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STATUTS DE PASTEF : Les ‘’pouvoirs exorbitants’’ de Sonko inquiètent

Après leur fusion, Ousmane Sonko et ses 13 nouveaux alliés buttent sur l’écueil des textes et autres statuts devant régir le nouveau parti qu’ils ont mis en place. L’esquisse des statuts que le leader du Pastef newlook leur a fait parvenir, créé d’ores et déjà des grincements de dent. Un éminent membre d’un des plus célèbres mouvements concernés, dans sa réaction à ces propositions à travers un document dont nous avons copie, s’inquiète surtout des ‘’pouvoirs exorbitants’’ attribués au président du parti. Aussi, il souligne une confusion entre idéologie et doctrine. Non sans noter sur la forme que le document est «trop touffu». 

La lune de miel risque de virer à une lune de fuel. Entre Ousmane Sonko et ses 13 nouveaux alliés qui ont décidé de fondre tout récemment leurs partis et autres mouvements dans Pastef, ce n’est pas encore l’entente surtout en ce qui concerne les textes devant régir le nouveau cadre qu’ils ont mis en place récemment en grande pompe : Parti africain du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité. Ce même cadre né sur les cendres de Patriotes du Sénégal pour le travail l’éthique et la fraternité et qui devrait s’ouvrir aux autres partis et mouvements de l’opposition et de la société civile sénégalaise. D’ores et déjà, des grincements de dents se font noter à la suite des propositions de statuts que leur a fait parvenir le leader de ce qui devrait être le Pastef newlook. Sur une copie dudit document dont nous avons possession, un éminent membre d’un célèbre mouvement ayant rallié Pastef s’inquiète des pouvoirs démesurés du président du parti. ‘’Toutes les parties surlignées en bleu révèlent à suffisance le pouvoir exorbitant du président du parti. Cette hypertrophie du pouvoir du président du parti pourrait être assimilée à celle du pouvoir du président de la République que nous ne cessons de dénoncer’’, note-t-il. Se voulant plus précis, il explique : ‘’les plus hautes autorités du parti, souvent parmi les membres les plus déterminants des instances dirigeantes, sont nommés par le président du parti (les vices présidents, le SG, les SG adjoints, les Secrétaires nationaux, les commissaires nationaux), ou bien élus sur proposition du président du parti (les membres de la haute autorité qui est sensée organiser les primaires devant élire le président du parti, les membres de toutes les 5 instances de contrôle )’’. Et ça ne s’arrête pas là. ‘’Le président du parti peut décider de la dissolution d’un mouvement (jeunes, femmes, paysans, enseignants etc…), comme il peut exercer le pouvoir de sanction statutaire à l’égard des adhérents du parti, ou bien trancher tout conflit entres instances du parti’’, ajoute ce nouveau membre dans ses observations sur les statuts. Et de conclure sur ce chapitre, en mettant en garde : ‘’de telles dispositions ne peuvent, en aucun cas, promouvoir et garantir la démocratie interne au sein du parti’’.

Plusieurs articles illustrant les ‘’exorbitants pouvoirs’’ du président de Pastef

Selon l’article 6 des statuts proposés par Ousmane Sonko, pour les ‘’instances de contrôle’’ (La Commission de contrôle des finances (Ccf), Commission de placement des cartes (Cpc), Commission nationale d’investiture (Cni), Haute autorité du parti (Hap)), ‘’leurs membres sont élus par le Conseil national pour un mandat de 6 ans, sur proposition du président du parti’’. Sauf la haute autorité qui est nommée elle, par le Bureau politique, mais toujours sur proposition du président du parti. A l’article 9 des mêmes textes, il est dit, entre autres, que ‘’le président du parti peut exercer le pouvoir de sanction statutaire à l’égard des adhérents du parti (…). Le président peut trancher tout conflit…’’. L’article 11 indique que le Secrétaire général et ses adjoints sont nommés par le président du parti. Idem pour les Secrétaires nationaux. A l’article 14, il est noté que la Commission exécutive est composée de commissaires nationaux élus eux aussi par le président du parti. De même le président du parti a le pouvoir de dissoudre un mouvement, selon l’article 15. 

Une confusion entre doctrine et idéologie

Ce néo-membre de Pastef n’est pas non plus d’accord sur les termes de l’article 5 portant intitulé : «idéologie» et qui stipule : «Pastef-Les patriotes s’attache à promouvoir une doctrine pragmatique». ‘’Qu’entend-on par « doctrine pragmatique » ? Vaut mieux changer le titre de l’article 5’’, propose-t-il. Non sans donner ses arguments : ‘’Promouvoir une doctrine pragmatique ne correspond à aucune idéologie. Le pragmatisme est une doctrine et non une idéologie. Il s’agit plutôt de dire : PASTEF est un parti sans idéologie, mais qui fait du pragmatisme sa doctrine’’.

Ce nouveau patriote a aussi jeté son regard critique sur l’instance de décision suprême du parti, la ‘’Haute autorités du parti’’ (article 6-1). Cette instance est composée de 5 membres dont trois sont du parti et deux autres sont choisis hors du parti ‘’pour leurs compétences juridiques, parmi des personnalités offrant toutes garanties d’indépendances et jouissant de la plus haute considération morale’’. Et le président de la Haute autorité du parti est choisi parmi ces deux membres extérieurs au parti. Et ‘’il a une voix prépondérante en cas de partage’’. Mieux, il est dit que la haute autorité est indépendante de la direction du parti (même si elle et son président sont élus sur proposition du président du parti). Elle organise l’élection du président du parti et ses décisions ne sont susceptibles d’aucun recours. Mais la nature et les attributions de l’instance inquiètent ce nouveau membre, qui l’a bien fait remarquer. ‘’Comment peut-on confier une structure aux rôles aussi importants à des « membres extérieurs du parti », notamment son président ?», s’interroge-t-il.

‘’Le document me paraît trop touffu…’’

L’article 27 relatif aux ‘’sanctions des militants’’, lui, pose aussi problème. Alors que le texte dit que ‘’l’exclusion définitive est prononcée sans appel, par le Conseil national sur proposition du Bureau politique’’, le membre de ce mouvement dissout dans Pastef pense que ‘’l’exclusion définitive devrait être du ressort du Congrès’’. Et que ‘’les autres instances pourraient en arriver à la suspension d’un militant, assortie d’une proposition de son exclusion définitive du parti’’. Poursuivant, il rappelle : ‘’C’est dans le même ordre que nous disions plus haut que le président du parti ne devrait pas pouvoir exercer le pouvoir de sanction statutaire à l’égard des adhérents du Parti’’.

Avant ces remarques de fond, l’auteur de la note avait souligné, à propos de la forme : ‘’le document me paraît trop touffu, parce que, d’une part, nous notons souvent des répétitions à plusieurs endroits du texte, dues certainement à la volonté de l’auteur d’être trop détaillé espérant, peut-être, mieux se faire comprendre. D’autre part, plusieurs séquences du texte devraient être réservées plutôt au Règlement Intérieur’’, dit-il. Et de se demander : ‘’Pourquoi d’ailleurs, ce Règlement Intérieur n’a pas accompagné la proposition de Statuts, ces deux documents étant intimement liés ?’’.

L’info