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CHRONIQUE DE MAME GOR NGOM : Bamba Fall et les « beaux jours » de la transhumance

CHRONIQUE : La transhumance a de beaux jours devant elle. Du moins au Sénégal où ce mot a connu une certaine « popularité ».

Ce substantif très chargé, est défini comme un système d’élevage fondé sur le déplacement de troupeaux de régions vers d’autres dont les périodes de végétation sont décalées en fonction des saisons ou en raison de climats différents. Wikipédia parle de migration périodique d’une part du bétail de la plaine vers la montagne ou de la montagne vers la plaine, d’autre part des abeilles d’une région florale à une autre, et ce, en fonction des conditions climatiques. Le Larousse évoque un « déplacement saisonnier d’un troupeau en vue de rejoindre une zone où il pourra se nourrir, ou déplacement du même troupeau vers le lieu d’où il était parti. 

Autant de définitions « animalières » qui expliquent suffisamment les réactions négatives de ces hommes politiques qualifiés de transhumants. Celui qui a collé ce mot aux mœurs politiques sénégalaises est d’une inspiration décapante. La transhumance a la peau dure sous nos cieux. Rares sont les acteurs de la scène capables de traverser un vaste désert en attendant des lendemains meilleurs. Ils préfèrent croquer le pouvoir à belles dents hier, aujourd’hui, demain et pour toujours…

Bamba Fall peut-il être classé dans cette catégorie d’hommes politiques qui ont quitté la « galère » pour des prairies luxuriantes ? Manifestement non, si l’on sait que l’actuel maire de la Médina, ne doit pas être dans ce besoin si pressant qui le pousse à aller à la quête d’un éventuel paradis terrestre. Élu en 2009, il a su résister aux appels de Wade et à sa contre-offensive à la suite d’une défaite qui a fait beaucoup de dégâts à Dakar. Sous l’aile protectrice de Khalifa Sall « grand maire » de la capitale, il a été réélu en 2014 contre la volonté du pouvoir actuel qui voulait « récupérer » Dakar. 

Un second mandat à la tête de la Médina qui n’à pas été de tout repos. Le verbe haut face au régime et face au leader du Parti socialiste le défunt Ousmane Tanor Dieng, il a fini par être emprisonné à la suite de violentes bagarres à la « Maison du Parti » à Colobane.  Il sera rejoint à Rebeuss par Khalifa Sall. C’était écrit si l’on sait que la volonté du président de « réduire l’opposition à sa plus simple expression » était à son summum.

Sall qui a pesé de tout son poids pour l’élection de l’actuel président à la Magistrature suprême, ne serait pas à Rebeuss s’il épousait à la lettre la démarche des dirigeants actuels. Combien de voleurs « pris la main dans le sac», sont aujourd’hui bien à l’aise dans la «République de la rupture» ? En décidant de faire face à Macky et les siens et rester à la Mairie de Dakar, il était sans doute conscient qu’il est strictement dans le viseur de ses « ennemis ». Bamba Fall aussi. C’est pourquoi la « transhumance » de ce dernier aux lendemains des élections locales du 23 janvier 2022 intrigue ici et là même si on a longtemps prêté à Fall des intentions de « capitulation » face aux assauts d’en face. N’a-t-il pas cédé au mauvais moment ? Certes, les élections locales ne sont plus d’actualité, mais le futur si proche ne s’annonce pas merveilleux. La jurisprudence Moussa Sy aux Parcelles Assainies battu après avoir rejoint le pouvoir, est là pour le démontrer. 

Contradictions et risques…

Le salut de l’actuel ministre-conseiller-maire réside dans une victoire éclatante lors des législatives de juillet dans sa localité. Ce qui n’est pas du tout évident vu le contexte de désenchantement qui avait beaucoup joué en défaveur du régime et a été bénéfique pour lui et pour nombre de candidats de l’opposition devenus maire non pas du fait de leurs qualités intrinsèques mais à cause d’une certaine impopularité des gouvernants actuels. Fall a beau tenter de défendre une maîtrise parfaite de ses « troupes » mais cette thèse ne résiste pas à la réalité socio-politique. Les militants, pour fidèles qu’ils soient, ne sont pas des moutons de Panurge qui suivent un guide sans broncher en dépit de ses contradictions réelles. Bamba Fall est libre de choisir son camp comme tous les autres transhumants mais il ne peut pas prévoir ce que sera demain et la conduite future de ses soutiens. 

C’est là où sa posture radicale face aux journalistes de la Tfm vendredi dernier, pose problème. 

En arguant que son choix est guidé uniquement par une sorte de défiance de l’opposition incarnée par Yewwi Askan Wi, il n’intégre pas la donne des frustrés de son camp qui épousent ses idées du fait de son statut d’opposant et d’autres citoyens pas engagés politiquement qui constituent l’essentiel de l’électorat. Les autres maires de l’opposition aujourd’hui avec le leader de l’Apr, sont dans la même situation.

En tentant de défendre une troisième candidature de Macky Sall, tout en essayant de narguer ses contempteurs, il érode sensiblement sa crédibilité déjà entamée et étale une inconstance manifeste. Lui qui portait si souvent les habits d’opposant radical. La marque de fabrique des transhumants !

L’INFO