SORT SES GRIFFES,  LE POUVOIR SUR LA DÉFENSIVE

Auparavant,  pouvoir  et  opposition  ont  eu  des  échanges  houleux  qui  ont  été  clôturés  par  les deux  présidents  de  groupe  parlementaire.  Dans  son  discours, le  Président  du  groupe  Liberté et  Démocratie  a  soutenu  que  ce projet  de  loi  n’est  qu’une  duperie.  A  ceux  qui  disent  qu’il  permettra  d’économiser  193 milliards  de  Fcfa  en  quatre  ans, Cheikh  Mbacké  Bara  Dolly  fait savoir  que si vraiment le chef de l’Etat  voulait  gouverner  de façon  sobre et vertueuse, il pouvait  invoquer  l’article  6    de  la charte  fondamentale  pour  supprimer le Hcct  et  le  Cese.  De  ce fait,  ajoute-t-il,  l’argent  qui  sera économisé  pourrait  être  réinjecté  dans l’éducation ou dans la santé.  «Mais le bien être des populations  n’intéresse  guère  ce régime.  Vous  n’êtes  mu  que  par la  politique»,  peste  le  député  de Touba. Poursuivant, il déplore le fait  que  ce  soit  la  troisième  fois que  Macky  et  son  régime change la Constitution (référendum 2016, loi sur le parrainage, et  projet  de  suppression  du poste  de  PM)  alors  que  du temps  de  l’opposition,  ils étaient  les  premiers  à  refuser qu’on  touche  à  la  Constitution. Pour Cheikh Mbacké Bara Dolly, la  suppression  du  poste  de  PM est  un  aveu  d’échec  de  ses  sept ans  de  gestion.  Dans  sa  réplique,  le  président  du  groupe Benno  Bokk  Yaakaar  (Bby)  Aymérou  Gningue  a  soutenu  que les  députés  de  l’opposition  et les  détracteurs  de cette réforme veulent  semer la confusion dans la  tête  des  Sénégalais.  A  l’en croire,  ce  n’est  pas  une  première  qu’une  réforme  constitutionnelle passe par le Parlement.    A  ceux  qui  invoquent l’article  52  faisant  état  de pouvoirs  exceptionnels,  il  dit souhaiter  qu’on  n’en  arrive  jamais-là  et  que  personne  ne doit le  souhaiter.  «Depuis  toujours, l’article  52  a  toujours  été  présent  dans  la  Constitution.  Donc, que les gens de mauvaise foi arrêtent  d’épiloguer  sur  cet  aspect».  A  ceux  qui  reprochent  à Macly Sall  d’avoir  nommé le PM en  même  Secrétaire  général  de la  présidence  de  la  République, il  estime  que  ceux-là  n’ont  qu’à saisir  la  Cour  suprême  pour  un recours  s’ils  trouvent  cela  illégal.  «Nous respectons la séparation  des  pouvoirs.  Et  s’il apparait  que  le  Président  est dans  l’illégalité,  la  Cour  Suprême le signifiera  au président de  la  République.  Laissez-nous dérouler  avec  nos  alliés  de  BBY. Avec  notre  coalition,  nous comptons  gouverner  ce  pays pendant  35  ans.  C’est  notre  volonté», martèle Aymérou Gningue.  


Aymérou  Gningue, président  du  groupe Benno  Bokk  Yaakaar  (Bby)

MOTION PRÉJUDUCIELLE DE MAMADOU LAMINE DIALLO 

Prenant  la  parole,  le  député  de la  coalition  Taxaawu  Dakar, Cheikh  Bamba  Dièye  a  regretté que Macky Sall n’ait jamais évoqué cette  réforme  durant  les  21 jours  de  campagne  de  la  dernière  présidentielle.  Or,  elle  devrait faire l’objet d’une concertation  avec  toutes  les forces  consentantes  de  la  nation,  de  l’avis  du  leader  de FSD/BJ.  Ce  dernier  estime  que ce  «projet  de  loi  accorde  des pouvoirs  exorbitants  au  chef  de l’Etat  qui  n’est  plus  le  chef  de l’Exécutif, mais  représente l’Exécutif  à  lui  seul». Quant  à  Mamadou  Lamine Diallo,  il  a  tenté  d’ajourner  le débat  en  invoquant  une  motion préjudicielle  qui  a  finalement été  rejetée.  Mais  dans  son  argumentaire,  le  député et leader du mouvement Tekki estime que la séance  de samedi dernier est illégale  et  anti  constitutionnelle. Explications  :  «Lorsque le président de la République nomme le même Premier  ministre,  ministre  d’Etat  secrétaire  d’Etat  à  la présidence  de  la  République, c’est  illégal.  Puisqu’il  se  permet de  rajouter  ce  que  la  Constitution  ne lui permet pas. Il rajoute lui-même  des  fonctions  au  Premier  ministre.  De  ce  fait,  le  projet  de  révision  signé  par  le Premier  ministre  est  donc  illégal  ainsi  que  tous  les  actes  qu’il pose.  La  deuxième  raison,  c’est qu’il  y  a  une  rupture  d’égalité dans  la  mesure  où  un  député nommé  ministre  peut  reprendre  son  poste  de  député  s’il  est démis  de  ses  fonctions  dans  le gouvernement.  Alors  que  ce n’est  pas  possible  pour  un  député  directeur  général  ou  autre chose.»  Le  Président  du  groupe parlementaire  de  l’opposition, Cheikh  Mbacké  Bara  Dolly, d’ajouter  que ce sera également un  moyen  pour  un  ancien  ministre  qui  a  commis  des  fautes lourdes  de  venir  se  réfugier  à l’Assemblée  Nationale et bénéficier  d’une  immunité  parlementaire. Prenant  la  parole,  le  président de  la  Commission  des  lois  a  essayé  de  démonter  les  arguments  de  l’opposition.  Seydou Diouf  d’indiquer  que  ce  projet n’engendre  en  rien  une  rupture d’égalité  parlant  de  la  suppléance.  Parce  que,  dit-il,  le  ministre  n’est  pas  DG.  «On  aurait parlé  de  rupture  d’égalité lorsqu’on  accepterait  le  retour à l’Assemblée  nationale  un ministre  démis  et  qu’on  l’aurait  refusé  à  un  autre  ministre.» Poursuivant,  il  soutient  que cette  réforme  n’est pas ce qu’on veut  présenter  et  qu’elle  n’entache  en  rien  les  prérogatives de  l’Assemblée  nationale.  «J’en veux pour preuve la pratique de notre  système  de  contrôle  parlementaire  depuis  1963.  Dans notre  pays,    je  peux  dire  que  la motion  de  censure  a  été  un  élément cosmétique qui n’a jamais été  mise en œuvre depuis 1963. Quand bien même depuis 1963, l’Assemblée  contrôle  l’action  du gouvernement.  Et le pouvoir de dissolution  est  un  réactif  à  la motion  de  censure.  Mais  dès lors  qu’on  enlève  la  motion  de censure    il  ne  peut  plus  y  avoir de  pouvoir  de  dissolution»,  a-til  déclaré.  Concernant enfin l’organisation  de  la  suppléance,  il considère  que  la  loi  constitutionnelle  parle  juste  du principe et  qu’une  loi  organique  sera présentée  pour  déterminer  les modalités  de la suppléance tant pour  les  listes  départementales que  pour les  listes  nationales.
( Seydina  Bilal  DIALLO avec Toutinfo.net ) 

Mamadou
Lamine DIALLO, Député et leader du mouvement Tekki