L’opposition donne de la voix au Sénégal
« Des manifs à Mbacke, Saint-Louis, Ziguinchor, Bignona, Podor, Thiès, ou encore Dakar : le Sénégal au rythme de Yewwi », s’exclame WalfQuotidien en première page. La coalition de l’opposition Yewwi Askan Wi dénonce ce qu’elle qualifie « d’instrumentalisation de la justice » et a lancé mercredi 15 mars une série de mobilisations, alors que le procès pour diffamation de l’opposant Ousmane Sonko doit s’ouvrir ce jeudi.
« La capitale s’embrase », constate encore WalfQuotidien. « Contrairement aux autres départements où les manifestants ont dénoncé dans le calme les dérives du régime, Dakar a été le théâtre de violents affrontements. »
« Les forces de l’ordre ont tiré des grenades lacrymogènes sur le maire de la ville et sur des députés qui tentaient de se rendre chez Ousmane Sonko, bloqué chez lui par les policiers dans un contexte de tensions politiques croissantes », relève le site d’information Seneplus.
« Le calme est revenu en début de soirée », mais « la journée d’aujourd’hui risque d’être plus chaude, pointe WalfQuotidien, avec l’audience de Sonko au tribunal. »
Sonko joue son avenir politique
En effet, précise Le Monde Afrique, « ce 16 mars, le candidat à la présidentielle de 2024 joue son avenir politique. Il est attendu devant le tribunal correctionnel de Dakar dans un procès pour diffamation intenté par Mame Mbaye Niang, le ministre du Tourisme, qu’il a accusé de détournement de fonds. L’audience s’est ouverte une première fois il y a un mois avant d’être reportée. Déjà, Dakar avait été le théâtre d’une forte mobilisation et d’une vive tension. L’opposant avait été ramené chez lui par des policiers qui avaient brisé la vitre de sa voiture, une scène diffusée en direct sur les réseaux sociaux. »
Finalement, commente Le Monde Afrique, « du pouvoir du président Macky Sall ou de l’opposant Ousmane Sonko, on ne sait qui avait le plus de craintes ces dernières heures à Dakar. (…) Les deux camps sont à cran. Chacun se prépare à débuter un face-à-face décisif en vue de la présidentielle prévue dans moins d’un an, le 25 février 2024. »
D’autant qu’une « autre affaire pèse sur Ousmane Sonko, rappelle Le Monde Afrique. Il est accusé de ‘viols et menaces de mort’ par Adji Sarr, l’employée du salon de massage Sweet Beauty qu’il avait l’habitude de fréquenter pour ses maux de dos. S’il est condamné à plus de trois mois d’emprisonnement ferme ou à plus de six mois avec sursis dans l’un de ces dossiers, le code électoral prévoit l’inéligibilité. Ousmane Sonko sera alors définitivement écarté de la course à la présidentielle. »
« Un TNT socio-politique » ?
« Que nous réserve la journée d’aujourd’hui à Dakar ? », s’inquiète L’Observateur Paalga au Burkina Faso. « Comme toutes les fois où Ousmane Sonko et les autres ténors de l’opposition sont convoqués par la justice sénégalaise, la rue s’en mêle et ça dégénère en actes de violence. (…) D’un côté donc, le président en exercice, qu’on accuse de vouloir jouer indûment les prolongations (en le suspectant de vouloir briguer un troisième mandat), et de l’autre, des opposants, notamment Ousmane Sonko, qui pourrait voir ses ambitions hypothéquées si d’aventure, il était condamné. Et c’est tout l’enjeu de cette journée classée rouge à Dakar. »
« Tous les ingrédients d’un TNT sociopolitique sont réunis », renchérit Aujourd’hui, toujours à Ouaga. « Que se passera-t-il aujourd’hui ? », s’interroge le journal. « Sonko ira-t-il tranquillement au Tribunal et retournera-t-il pareillement chez lui ? Ou bien, assistera-t-on à un bis repetita du 16 février dernier ? Sera-t-on épargné des jets de gaz lacrymogènes et des courses poursuites police-manifestants ? Surtout évitera-t-on les évènements malheureux de mars 2021 au cours desquels il y avait eu des émeutes et des morts ? »
Rendre le pays « ingouvernable » ?
En effet, pointe Jeune Afrique, « à moins d’un an de la présidentielle, le spectre des tensions de mars 2021 est ainsi ravivé. À l’époque, la convocation du leader du Pastef dans le cadre de l’affaire Adji Sarr avait déclenché de violentes manifestations. Réprimées par les forces de l’ordre, elles avaient fait quatorze morts et ébranlé le pouvoir du chef de l’État sénégalais. »
Pour sa part, relève encore Jeune Afrique, « dans un récent communiqué, l’APR (Alliance pour la République), le parti présidentiel, a dénoncé une ‘volonté [de l’opposition] de rendre [le] pays ingouvernable, d’attaquer sa stabilité pour créer, au travers d’émeutes organisées et de guérillas coordonnées, une insurrection générale planifiée pouvant mener à une guerre civile’. L’APR qui a aussi invité les militants de la coalition au pouvoir ‘à la mobilisation pour faire face aux tentatives de troubles annoncées qui sont tout simplement, dit-il, inacceptables’. »