Attribution des licences de pêche- Paiement des redevances : Les révélations de la Cour des comptes
L’attribution des licences de pêche obéit à une procédure qui fait intervenir plusieurs acteurs. A côté de la Direction des Pêches maritimes (DPM) , qui pilote la procédure, interviennent la Direction de la Protection et de la Surveillance maritime (DPSP) et l’Agence nationale desbAffaires maritimes (ANAM) qui sont chargées, entre autres, de remplir et de viser la fiche de contrôle préalable à la délivrance de la licence. Participent également à la procédure, en qualité de membres de la commission consultative d’attribution des licences, la Direction des Industries et de la Transformation des Produits de la Pêche (DITP), le Centre de Recherche océanographique de Dakar Thiaroye (CRODT), le Groupement des Armateurs et Industriels Contrôle de la gestion des licences de pêche (2010–2016) et l’Union patronale des Mareyeurs Exportateurs du Sénégal (UPAMES). Dans son rapport définitif sur le « Contrôle de la gestion des licences de pêche » dans la période allant de 2010 à 2016, la Cour des comptes a observé des irrégularités.
D’abord dans l’obtention des licences de pêches, la Cour qui a examiné les dossiers de demande de licence, a fait « ressortir que des piéces sont manquants et que certains documents n’offrent pas toutes les garaties de régularités ».
Elle a aussi relevé « une prorogation irrégulière des actes de nationalités provisoirs » qui est une obligation pour l’obtention ou le renouvellement de la licence. La Cour parle d’une « violation des dispositions du Code de la marine marchande ».
Situation des redevances dues et des versements effectifs pour les licences accordées entre 2010 et 2016.
Dans son rapport, la Cour constate une redevance impayée de 782 003 562 millions F Cfa.
Ainsi, au lieu de cinq milliards sept cent trente et un millions cinq cent quarante-neuf mille
trois cent vingt-deux (5 731 549 322) francs CFA, il n’a été liquidé par la DPM que la somme
de quatre milliards neuf cent quarante-neuf millions cinq cent quarante-cinq mille sept cent
soixante et un (4 949 545 761) francs CFA, soit 86,35 % du montant total effectif à verser. Il
en découle un écart de sept cent quatre-vingt-deux millions trois mille cinq cent soixante et un
(782 003 561) francs CFA entre les redevances à payer et les versements effectifs », informe la note.
La Cour rappelle que « les redevances représentent la contrepartie du droit d’accès à la mer concédé aux navires et constituent des recettes publiques qui alimentent le budget national ».
Par conséquent, regrette la Cour, « la mauvaise liquidation de ces redevances induit ainsi un important manque à gagner pour l’Etat ».
Pis, « ceci impacte également les intérêts de la Caisse d’Encouragement de la Pêche industrielle et artisanale (CEPIA) et de l’Agence de Gestion et de Coopération entre le Sénégal et la Guinée
Bissau (AGC) qui subissent ainsi une diminution de leurs recettes potentielles, du fait qu’une
partie des redevances leur est reversée selon la clé de répartition suivante : 95% Etat et
CEPIA (respectivement pour 1/3 et 2/3) et 5% pour l’AGC ».
Le directeur des pêches maritimes, Mamadou Goudiaby explique que « cette liquidation incomplète par le fait que ses services ne facturent pas toute la période de validité des licences en cause lorsque des repos biologiques y sont observés. Ainsi, il est procédé à une soustraction d’une valeur égale à 1/12 ou 1/6 selon que la licence est annuelle ou semestrielle.
Pour M. Ousmane Ndiaye, ancien DPM ( Directeur des Pêches Maritimes), « les écarts pourraient être justifiés par l’existence de doublons mais également la prise en compte des repos biologiques ».
Cependant, la Cour considère que l’octroi de licence, tout comme la liquidation de la
redevance y afférente, ne sont pas subordonnés à la durée effective d’exercice de l’activité halieutique. La législation sénégalaise ne retient que la licence semestrielle ou annuelle indépendamment de la période de délivrance et du type de pêche qui se pratique selon les
espèces sur une période plus ou moins courte par rapport à la durée de la licence ».
Des lors, ajoute le document, » l’adoption du repos biologique, qui constitue une mesure de gestion du secteur qui vise notamment à améliorer les conditions d’exercice de la pêche pour les attributaires de licences, ne saurait servir de prétexte pour réduire le montant des redevances à payer par ces derniers ».
En conclusion, la Cour recommande « au directeur de la DPM de procéder à la liquidation complète des montants des redevances indépendamment des mesures de gestion du secteur, comme le repos biologique, qui pourraient être prises par les autorités ».