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CHRONIQUE DE MAME GOR NGOM : Macky et la longue attente du Pm idéal

POINT DE VUE : A quand la nomination du Pm au Sénégal ? Si plus de quatre mois après l’annonce du retour de la primature, cette question se pose toujours, c’est que le président de la République, montre une indécision manifestement causée par une série d’événements qui ont suivi cette volonté affichée depuis le 24 novembre 2021 en Conseil des ministres et l’adoption par l’Assemblée nationale le 10 décembre dernier du projet de loi rétablissant la fonction de Premier ministre. Les choses étaient si linéaires pour le gouvernement qui, dans un communiqué, expliquait que « cette restauration, qui vient ainsi adapter l’organisation du pouvoir exécutif à un nouvel environnement économique et sociopolitique, s’accompagne d’une nécessaire requalification des rapports entre l’exécutif et le législatif, notamment la réintroduction de la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale et le pouvoir de dissolution de celle-ci, dévolu au Président de la République ».

Sall  justifiait cette nouvelle approche par une lourdeur de sa charge de président de l’Union africaine entamée en janvier 2022. Aujourd’hui, il se précipite lentement et s’occupe du Sénégal « au quotidien ». Malgré ses nouvelles « activités africaines », il est sur le terrain et exploite la moindre occasion pour en faire un « gain politique ». La victoire des Lions à la coupe d’Afrique des nations a été ainsi un grand moment pour lui, de « renouer avec le peuple ». L’autre victoire du camp du pouvoir aux élections locales du 23 janvier 2022, n’a pas été accueillie avec beaucoup d’enthousiasme. Une attitude qui s’explique aisément par la défaite de la coalition Benno Bokk Yakaar notamment à Dakar, Thiés, Ziguinchor, Kaolack, villes stratégiques, bastions électoraux qui donnent des indications claires sur la direction des Sénégalais. Le vrai triomphe des Lions est dés lors une aubaine pour un président si seul face à un peuple, sa frange jeune particulièrement qui a eu à le défier en févier-mars 2021 avec l’affaire Sonko-Adji Sarr.  Un désamour marqué par des manifestations violentes et massives avec leurs lots de dégâts. 13 morts et de nombreux blessés. Même si Sall, après un long silence, avait fini par affirmer qu’il avait compris le message en annonçant des mesures pour faire face aux demandes pressantes en emplois, les choses n’ont pas beaucoup évolué. La colère dans les rues en 2021 s’est, en toute vraisemblance muée en colère dans les urnes en janvier 2022, du moins dans des parties symboliques et stratégiques du Sénégal. 

Un blason à redorer…

Le défi de Macky Sall est sans doute d’effacer ces images fatales à son image. Pourquoi pas donc ne pas surfer sur la popularité des Lions, la joie du peuple, la belle harmonie et la parfaite entente pour redorer un blason terni par une conjoncture accentuée par la gestion approximative de la crise de la Covid-19. L’inauguration du stade du Sénégal baptisé adroitement « Stade Abdoulaye Wade », n’a été dés lors que le prolongement de la belle ambiance inhérente au sacre historique et retentissant au Cameroun. Subtilement, Sall a mis presque tout le monde d’accord sur sa posture liée à ce triomphe au point que l’opposition même la plus radicale a été obligée de répondre à l’appel de la nation lancé et s’est retrouvée à l’accueil des Lions à l’aéroport militaire Léopold Sédar Senghor et au Palais. Même Ousmane Sonko, la tête de gondole de la coalition Yewwi Askan wi a adressé un « message de félicitations au président de la République ». Ce contexte plaide en faveur de M. Sall qui « prend son temps » pour désigner un Premier ministre qui serait synonyme de formation d’un nouveau gouvernement avec des changements attendus à la tête de certains départements.  Il semble être dans un dilemme. Car, une désignation d’une quelconque personnalité pourrait donner une visibilité à ses intentions en vue de la présidentielle de 2024 lui, qui cache son jeu, maintient le flou avec un « ni oui ni non » sur la troisième candidature à laquelle il n’a pas droit. En principe, pour reprendre le mot d’Ismaïla Madior Fall, son ancien ministre de la Justice. 

Le Chef de l’État qui disait avoir «  en tête » le nom de son futur Premier ministre a-t-il changé de fusil d’épaule entre temps avec la tournure des choses ? Amadou Bâ qui a été beaucoup cité est-il toujours sur la short list ? La défaite du camp du pouvoir aux Parcelles Assainies est-elle aussi la sienne même s’il a été écarté au profit du nouveau venu Moussa Sy maire sortant et  candidat malheureux ? Certains prêtent à Ba désigné coordinateur de la coalition au pouvoir, des ambitions présidentielles quand l’heure du départ aura sonné pour l’actuel élu. Des noms comme celui d’Amadou Hott sortent du lot. Mais le ministre de l’Économie du Plan et de la Coopération internationale battu à plate couture chez lui à Yeumbeul lors des locales, est-il légitime pour diriger un gouvernement ? Une question valable pour Abdoulaye Diouf Sarr et pour toutes ces personnalités de l’Alliance pour la République (Apr) qui avaient des prétentions légitimes avant d’être confrontées aux dures réalités des urnes. Macky Sall cherche, en toute logique, un Premier ministre capable de lui apporter de la plus-value aussi bien sur le plan politique que dans la gestion d’un pays aux défis multiples. Une grande équation à moins de cinq mois ď élections législatives qui constituent un autre test avant la mère des combats en 2024. Il aimerait bien avoir un opposant de grande envergure à la Primature pour espérer stopper la dynamique de victoires rendue possible par l’union des forces de ses virulents adversaires.  Il aimerait avoir un homme ou une femme capable « d’habiter » la fonction primatoriale sans lui faire de l’ombre et lui permettrait de dérouler un « agenda caché ». Apparemment, Macky ne parvient pas « à mettre la main » sur cet « oiseau » si rare. C’est la principale raison de l’attente anormalement longue. Jusqu’à quand ?

MAME GOR NGOM