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ALIOUNE NDOYE: «Nous devons faire de la candidature du président Macky Sall une exigence»

«Ousmane Sonko ne devrait s’en prendre qu’à lui-même si jamais il n’arrive pas à se faire disculper des chefs d’accusation qui pèsent sur lui», suite à des actes qu’il a posé de son plein grè contre d’autres citoyens comme lui. C’est la conviction d’Alioune Ndoye, qui, dans cette interview accordée à L’INFO, est revenu également sur la question du 3e mandat. Et c’est pour affirmer que qu’au moment où les forces les plus obscures voudraient mettre ce pays dans le chaos, la mouvance présidentielle «doit faire de la candidature du Président Macky Sall une exigence au nom des intérêts supérieurs de la nation». Car, pour, le ministre de l’environnement et maire socialiste de Dakar Plateau, «quand le bateau doit aborder une grosse tempête, le capitaine le plus aguerri ne peut se permettre de quitter la barre, juste pour une cosmétique moralisatrice au moment où le droit est pour lui». En outre, le responsable socialiste soutient qu’il n’est aujourd’hui nullement question, pour le PS, de quitter la Coalition BBY, où il n’a aucune raison de ne pas être satisfait. Alioune Ndoye est aussi revenu sur sa récente lettre adressée au maitre de Dakar pour dénoncer des actes de gestions et réclamer des comptes, en dénonçant «une telle fuite en avant» du maire Barthélémy Diaz et son équipe. Aussi soutient-il que sur le dossier Sandaga, le maire de Dakar n’a pas le fond de ce dossier dont il a hérité, «sinon il ne perdrait aucunement son temps dessus». Le maire de Plateau a également évoqué le différend foncier entre son institution avec le Waqf à propos du site de l’école Amadou Assane Ndoye, notant que «c’est une question complexe, très préoccupante », qui le met mal à l’aise.

Monsieur le ministre, l’actualité, c’est cette tension vive entre pouvoir et opposition, notamment entre le pouvoir et Pastef et Yewwi Askan wi. Quel commentaire vous inspire ce contexte ?

S’agissant de l’actualité dont vous parlez, je me demande s’il est possible d’évoquer une tension quelconque entre le pouvoir et cette opposition réunie autour de PASTEF et de YEWWI ASKAN WI. Il ne s’agit ni plus ni moins que d’une affaire purement privée, entre deux citoyens sénégalais dont l’un s’est senti diffamé par l’autre et a entendu user de son droit le plus absolu d’ester en justice, pour faire constater son préjudice et demander, le cas échéant, qu’il soit réparé. Cela aurait pu être très simple pour l’autre partie d’assumer pleinement ses propos et de se rendre, paisiblement, en toute responsabilité, devant le juge pour se disculper en brandissant les preuves qu’elle a toujours soutenu détenir. Malheureusement dans cette affaire comme dans l’autre qui oppose la même personne à une autre citoyenne sénégalaise qui l’accuse de viol, l’intéressé ne pense devoir son salut qu’en essayant d’installer le chaos dans le pays, en incitant ses partisans, qu’il parvient à manipuler, à mener, pour son compte exclusif, un combat de rue, quasi insurrectionnel, mais perdu d’avance. Et c’est là que je voudrais rendre hommage à nos valeureuses forces de défense et de sécurité qui font face à cette situation avec une remarquable sérénité, un tact et un professionnalisme sans commune mesure.  Elles s’acquittent très convenablement de leurs missions de prévention de tout risque de troubles mais aussi de rétablissement, avec des techniques et moyens appropriés, de l’ordre qui aura été malgré tout, troublé. Il est normal et largement justifié, qu’à la suite de ces actes de défiance et de vandalisme qui leur ont imposés d’agir et d’user de leurs prérogatives d’utiliser la force légale pour rétablir l’ordre, qu’elles traquent, arrêtent et remettent à la disposition de la justice toutes personnes ayant, de quelque nature que ce soit, participé, comme auteur, incitateur, facilitateur, complice etc… à l’exécution de ces actes fort répréhensibles, que tout le monde doit condamner.

Pastef et Yewwi askan wi, ainsi que d’autres compatriotes pensent que le pouvoir veut se servir des dossiers judiciaires d’Ousmane Sonko pour l’écarter de la présidentielle et rouler en roue libre en 2024, puisque qu’il est l’opposant le plus représentatif. N’ont-ils pas raison ? Si oui ou non, pourquoi ?

Il est clair et évident qu’ils n’ont absolument pas raison. Ousmane SONKO est un justiciable comme tout citoyen de ce pays qui doit obligatoirement répondre de ses actes vis-à-vis notamment des tiers, comme le font, tous les jours, devant les tribunaux, les justiciables. Les partisans, souteneurs, sympathisants d’Ousmane SONKO savent mieux que quiconque que : si ce dernier ne s’était pas rendu, seul, nuitamment, en plein de couvre-feu, à SWEET BEAUTY, avec des motifs aussi légers, pour y rencontrer cette jeune fille qui l’accuse, aujourd’hui, de viol ; s’il n’avait pas tenu des propos jugés diffamatoires à l’encontre d’un de ses concitoyens ; Certainement qu’il ne serait pas dans cette posture indélicate pour lui aujourd’hui. Je ne souhaite pas m’épancher outre mesure sur des affaires toujours pendantes, mais je pense, honnêtement, qu’il ne devrait s’en prendre qu’à lui-même si jamais il n’arrive pas à se faire disculper des chefs d’accusation qui pèsent sur lui. Sous d’autres cieux où deux députés ayant oublié de quel bistrot ils sont tombés s’autorisent à juger nos institutions et ont même le toupet de dire ce que doit être la décision de ces dernières, on se souvient que les candidats qui étaient présentés comme les plus aptes à remporter les élections présidentielles, ont été contraints à renoncer à leur rêve à cause de faits similaires voire beaucoup moins graves, à savoir l’accusation d’une technicienne de surface d’hôtel de tentative de viol, et non de viols répétés, ou de don de quelques costumes. Je penserais, alors, simplement à ces deux principes : « Dura lex, Sed lex », et « Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ». Il s’y ajoute également que le pouvoir exécutif que nous incarnons à travers le Gouvernement, sous la coordination du Premier Ministre et l’autorité du Chef de l’Etat, ne peut et n’a absolument pas besoin d’écarter qui que ce soit pour remporter des joutes électorales. Notre unité et notre bilan sont, à cet effet, nos premiers atouts. Malgré une relative percée de l’opposition, notre coalition demeure toujours largement majoritaire dans ce pays. 

La présidentielle approche, et la question du 3e mandat de Macky Sall se pose de plus en plus. Quelle est votre position sur cette question ? Etes-vous prêt à accompagner Macky Sall pour une 3e candidature ?

L’opposition a commencé à agiter cette question dès le lendemain de sa défaite à l’élection présidentielle de 2019. Elle en a fait, par la suite, son seul programme qu’elle a cherché à imposer comme débat public dans le dessein inavoué mais, malheureusement pour elle, nettement perceptible, de cacher sa carence notoire pour proposer aux Sénégalais un discours conséquent basé sur des idées de programme. Personnellement, comme j’ai eu à le dire antérieurement, si le Président Macky SALL se présente pour la prochaine élection présidentielle, c’est parce qu’il aura été investi par notre coalition et par conséquent je soutiendrai naturellement sa candidature. A-t-il, juridiquement, la possibilité de le faire ? J’estime que oui, car cette question a été tranchée de façon très claire par le Conseil Constitutionnel par sa décision n° 1-C-2016 du 12 février 2016. Et les vrais Hommes de droit de ce pays, devraient expliciter que le contenu de la saisine du Président de la République démontrait à suffisance la profonde conviction qui était la sienne, le poussant même à introduire une disposition transitoire dans sa proposition. Mais que cette décision sus évoquée de la seule instance habilitée, a enlevé toute base juridique à cette conviction généreuse du Président de la République, exprimée alors qu’il ne pouvait deviner ce contexte lourd de dangers pour notre jeune nation qui allait survenir, assombri par la pandémie de la covid et une situation géopolitique mondiale des plus instables. Tenant compte de ce tournant extrêmement délicat que notre pays n’a pas le droit de rater, au moment même où nos importantes ressources naturelles devraient aider à conforter ce formidable travail déjà fait pour notre émergence, au moment où les forces les plus obscures voudraient mettre ce pays dans le chaos afin d’obtenir contre la volonté du peuple ce que le marché et nos dispositions légales et règlementaires ne leur ont pas donné, nous devrions faire de la candidature du Président Macky Sall une exigence au nom des intérêts supérieurs de la nation sénégalaise. Quand le bateau doit aborder une grosse tempête, le capitaine le plus aguerri ne peut se permettre de quitter la barre, juste pour une cosmétique moralisatrice au moment où le droit est pour lui. Donc juridiquement, le Président de la République, gardien de la constitution ne peut retenir une option jugée anticonstitutionnelle. Et il ne peut et ne doit tourner le dos à son peuple au nom d’une morale aujourd’hui brandie par les adeptes du chaos, si tant est que cette dernière demeure une théorie de l’action humaine soumise au devoir et ayant pour but le bien. Le bien du Sénégal est de ne pas briser prématurément cette rampe de l’émergence en construction, et de ne surtout pas engager le pays dans une aventure conduisant à une instabilité certaine.

Au niveau du PS, des voix s’élèvent souvent pour réclamer une rupture avec BBY. Etes-vous pour ou contre un départ de la mouvance présidentielle ? A quelles conditions, le PS resterait dans BBY ou la quitterait ?

Le Parti socialiste a toujours prôné, en son sein, un débat libre et démocratique. Et comme dans toute association de cette envergure les positions individuelles peuvent parfois différer. C’est la marche normale des choses dans une structure pareille. Mais comme nous sommes également bien structurés et très bien organisés, les décisions ne se prennent qu’au sein de nos instances habilitées. Il n’est pour l’heure, nullement question, pour le PS, de quitter la Coalition BBY que nous avons mis en place avec d’autres formations politiques et avec qui nous avons gagné toutes les élections depuis 2012. Nous pensons que le maintien d’une coalition aussi large que forte est un de nos plus grands atouts de succès pour toutes les élections qui se profilent à l’horizon. Nous devons, au contraire, continuer à la rendre plus forte et plus attrayante.

Est-ce qu’aujourd’hui, le parti socialiste est satisfait de son compagnonnage avec Macky Sall ?

Nous n’avons aucune raison de ne pas être satisfaits de notre compagnonnage avec le Président Macky SALL qui est le leader de notre coalition. C’est pourquoi nous cheminons ensemble depuis l’avènement de l’alternance. Maintenant les choses sont perfectibles, car il est extrêmement difficile de gérer un ensemble aussi grand.

Récemment, on a vu Khalifa Sall faire un clin d’œil à la gauche dans d’éventuelles grandes retrouvailles. Etes-vous intéressés par de telles retrouvailles ?

Nous sommes déjà dans une coalition avec des formations politiques avec qui nous avons une convergence de vue sur la manière de gouverner et de servir les populations et nous entendons consolider cet acquis unitaire. Nous combattons toute stratégie tendant à affaiblir le parti socialiste et sa coalition.

Est-il possible aujourd’hui que vous vous retrouviez avec vos anciens camarades qui constituent aujourd’hui Taxawu Sénégal ? Le fossé entre vous n’est-il pas déjà trop profond pour pouvoir le combler ?

Personnellement, je suis au PS et j’y reste, et je n’ai jamais milité dans un autre parti. Tout camarade avec qui j’ai partagé une aventure politique, cela s’est fait dans le cadre de ce parti et en respect de ses orientations. Le Ps est un parti de masse et donc ne fermera jamais ses portes au sénégalais qui, quelques soient leurs convictions antérieures, ont décidé de rejoindre ses rangs en acceptant ses règles de fonctionnement, son mode de gestion, son idéal recherché etc…

Quelles sont les ambitions politiques personnelles d’Alioune Ndoye ? Ambitionnez-vous par exemple de diriger un jour le parti socialiste ?

J’avais rejoint le parti socialiste au moment où il faisait face à beaucoup de défections consécutivement à la perte du pouvoir. Investi de la confiance de mes pairs, j’y ai gravi plusieurs échelons jusqu’aux responsabilités que j’y exerce présentement. Les populations de Dakar-Plateau m’ont, également, choisi comme leur maire depuis 2009 et m’ont toujours renouvelé leur confiance, ce qui m’a permis d’être à mon troisième mandat à la tête de la municipalité. Je ne peux avoir, dès lors, d’ambitions politiques, qu’à la hauteur de la confiance que je pourrais, à chaque fois, recevoir, de mes concitoyens et de mes camarades de parti, pour relever les défis qui nous interpellent. 

Il y a quelques semaines, vous aviez écrit au conseil municipal de Dakar pour réclamer la lumière sur certains aspects liés au budget. Qu’en est-il aujourd’hui ?

En ma qualité de conseiller de ville j’ai naturellement un droit de regard sur ce qui s’y fait et le devoir absolu d’interpeller l’organe exécutif sur toutes questions intéressant la vie de la collectivité, tant dans sa gestion que dans l’exercice des compétences dévolues, par le Code général, aux différents organes. J’ai également le devoir d’alerter les autorités administratives compétentes et l’opinion publique sur les manquements graves imputables au maire de ville. J’ai simplement entendu jouir pleinement de mes prérogatives en saisissant le maire pour lui faire part de sérieux griefs possibles dans sa gestion et lui demander des éclaircissements. J’avoue sincèrement que même si je pouvais légitimement douter des aptitudes techniques du maire et de ses collaborateurs pour apporter, à mes interpellations, des réponses convenables, je ne pouvais tout de même pas, imaginer une telle fuite en avant. Et comme à leur accoutumée ils se sont juste contentés de verser dans le dilatoire et la digression pour cacher leur malaise devant les préoccupations formulées. Mais ces interpellations restent un faisceau de lumière pointé sur ces axes de surveillance pour la reddition inévitable des comptes.  

Il y a le dossier du marché Sandaga qui vous oppose en tant que maire de Plateau à votre collègue de la ville de Dakar. Où en est aujourd’hui ce dossier ? Etes-vous optimiste quant à l’issue de ce différend ?

Ce dossier suit son cours normal et nous avons d’excellentes raisons d’être optimistes parce que simplement nous avons le droit de notre côté. Je pense que le maire Diaz n’a pas le fond de ce dossier qu’il a hérité, sinon il ne perdrait aucunement son temps dessus, et verrait même comment y apporter une touche positive de la Ville.Le plus important est que les travaux tant attendus par les acteurs du commerce, les populations de Dakar-Plateau, et même les Sénégalais dans leur ensemble, se poursuivent pour réaliser ce bijou que nous avons conçu dans le strict respect des exigences architecturales liées à la nature de l’infrastructure.

Il y a aussi le litige avec le Waqf relatif au bâtiment qui doit être érigé sur le site de l’école Amadou Assane Ndoye. Qu’en est-il de cette affaire ?

Un litige foncier oppose aujourd’hui les populations du Plateau au WAQF qui souhaite disposer de l’assiette foncière qui abritait une école de la commune. C’est une question complexe, très préoccupante, et qui dans une certaine mesure me met très mal à l’aise. Je suis maire d’une commune dans laquelle le foncier est un enjeu de taille, certainement un peu plus qu’ailleurs. Nous faisons face à d’énormes difficultés pour disposer des assiettes foncières devant nous permettre de mettre en œuvre les nombreux projets que nous avons. Et nos populations demeurent de plus en plus extrêmement exigeantes dans l’utilisation faite du peu d’espace susceptible de bénéficier à la commune. Nous comprenons dès lors, très aisément, ces aspirations légitimes et avons toujours œuvré dans le sens de les préserver. C’est pourquoi nous avons juste entendu jouer pleinement notre rôle de mandataire pour nous faire l’écho de nos populations et du conseil municipal afin d’appeler l’attention des autorités étatiques sur la nécessité, dans le traitement de ce dossier, de rendre saufs les intérêts de notre commune. Nous n’avons absolument rien contre le WAQF, et il est également inutile de rappeler tous les projets d’envergure que la Mairie, sous mon magistère, a initié au bénéfice des communautés religieuses musulmanes avec, notamment, notre ambitieux programme de rénovation des lieux de cultes, à l’image de ce que le Chef de l’Etat fait dans toutes les cités religieuses du pays.  Il ne nous est nullement possible, dès lors, de nous opposer à une quelconque initiative de modernisation des Daaras, au moment où nous en avons construit et modernisé, encore que nous doutons sérieusement que ce soit la véritable raison d’être du projet de construction de ce bâtiment de 16 étages. Le maire que je suis s’est engagé auprès des populations de veiller à la mise en oeuvre des propositions présentées au Chef de l’Etat, en échange de leur engagement à ne mener aucune action de contestation suite à leur premier sit-in. Quoi qu’il en soit nous espérons pouvoir très rapidement trouver la solution à ce litige avec l’aide de l’Etat.

Entretien réalisé par Mbaye THIANDOUM