ABDOULAYE WILANE, PORTE-PAROLE DU PS : ‘’Que ceux qui ont des ambitions règlent d’abord l’équation des Locales’’
Abdoulaye Wilane cloue au pilori les détracteurs de l’actuelle Secrétaire général du Parti socialiste, Aminata Mbengue Ndiaye. Le porte-parole du Ps et maire de Kaffrine qui revient dans cet entretien sur l’hommage qui sera rendu à feu Ousmane Tanor Dieng aujourd’hui, invite tous ceux qui lorgnent le fauteuil d’Aminata Mbengue Ndiaye à d’abord régler l’équation des Locales. À propos de ces joutes d’ailleurs, le socialiste n’exclut pas de rééditer le coup de 2014 si jamais les mêmes conditions et les mêmes circonstances se présentent au moment des investitures.
Cela fait deux ans que disparaissait votre Secrétaire général Ousmane Tanor Dieng. Quel est le sentiment qui vous anime aujourd’hui en tant que socialiste et qu’est ce qui est prévu à cet effet ?
Je voudrais d’abord commencer par replacer l’évènement dans son contexte. Et vous le savez, il y a de cela deux ans, était ravi à notre affection et à la surprise générale, le président Ousmane Tanor Dieng alors président du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT), Secrétaire général du Parti socialiste, membre éminent, influent de l’Internationale socialiste et un des co-fondateurs, j’allais dire un des dirigeants de l’Alliance mondiale progressiste. Cet enfant de Nguéniène qui, depuis le royaume d’enfance pour ne pas dire le berceau natal, jusqu’au concert des nations à travers les couloirs et les bureaux de travail de l’Organisation des Nation unies, a valorisé l’école sénégalaise. C’est en cela qu’il disait d’ailleurs qu’il est un enfant de la République qui lui a tout donné à travers et par l’école. Cet homme qui fut un des collaborateurs du Président Senghor et qui a été pendant longtemps un homme de confiance du Président Abdou Diouf, a quitté ce monde à la surprise générale. Et nous avons, après le deuil, décidé d’en faire une perspective en ce sens qu’au plan des valeurs et des principes, au plan des actes qu’il a posés et de tout ce qui le distinguait, Ousmane Tanor Dieng peut être valablement être offert en exemple non seulement aux dirigeants actuels du Sénégal, de l’Afrique et du monde, mais aux jeunes générations et à l’avenir de ce pays.C’est la raison pour laquelle en 2020, nous avions commémoré l’hommage qu’on lui a rendu lors son rappel à Dieu. Cette année, nous avions envisagé, dans l’espoir que la covid allait s’estomper, d’organiser de grandes festivités, pour revisiter sa vie, son action et sa pensée. Mais pour faire face aux réalités du moment, nous avons tenu compte des avis sages et éclairés des membres de sa famille, parce que Ousmane Tanor Dieng est quelque part, membre d’une famille biologique comme il a plusieurs amis d’obédience différentes, de sensibilités divergentes, nous avons écouté tout le monde, et tenant compte des avis des médecins et spécialistes de la santé, nous avons décidé de réduire au symbolique, ce que nous envisageons demain (Ndlr : aujourd’hui). A titre illustratif, je voudrais annoncer que demain à Nguéniène, sa terre natale où il dort aux cotés de son illustre père, feu Birane Dieng, dans l’enceinte du domicile paternel, les maitres coraniques qui officient dans l’école coranique qu’il entretenait et dont sa famille perpétue l’œuvre, et des Imams et Oulémas membres de la famille, se retrouveront pour prier, implorer pardon et souhaiter que Dieu l’élève au grade de ses élus privilégiés au paradis. Dans le même temps et au même moment, à Dakar, à partir de 9h30, nous nous donnons rendez-vous à la mosquée Omarienne où il avait l’habitude de célébrer la prière du vendredi et les jours de fête d’Aïd. Comme tout le monde le sait, il habitait Fann et avait souvent l’habitude de se rendre auprès de Imam Ndiaye à Mermoz où il faisait les cinq prières. Là-bas aussi nous nous déplaceront à 11h, pour communier et être en union de prière avec les pratiquants et les croyants qui fréquentent cette mosquée. Nous savons que chrétiens ou musulmans, partout à travers le Sénégal, il y a des Sénégalaises et des Sénégalais qui, seuls ou en regroupements restreints, se réuniront et seront en union de prières pour élever des versets et des prières en vue de demander pardon et de prier pour notre pays, car il faut le dire et le répéter, ce que Ousmane Tanor Dieng a le plus aimé dans sa vie, c’est le Sénégal et son terroir. Donc c’est l’occasion pour nous, de prier pour Ousmane Tanor Dieng et pour tous nos devanciers, mais de prier particulièrement pour le Sénégal, sa patrie et son parti.
Avec sa disparition, Ousmane Tanor Dieng a laissé un grand vide au sein du Ps. Pensez-vous qu’il puisse aujourd’hui être comblé ?
Dans la vie, sous tous les cieux, dans toutes les familles, chaque jour il y a un vide constaté ou pas. Les cimetières sont remplis d’hommes et de femmes de grandes valeurs, mais la vie pour autant, continue. Ousmane Tanor Dieng, sur la base du courage, de la force des convictions, de sa fulgurance d’idées, de son humilité, nous a laissé un legs et ce legs s’appelle l’avenir, un avenir adossé à des valeurs et à des convictions, chevillé à des principes qui font que, pour nous militants du Parti socialiste, pour nous Sénégalais, Africains, pour nous militants des valeurs universelles, Ousmane Tanor Dieng ce qu’il nous a laissés, c’est un projet. Un projet, on s’en saisi après en être convaincu et on s’arme de capacité d’adaptation, et on guette les opportunités pour les transformer et pour les mettre en œuvre. Il est évident qu’à l’échelle du parti, le plus précieux héritage qu’il nous a laissé, nous tous qui étions ses compagnons et qui nous réclamions de sa confiance, c’est l’impérieux devoir, l’obligation de rester unis, solidaires, pour ensemble, essayer de réunifier la famille socialiste. Mais également de donner une réponse actuelle à des questions ultérieures, c’est-à-dire préparer l’avenir dès maintenant. Et cet avenir dans l’horizon immédiat qui se profile, c’est à partir du moment où on comprend que la force des organisations, c’est la discipline et la solidarité, préparer les élections locales en nous inspirant des différentes stratégies qui ont été mises en œuvre de 2000 à 2019 en passant par 2012, c’est-à-dire rester inébranlable dans nos choix librement consentis, renforcer notre parti. Ce qui contribuera à renforcer la coalition dans laquelle nous nous sommes engagés. A chaque fois qu’on peut faire quelque chose dans le cadre de la coalition, ensemble, nous le ferons. Si nous on ne le peut pas, chacun peut faire ce qu’il pense devoir faire, tout en essayant de sauvegarder la coalition.
Peut-on s’attendre à une dynamique unitaire de Benno bokk yaakaar dans toutes les localités du pays, lors des prochaines élections locales?
Je vais vous dire, le Parti socialiste a plusieurs expériences de participation à des élections. Pour parler récemment des expériences du CPC, de la CPA, du Front Siggil Sénégal et de BBY. En 2012, nous sommes allés tous séparés avec un report de voix systématiques respecté. En 2019, nous avons été tous derrière un candidat. Entre temps en 2014, on a eu des listes concurrentes et qui, après les élections, ne nous ont pas empêché d’être dans BBY. Cela veut dire que si nous pouvons aller ensemble tous sous la bannière de Benno, c’est tant mieux. Si nous ne le pouvons pas, la démocratie est l’esprit de la concurrence saine nous permettrons certainement, de rééditer à l’échelle des localités concernées ou à l’échelle nationale, les expériences que nous avons vécues dans le passé.
Peut-on donc s’attendre à des localités où le Ps ira seul ?
Ecoutez, je ne sais pas. Moi je n’insulte pas l’avenir. Chaque localité a sa réalité. En tout cas ce que nous souhaitons, et qui est la ligne du Parti socialiste clairement définie, c’est tous ensemble dans Benno dans la grande mouvance présidentielle. Tous ensemble, faisons confiance à nos dirigeants qui, à leur tour, feront confiance au président Macky Sall. Et nous essaierons d’amoindrir les divergences, de concilier les positions et d’avoir le maximum d’accords, parce que ce qui est important, c’est d’être du coté de la victoire et de partager la joie et le mérite de la victoire, plutôt que de s’affronter en se faisant mal tous collectivement.
En 2014, vous étiez allé seul contre BBY à Kaffrine, est ce que…(il coupe)
Une hirondelle ne fait pas seul le printemps.
Toujours est-il que vous aviez présenté une liste contre BBY dans la localité que vous dirigez. Etes-vous aujourd’hui dans la même dynamique ?
Mais c’est une réalité et j’en étais très fier. Dans les mêmes conditions et les mêmes circonstances, nous rééditerons le coup. Pour l’instant, puisque je dis que je respecte ma parole, je cherche autant que faire ce peu, avec le Président Macky Sall, avec les leaders de BBY et avec les différents alliés de Kaffrine, à minorer les risques d’éclatement de Benno, les risques de concurrence qui peuvent porter préjudice à la coalition de la mouvance présidentielle, parce que vous savez, seule la victoire est belle.
La commémoration de la disparition de Tanor intervient dans un contexte où certaines voix s’élèvent au sein du Ps pour décrier une certaine atonie. Qu’en pensez-vous ?
C’est ça la démocratie non ! Mais pour autant ce que je souhaite c’est que ce qui doit être dit soit dit dans les instances régulières du Parti socialiste. Il faut avoir l’idée de débat et il faut être convaincu que l’idée de débat n’est pas le débat. Le débat ça se fait dans les instances de base. Maintenant, une fois le débat posé à l’intérieur des instances régulières, une fois que le parti décidera d’une ligne de conduite, la force d’une organisation étant la discipline, tout le monde s’y conformera et tous ensemble on avancera. Tous ceux qui sont restés au Ps et qui étaient avec Ousmane Tanor Dieng n’ont pas le droit de se trahir eux-mêmes en essayant d’affaiblir le parti ou ce que Tanor nous a légué. Si nous étions sincères et loyaux avec Tanor, c’est le lieu de montrer que nous devons mériter de lui, c’est-à-dire être ensemble. Ensuite, il faut que nous soyons intelligents et pragmatiques. Si je donne l’exemple du Parti socialiste français, chaque fois, depuis Mitterrand, que quelqu’un devait être premier Secrétaire avec comme objectif l’ambition de devenir président, il a échoué. Tout récemment les meilleurs candidats que le Ps a eus qui ont fait des scores honorables, c’étaient Ségolène Royale qui n’était pas première Secrétaire et qui a été investie par le parti et qui est allée au deuxième tour. C’était ensuite François Hollande, quand on l’élisait comme président de la République, il n’était plus premier Secrétaire. Nous devons nous inspirer de cet exemple pour considérer que Aminata Mbengue Ndiaye a toutes les légitimités et a un âge qui fait qu’elle peut réunir tout le monde et que ceux qui veulent demain avoir des ambitions, n’ont qu’à d’abord commencer par régler l’équation des locales, ensuite rester solidaires, puis mériter des militants du parti, et enfin d’essayer d’être en mesure de se réconcilier avec toutes les considérations historiques du Parti socialiste, avant de chercher à lorgner que ce soit. Pour autant, je rappelle que notre expérience est une expérience délicate. Nous en gardons et portons les stigmates comme les traces et les marques. Il faut considérer que beaucoup de gens couchent sous le manteau du Ps alors que certainement quelque part, soit ils sont en service commandé, ou bien ils jouent aux anguilles et aux torpilles pour empêcher au Parti socialiste de jouer son rôle dans l’histoire et pour l’avenir de ce pays. Nous les connaissons et nous les avons en face. Nous les aurons en face parce qu’il s’agit pour nous, d’inventer le futur dès maintenant.
Pour certains, le compagnonnage PS-BBY est largué au profit de l’alliance ‘’Mburok soow’’ entre BBY et le Rewmi d’Idrissa Seck. Qu’en pensez-vous ?
Ecoutez, la politique est tellement sérieuse que moi, je ne fais pas dans l’auto amusement, dans la théâtralisation ou dans la ridiculisation. Ce que je sais, c’est que nous sommes avec Macky Sall comme Tanor nous y a laissé, comme on y a été en 2019 et en 2012. Nous pensons qu’un président de la République ou un régime doit chercher chaque jour à se fortifier, chaque jour à élargir les bases sociologiques et sociales de son action. Maintenant les calculs à la petite semelle comme les débats du bas de la ceinture nous importe peu au Ps. De toutes les façons, tout le monde peut être naïf sauf un militant du Parti socialiste. Nous savons ce que parler veut dire, nous savons aussi ce qu’envisager ou entreprendre veut dire. Le moment venu, devant n’importe quelle situation, le Ps, sachant que ce qui importe en politique c’est la capacité d’adaptation et l’opportunité, prendra ses responsabilités.
Est-ce qu’aujourd’hui les instances du Ps se tiennent régulièrement ?
Les instances du parti se tiennent autant que faire ce peu, en fonction de ce que la covid et le respect des gestes barrières nous imposent de faire.
Mais qu’en est-il de l’animation du parti à la base, au sein même des coordinations ?
Là vous posez une question intéressante. Chaque base a ses réalités. Il faut toujours ne pas oublier la question de l’opportunité. Chaque base a des responsables et des réalités qui font qu’il appartient à ceux qui y sont, de faire ce qui correspond aux possibilités qu’offrent le contexte et la situation. Donc ici et par voie de presse, il ne m’appartient pas d’être un donneur de leçon, ce que je demande à nos camarades, c’est tenant compte de leurs réalités locales et de leurs possibilités, d’animer leurs bases parce que ce qui est le plus important, c’est leurs bases et leurs militants.
Où en êtes-vous avec les renouvellements des instances du parti ?
Je vous l’ai dit, depuis 2019, nous sommes face à une situation exceptionnelle qui touche l’humanité et qui créé une angoisse existentielle, avec son cortège de lot de morts dont nous saluons la mémoire et pour lesquels nous prions. Lorsque les conditions normales de température et de pression seront réunies, nous allons parachever le processus de renouvellement que nous avons entamé et qui ne sera pas arrêté.
A quand le prochain congrès ?
Lorsque nous aurons fini les prérequis, on tiendra le congrès.
Avant sa disparition, Ousmane Tanor Dieng avait appelé l’ensemble des socialistes à l’unité. Peut-on aujourd’hui s’attendre à des retrouvailles de la grande famille socialiste ?
C’est plus que jamais d’actualité. Mais ça ne se proclame pas, ça se construit petit à petit. Le Sénégal est un pays de dialogue et nous avons tous des endroits où on se retrouve à partir desquels on peut amoindrir les divergences. Nous y sommes.
Peut-on s’attendre à un retour de Khalifa Sall et Cie ?
La réunification de la famille socialiste dépasse les identités remarquables. Ça concerne tous ceux qui, de Senghor et Lamine Guéye à Ousmane Tanor Dieng, à Aminata Mbengue Ndiaye, ont appartenu par leurs familles, par leurs parents, ou bien ont séjourné ou vécu dans le Ps, qui sont sortis ou fait autre chose, la vie est faite de séparation et de retrouvailles. Nous travaillons à ce que tout le monde soit à nouveau ici aujourd’hui ou demain, peu importe le moment. Nous souhaitons que tout le monde se retrouve à nouveau dans la grande famille socialiste et ça ne se limite pas seulement à ceux qui sont issus de la roche mère, ça concerne également nos amis et nos camarades de la gauche.
Entretien réalisé par Assane MBAYE