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VAGUE DE DEFIANCE A L’APR : Macky fragilisé par les siens

La parole de Macky Sall ne lie plus certains responsables de l’Apr. Et ils l’ont bien fait comprendre, à travers des déclarations au vitriol contre sa volonté d’imposer ses listes et ses candidats aux élections locales. Du côté des alliés, on s’étonne que les responsables de l’Apr qui devaient donner l’exemple au sein de la coalition, soient ceux qui enfreignent, en premier, la discipline. 

A Kaffrine, lors de sa tournée économique, Macky Sall avait demandé aux responsables de son parti et de la coalition présidentielle, de s’unir pour qu’il n’y ait aucunement, de listes en dehors de celles de la coalition Benno Bokk Yakaar. Des propos que le chef de l’Apr avait affirmé avec force, demandant que les responsables et militants du parti et de la coalition, lui fassent confiance pour les choix des candidats pour les élections locales. ‘’Je tiens à préciser, à l’endroit des responsables de mon parti, que nos investitures se feront dans le cadre de Benno bokk yakaar. Il faudrait que tout le monde sache qu’il ne saurait être question de faire autrement. Certains pourraient être tentés par l’idée de se mettre en rébellion pour aller chercher un récépissé d’un parti quelconque pour se faire investir. Mais il faut que ce soit clair, cela ne saurait être acceptable’’, prévenait Macky Sall. 

Adama Faye, le coup-ko que personne n’attendait

Mais apparemment, son appel est tombé dans l‘oreille de sourds dans beaucoup de localités. Et les coups les plus douloureux reçus par Macky Sall sont venus d’où on s’y attendait le moins ; son beau-frère Adama Faye, responsables Apr à Grand Yoff. Ce dernier a tout bonnement jeté à la poubelle l’injonction du patron de l’Apr et de BBY. ‘’Monsieur le Président, grande fut ma peine de vous entendre demander à vos partenaires politiques de la coalition Benno Bokk Yakaar et à vos frères et sœurs du parti Apr de vous écouter et d’attendre vos décisions dans les différentes localités pour les élections locales de janvier 2022. Attention ! Non seulement trop de pouvoir tue le pouvoir, mais aussi le vôtre est temporaire’’, a martelé d’emblée, Adama Faye. Qui en rajoute : ‘’Votre liberté est celle de celui qui pense autrement. (…). Monsieur le Président, attendez-vous à ce que l’on ne soit pas toujours d’accord avec vous et ce, en toute liberté’’. Poursuivant, il assène : ‘’Votre excès de pouvoir et votre comportement de dictateur ou de monarque inquiètent plus d’un’’. Et de finir par défier ouvertement Macky Sall. ‘’Moi, Adama Faye, membre fondateur du parti Apr, je déclare ma candidature aux prochaines locales de janvier 2022 dans ma commune, Grand-Yoff. Il va sans dire que si je ne bénéficie pas de l’accord de mon parti ou plutôt, je dirais de votre décision, je présenterai si Dieu le veut, une liste parallèle et concurrente, quel que soit le mode de scrutin choisi, in fine, ma liberté aura été affirmée jusqu’au bout. Advienne que pourra’’, clame-t-il. 

Des responsables à la quête d’assise politique et qui jouent leur avenir politique avec les locales

Avant Adama Faye, c’est Mary Teuw Niane qui vise la mairie de Saint-Louis, qui avait rejeté la «fatwa » de Macky Sall. ‘’Ma conviction est que les élections locales appartiennent aux populations. Donc le choix du maire de Saint Louis est du ressort des Saint-Louisiennes et des Saint-Louisiens. Ça ne relève pas du président de la République à mon niveau’’, a martelé l’ancien ministre de l’Enseignement supérieur et actuel PCA de Petrosen. Et la liste des «rebelles» va sans doute s’allonger. A Guédiawaye, c’est parti pour une défiance ouverte de Boughazelly qui veut la place du maire Aliou Sall. Cela, en précisant qu’il est «fils de Guédiawaye». Une manière de dire qu’Aliou Sall ne l’est pas. Toujours à Guédiawaye, dans la commune de Golf-Sud, Lat Diop, Directeur général de la Lonase, a ouvertement proclamé sa volonté de prendre la mairie des mains d’Aïda Sow Diawara, responsable de premier plan du PS, l’un des deux plus grands et anciens alliés de Macky Sall. Idem à Kaffrine où le responsable du parti présidentiel, Abdoulaye Sow s’est déjà positionné pour la mairie dirigée par Abdoulaye Wilane, membre influent du PS. Le Ps qui ne va sans doute regarder leurs alliés leur prendre toutes leurs communes. A la Sicap-Liberté, la ministre Zayra Iyane Thiam vise la mairie qui est entre les mains d’un responsable d’un autre grand parti allié, Santi Agne de l’AFP. Or récemment, on a entendu le Pr Maouloud Diakhaté affirmé que son parti tient à garder la dizaine de mairies qu’il gère déjà. En effet, il est évident que même s’ils ne protestent pas trop, les alliés ne vont pas tolérer un certain niveau de gourmandise des responsables Apr, qui veulent tout prendre. 

Malgré sa fermeté affichée sur le sujet, Macky Sall risque de pédaler dans le néant, en voulant étouffer les ambitions locales de certains de ses camarades. La désobéissance sera d’autant plus large que ses partisans et alliés vont jouer à travers les prochaines locales, leur avenir politique, dans la perspective de son départ des affaires, après deux mandats. En effet, beaucoup de responsables politiques de son parti et de la mouvance présidentielle ont intérêt à se forger une assise locale, s’ils veulent survivre à Macky Sall qui les a «faits» politiquement, sans que leur notoriété ne soit légitimée par une base politique. 

Macky rattrapé par ses déclarations antérieures qui légitimaient les listes parallèles 

En outre, c’est le chef de l’Etat lui-même qui a armé la «rébellion» dans ses rangs par ses propos antérieurs. Et effet, lors des dernières locales, il avait béni les listes parallèles, expliquant cela par le caractère particulier de ces joutes électorales. ‘’Pour les locales, nous avions pris la décision de laisser les gens s’ils n’étaient pas d’accord, de présenter leur liste. C’est parce que les enjeux étaient locaux. Il ne faut pas confondre les enjeux des législatives à ceux des locales», avait-il déclaré en avril 2017, dans une rencontre avec les responsables de sa coalition en perspective des législatives de 2019. Alors pourquoi changer aujourd’hui de posture, alors que rien n’a changé ? Les enjeux de ces élections restant toujours locaux. A moins que le président ne fourbit ses armes pour d’autres échéances, les législatives et surtout la présidentielle de 2024. Pour cela, il a besoin sans doute de renouveler son personnel politique, de placer ses hommes qui lui jurent loyauté et fidélité partout à la base, afin qu’ils puissent enclencher la nouvelle dynamique dont il a besoin pour se projeter?

L’info