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NAUFRAGE D’UNE PIROGUE: Six pêcheurs mbourois périssent en mer

Dimanche dernier, dans l’après-midi, la ville de Mbour a été endeuillée par la mort de six pêcheurs partis en mer à la recherche de produits halieutiques. Sur l’équipage de 8 membres, il n’y a eu que deux survivants. vieux, Ahmet Diagne, Mamoudou Sow, Bara et Madou Dionne ont perdu la vie après le chavirement de leur pirogue.

C’est l’émoi et la consternation à Mbour sérère. Ce quartier paisible a été frappé de plein fouet par la mort tragique de six de ses fils. En effet 6 jeunes pêcheurs, faisant partie d’un équipage de 8 membres, ont perdu la vie suite au chavirement de leur pirogue. Alors qu’ils étaient partis en marée (campagne depêche de 4 jours), leur embarcation a chaviré. Chez les Sow qui vivent au 30 m de Mbour sérère, c’est avec beaucoup de douleur que la famille vit la disparition de son fils. Dans la maison, les voisins et les proches viennent, dans un incessant ballet, présenter leurs condoléances. D’ailleurs, les habitants du quartier font le tour des maisons endeuillées pour manifester soutien et compassion aux éplorés. Dans la maison des Sow, Adramé, père de Mamoudou, se montre digne et s’en remet à Dieu. «C’est la volonté divine et personne ne peut échapper à son destin», dit-il aux gens venus présenter leurs condoléances. Avant de raconter l’amour que son fils avait pour la mer. Bien qu’il fût toujours parmi les premiers de sa classe, Mamoudou n’hésitait pas à fuguer pour partir en mer. Adramé Sow, qui croyait que l’avenir de son enfant était dans les études, s’est donné corps et âme pour dissuader ce dernier, allant même jusqu’à le punir. En dépit de tout, le jeune homme a tenu tête. Un jour, se rappelle Adramé, «Mamoudou est parti à Joal à bord d’un vélo pour aller en mer. En cours de route, vers Ngasobil, il a rencontré des gens qui l’ont trouvé bizarre. Pour leur échapper, il leur a dit qu’il habitait à Nguéniène (une bourgade située à 10 km de Joal) afin de brouiller les pistes. Après avoir fait le tour du village, ils sont retournés sur leur pas et ont décidé de l’amener à Thiès. Arrivé à Mbour sérère, il leur a montré la maison parce qu’il avait peur de poursuivre le chemin avec des inconnus». C’est après cette rencontre que le père a été convaincu de laisser son enfant vivre sa passion. Le mardi avant de se coucher, Adramé a remis à son fils 1 500Fcfa pour acheter à manger. Malgré son jeune âge, Mamoudou contribuait aux charges de la famille. Avec sa disparition, il laisse derrière lui un père meurtri et des proches inconsolables.

MAMADOU BA RACONTE LE DRAME : LE RÉCIT POIGNANT D’UN RESCAPÉ

La mort, Mamadou Ba, l’un des deux rescapés de l’équipage de 8 membres, l’a côtoyée de si près. Il a en effet vu ses camarades mourir l’un après l’autre. Ce souvenir macabre fera désormais partie du vécu de ce pêcheur de 25 ans. Trouvé chez lui au quartier Mbour sérère, il retrace le film de la tragédie qui s’est déroulée en haute mer. Le jeune Mamadou Ba, un des deux rescapés de l’équipage de 8 membres, n’oubliera jamais le drame qu’il a vécu. Ayant vu de si près la mort, il raconte l’horreur. «Nous sommes partis en mer le mercredi et nous devrions rentrer le samedi. Mais en cours de route, le drame est survenu. Nous étions partis à Teul ; certes le vent violent nous a trouvés en mer, mais il n’a causé aucun dégât», dit-il d’un air triste. Malgré les mauvaises conditions météorologiques, la prise a été bonne. Et au retour, l’équipage était déjà aux anges parce qu’il pensait faire de bonnes affaires au port de Mbour. «Hélas ! En cours de route, nous avons rencontré beaucoup de problèmes. La pirogue a commencé à présenter des défaillances en prenant plus d’eau. Nous avons évacué l’eau ; il y en avait beaucoup au niveau du moteur, et la pirogue a commencé à chavirer.

Nous nous posions des questions sur ce qui faisait rentrer l’eau dans la pirogue. C’est ainsi que deux jeunes (Ahmet, Mamoudou) et moi, nous nous sommes agrippés sur une caisse de marée. De 4 h du matin jusqu’à 8h, nous avons nagé. Les deux jeunes n’en pouvaient plus, ils étaient épuisés et ont finalement lâché prise». Vieux, Ahmet Diagne, Mamadou, Bara et Madou Dionne ont perdu la vie. Revenant sur les moments tristes, M. Dia revit la situation si difficile. Lors de ce drame sur un équipage de 8 membres, seules deux personnes ont survécu : Aliou Badara et Mamadou Ba. «Lorsque la pirogue a commencé à chavirer, les gens m’ont demandé d’aller amarrer la pirogue parce qu’ils avaient pris panique. Il n’y avait pas de cris. Tout le monde disait Lahilaha Illalah. Après, ce fut le sauve-qui-peut. Cinq membres de l’équipage se sont agrippés sur la caisse de la pirogue, alors que les deux autres jeunes s’étaient agrippés sur une caisse. C’est vers 8h du matin qu’Ahmet et Mamoudou ont perdu la vie. Une heure plus tard, une pirogue est tombée sur moi. Avant de disparaître dans l’océan et de mourir, Ahmet Diagne m’a appelé trois fois. Hélas, je n’y pouvais rien. Mon autre compagnon Mamoudou a rendu l’âme sur la caisse à cause de la fraîcheur. Après que j’ai été secouru par la pirogue, nous avons parcouru à peine 12 km que l’un des pêcheurs a dit entendre des cris. Mais nous n’avons vu personne. Nous avons donc repris le chemin et des cris se sont faits entendre de nouveau. Et là, nous avons aperçu le nommé Aliou Badara sur une des caisses de la pirogue. Nous l’avons récupéré, puis nous lui avons posé des questions sur le reste de nos compagnons. Etreint par l’émotion, il a craqué en disant : «ils sont tous morts devant moi, un à un».

( André BAKHOUM )