Abdoulaye Wilane raconte Mamadou Diop: « L’armée, la gendarmerie, le barreau, la magistrature, les hommes politiques perdent un homme d’une dimension exceptionnelle ».
Son premier emploi, c’est Mamadou Diop qui le lui avait offert. C’est aussi cet ancien maire, dont le nom est, à jamais, cimenté dans l’histoire de la capitale sénégalaise, qui est allé demander la main de sa première épouse. Aujourd’hui, Abdoulaye Wilane, à l’instar de la grande famille socialiste, est plus qu’attristé par la disparition de « Diop le maire ». Il nous dresse le parcours de cet homme qui a marqué sa vie.
« Mamadou Diop était un homme d’engagement, qui s’est sacrifié et a tout sacrifié pour le Sénégal. Il aimait le savoir et la compétence avérée. Cet autodidacte qui a fini sa vie comme avocat et membre du Conseil économique social et environnemental (Cese), fut auparavant un grand officier qui, dans la gendarmerie, a été jusqu’à diriger l’école de formation des jeunes officiers. Il aimait tellement le savoir et la connaissance, qu’il avait du plaisir à prendre en charge les études supérieures de milliers d’enfants sénégalais. »
Il a apporté des modifications au palais
« Il a été colonel, un homme qui se préoccupait beaucoup de la sécurité et de la sûreté. Et, ancien secrétaire général de la présidence, il a fait des modifications au palais de la République. L’actuelle présidence comporte des locaux qu’il a réalisés pendant qu’il y était secrétaire général. Aussi, le ministre des Transports et de l’équipement, pour ne pas dire des Travaux publics qu’il fut, a mené des chantiers à travers le pays. A titre d’exemple, la route Mbacké Touba, le marché Ocas, pour ne citer que ces exemples. Le ministre de la Santé qu’il fut, a aussi beaucoup fait à travers le Sénégal. »
1984, début de l’aventure dakaroise
« Il a, par la suite, été happé par le monde politique, à travers la communauté Léboue du Cap-vert. Son père, Ousmane Diop Coumba Pathé, qui était un des lieutenants et homme d’appui de Senghor, avait demandé à ce que Léopold commença à faire la promotion des fils du terroir. C’est ainsi que Mamadou Diop est entré en politique. Et plus tard, après le départ de Senghor, en 1984, il est devenu maire de Dakar. »
Une idée ce qu’il a construite
« À l’époque, la mairie ne pouvait même pas acheter de stylos. Le secrétaire municipal d’alors, M. Moustapha Lô marchait à pieds. Aujourd’hui, si au Sénégal on sait ce qu’être maire, si au Sénégal on sait que le maire peut résorber le déficit en infrastructures sociaux de base, c’est grâce à lui. Allez à Gaspard Camara, le centre de santé Abdoul Aziz Sy des Parcelles assainies, celui de Ouakam, de Yoff, des Hlm, de Grand Dakar, l’aménagement des allées de Cheikh Sidati Aïdara ou de Seydou Nourou Tall etc., Mamadou Diop en a été l’auteur. Les Parcelles assainies de Dakar, c’est aussi Mamadou Diop. »
« Suspecté d’ambitions présidentielles »
« Dakar est jumelé à beaucoup de capitales du monde parce que Mamadou Diop avait un carnet d’adresses et un entregent qui s’y prêtait. Homme politique, il était pragmatique. Il était devenu tellement populaire qu’en un moment, il était craint, parce que suspecté d’avoir des ambitions présidentielles.
À l’époque, il avait des relations étroites avec Touba, Tivaouane, Yoff, Ndiassane, les Niassènes et le clergé catholique. Mais sa loyauté au Ps, à Abdou Diouf, n’a jamais manqué d’être illustrée, si bien qu’après la séparation en 2002, il a créé un parti d’obédience socialiste. »
Le dernier souhait de Diop le maire
« Mamadou Diop, dans ses derniers instants, souhaitait travailler discrètement, mais avec sincérité, pour des retrouvailles de la grande famille socialiste. Malheureusement, les vicissitudes de la vie politique ont retardé cela. Mais, il y travaillait. Il était dans Bennoo, il a soutenu Macky Sall qui le lui a rendu en faisant de lui un des plus grands membres du Cese. Mamadou Diop est une perte incommensurable. »
« Il m’a offert mon 1er emploi »
« Moi, personnellement, je le pleure. J’ai été dans son cabinet. Il m’a donné mon premier emploi. C’est lui qui est allé demander la main de ma première femme. Il a beaucoup fait, avec Thierno Birahim Ndao, pour mon terroir Kaffrine. Mes relations avec lui, ont été déterminantes dans le fait que je suis devenu aujourd’hui maire de Kaffrine. Au parti socialiste il jouissait, jusqu’ici, d’un respect profond. Le secrétaire général du parti, Ousmane Tanor Dieng et tous les membres du bureau politique saluent sa mémoire, s’inclinent devant sa dépouille et présentent leurs condoléances les plus sincères, les plus émues. »
Après Mamadou Diop, le désert
« Mais, nous pouvons nous consoler de ceci: non seulement il a écrit après avoir agi, il a professé mais aussi il a incarné. Les hommes politiques du moment doivent prendre exemple sur lui. Voilà quelqu’un qui s’est sacrifié, qui a sacrifié sa vie de famille pour l’intérêt général, pour servir sa communauté. La communauté léboue perd un digne représentant. L’armée, la gendarmerie, le barreau, la magistrature, les hommes politiques perdent un homme d’une dimension exceptionnelle. Des hommes comme Mamadou Diop, il n’y en aura plus, ou du moins, il sera difficile d’en avoir. »