Présidentielle 2024 : Les exigences du Forum civil à l’Etat du Sénégal
Le Bureau Exécutif du Forum Civil s’est hautement préoccupé de l’état des droits et des libertés publiques, la situation sociale et la gestion du processus électoral au Sénégal. Dans un communiqué rendu public, le forum civil rappelle plusieurs exigences à l’Etat du Sénégal, notamment la nomination d’une autorité non partisane pour l’organisation de la présidentielle de 2024. Ils appellent également les acteurs des médias à plus de responsabilité dans le traitement de l’information.
Le communiqué
Le Forum Civil constate : – le recul inquiétant dans l’exercice des libertés publiques collectives notamment de réunion et de manifestation ; – le recul récurrent dans l’exercice des libertés publiques individuelles relativement à l’accès à l’information et à l’expression des opinions ; – la perte avec regret de vies humaines dans le recours à la police administrative du maintien et du rétablissement de l’ordre public ; – l’absence ou les lenteurs des enquêtes portant sur les infractions attentatoires à la vie humaine enregistrées à l’occasion de manifestations ; – le recours quasi systématique pour l’emprisonnement notamment d’acteurs politiques, de leaders d’opinion, de citoyens et surtout des journalistes ; – la violation par certains professionnels des médias des règles régissant leur profession ; – le maintien en fonction de membres de la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) à l’expiration de la durée de leur mandat ; – la suspension temporaire, répétitive et fort préjudiciable des données mobiles, de certaines plateformes numériques et d’organes de presse ; – le grand désarroi de la jeunesse et sa perméabilité à des pratiques préjudiciables à sa sécurité et à son avenir notamment aux jeux de hasard électroniques ; – l’augmentation continue des prix de première consommation et des dépenses scolaires ; – la difficile gestion des attentes des communautés par rapport aux retombées du secteur extractif ; – la forte précarité dans le monde rural (zones frontalières comme celles de l’intérieur du pays) victime du mode de gestion du Ministère chargé de l’Agriculture ; – la mal gouvernance en matière de lutte contre la corruption, de redevabilité dans le recouvrement des impôts, de gestion des contrats publics (marchés publics, contrat de partenariat), de gestion de la dette (absence de publication de conventions de financement).
Le Forum Civil,
Considérant :
– les restrictions et agressions continues sur la liberté de manifestation et même parfois de réunion avec les interdictions répétitives des manifestations déclarées et même parfois de conférences de presse par les autorités administratives ;
– les germes de tensions préélectorales, électorales et postélectorales ;
– l’entrave à la liberté de presse et les arrestations suivies parfois d’emprisonnement de professionnels des médias ;
– la violation par certains professionnels des média de règles régissant leur profession ;
– l’absence d’enquêtes ou le non aboutissement d’enquêtes à la suite des morts enregistrées à l’occasion de manifestations ;
– la nécessaire autonomisation de la Police nationale, notamment en matière budgétaire ;
– l’accentuation de la mal gouvernance en matière de lutte contre la corruption, de mobilisation des ressources, de la masse salariale et de gestion des contrats publics (marchés publics, contrats de partenariat public privé, contrat d’emprunts etc.)
Exhorte l’Etat :
– à respecter et à se conformer à l’état de droit en garantissant l’exercice des libertés publiques collectives et individuelles, notamment celles de réunion et de manifestation ;
– à garantir la transparence et l’intégrité du processus électoral, notamment en confiant l’organisation de l’élection présidentielle du 25 février 2024 à une autorité non partisane ;
– à mener toutes les enquêtes et à prendre les sanctions à l’encontre des personnes responsables de tout bord ;
– à garantir à la police nationale, à l’image de la gendarmerie et de l’armée nationales, une autonomie budgétaire et de gestion ;
– à inclure dans les réformes urgentes la mise en place de juges des libertés ;
– à prendre la juste mesure de la grande désespérance de la jeunesse de voir ses rêves d’avenir fleurir au Sénégal ;
– à veiller de très près sur les pratiques et les messages des sociétés de jeux, notamment électroniques, à l’endroit des jeunes ;
– à accentuer ses actions de lutte contre l’émigration irrégulière par des politiques structurelles ;
– à rendre immédiatement opérationnels tous les fonds et mécanismes prévus dans le secteur extractif destinés à satisfaire les attentes des communautés ;
– à renforcer la lutte contre la corruption par l’adoption des textes relatifs à la déclaration de patrimoine, à l’organisation et au fonctionnement de l’OFNAC, à l’accès à l’information, par la mise en fonction du Pool Judicaire Financier, par la réforme de la gouvernance de l’administration fiscale, par la réforme de la justice et du système de choix de nos élus à l’Assemblée nationale.
Appelle :
– le Président de la République à faire respecter ses instructions faites au Premier ministre relativement à la prise en charge des préoccupations des communautés dans les zones minières, à accorder une attention particulière à la gestion du Ministère de l’Agriculture mais, aussi à veiller, en tant que Chef d’Etat dans le strict respect de la réglementation, à une bonne organisation de l’élection présidentielle ;
– les acteurs politiques de tout bord et de la société civile à faire preuve de responsabilité dans leur déclaration pour éviter d’exposer davantage notre pays, dans un contexte de tension et d’insécurité au niveau de la sous-région ;
– les professionnels des médias à veiller au respect des principes sacrosaints qui les gouvernent, notamment les principes de responsabilité, d’indépendance, d’impartialité et d’objectivité ;
– les autorités en charge de l’organisation et de la supervision de l’élection présidentielle à l’impartialité, au professionnalisme et à la neutralité dans tout le processus électoral ;
– les Ministres en charge du Commerce et de l’Education à se concentrer sur le travail de lutte contre l’inflation dans leurs secteurs respectifs ;
– les Ministères chargés de l’intérieur et de l’Education à prendre toutes mesures visant à protéger les jeunes contre les jeux de hasard électroniques qui sont en train d’intoxiquer notre jeunesse et d’inquiéter davantage les parents.
Dakar, le 05 octobre 2023.