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RECONQUETE DE DAKAR : Les chantiers de Khalifa

Maitre incontesté de Dakar au sortir des locales de 2014, l’ex-édile socialiste Khalifa Ababacar Sall a perdu beaucoup de terrain, avec plus d’une dizaine de mairies récupérées par la coalition de la mouvance présidentielle. Ce qui rend quasi impossible sa volonté de reconquérir la capitale sénégalaise. 

Les élections municipales et départementales du 23 janvier 2022 prochain sont parties pour être un test grandeur nature pour l’ancien maire de Dakar. Dépouillé de tous ses mandats électifs et déboulonné dans une dizaine de mairies qu’il avait pourtant conquis par les urnes aux élections locales de 2014, le leader de Taxawu Dakar, aura perdu beaucoup de terrains entre temps. Soutenu au départ, par beaucoup de caciques socialistes, progressistes, ‘’Jallarbistes’’, entre autres, l’ex-chargé de la vie politique du Parti socialiste a en effet, perdu beaucoup de ses soutiens et lieutenants qui ont entre temps, tourné casaque. 

Vide autour de Khalifa Ababacar Sall

Et ce sont ses camarades socialistes qui ont été les premiers à lui tourner le dos, au beau milieu du bras de fer noué contre feu Ousmane Tanor Dieng, pour le contrôle du Parti socialiste, et contre le président de la République, Macky Sall dans le cadre de la bataille de Dakar. Feu Doudou Issa Niass (Biscuiterie), Alioune Ndoye (Plateau), Jean Baptiste Diouf (Grand Dakar), Mame Amadou Samba (Cambérène) et Banda Diop (Patte d’Oie) sont tous retournés dans le giron immédiat d’Ousmane Tanor Dieng, pour échapper aux représailles politiques qu’ils encouraient. S’en suivent par la suite ses alliés de l’Alliance des forces de progrès de Moustapha Niasse qui a sorti le grand jeu, pour ramener dans son escarcelle, Babacar Sadikh Seck, maire de la commune des HLM, Santi Sène Agne, maire de la commune de Sicap- Liberté et Ousmane Ndoye, maire de la commune de Fass-Colobane-Gueule-Tapée. Candidat indépendant et un des soutiens majeurs du leader de Taxawu Dakar, l’actuel maire des Parcelles Assainies, Moussa Sy est le dernier responsable de ladite coalition à retourner sa veste, pour rallier la mouvance présidentielle. Dans le clair-obscur, le maire de la Médina, Bamba Fall, ainsi que celui de la commune de Hann Bel air, Babacar Mbengue ont tous les deux pris leurs distances avec Khalifa Ababacar Sall. 

Madiop Diop, Barthélémy Dias, Cheikh Guéye et Palla Samb, les fidèles soutiens…

Sur la quinzaine de responsables politiques qui le soutenaient dès le départ, seuls Pape Madiop Diop, maire de Grand Yoff, Barthélémy Dias, maire de Mermoz-Sacré Cœur, Cheikh Guéye (Ligue démocratique) maire de Dieuppeul Derklé et Palla Samb, maire de la commune de Point-E-Amitié lui sont restés fidèles. Ainsi, sur 1098 conseillers municipaux que compte le département de Dakar, les 800 qu’avait glané Taxawu Dakar se sont pratiquement effrités au fil du temps. Les rangs de la coalition dirigée par Khalifa Ababacar Sall se sont considérablement dégarnis à l’issue des élections du Haut conseil des collectivités territoriales. Aprement disputées avec le régime en place regroupé au sein de la coalition Benno bokk yaakaar (BBY), les élections des membres du Haut conseil des collectivités territoriales ont débouché certes sur une victoire de Khalifa Sall. Qui a à cet effet, repris l’avantage sur le Président Macky Sall sorti largement victorieux dans la capitale sénégalaise, lors du référendum de 2016. Mais avec beaucoup de séquelles politiques.

La perte de toutes ces communes désavantage Khalifa Ababacar Sall, dans sa quête d’hégémonie à Dakar. Surtout dans un contexte où les cartes sont complètement redistribuées, avec un Président Macky Sall qui prend progressivement de la place, et un Ousmane Sonko qui gagne de la sympathie dans la capitale sénégalaise. C’est dire que même si pour le moment, rien n’est encore joué, les choses vont se compliquer davantage pour l’ancien maire de Dakar. Qui devra également faire avec les guerres de positionnement notées au sein de sa coalition entre Barthélémy Dias, Soham Wardini et accessoirement Bamba Fall qui nourrit aussi les ambitions de diriger la ville de Dakar. La nature de ces élections municipales et départementales étant différentes des législatives et de la présidentielle, du fait de leur caractère local et du mode de scrutin, il faudra avoir la majorité absolue des 19 communes, pour pouvoir mettre la main sur la ville de Dakar. Or, récupérer les mairies perdues, s’avère une tâche difficile pour l’ex-édile socialiste, écarté de toutes formes d’élection à la suite de sa condamnation dans l’affaire dite de la caisse d’avance de la mairie de Dakar. Si Khalifa Sall peut être sûr de conserver dans son escarcelle, les mairies de Mermoz-Sacré Cœur, Grand Yoff et dans une moindre mesure, Médina et Point-E, il ne peut pas en dire autant pour Plateau, HLM, Fass-Colobane-Gueule Tapée, Cambérène, Grand Dakar, Biscuiterie, Sicap-Liberté et Patte d’Oie. Cela, sans compter Yoff qui est sous la tutelle de l’Alliance pour la République, Ouakam, chasse gardée de Samba Bathily Diallo, et Ngor, dirigée par Amadou Guéye. Ces trois villages Lébou ont jusqu’ici résisté à Khalifa Ababacar Sall.

L’équation Soham Wardini

Promue maire de la ville de Dakar depuis l’incarcération suivi de la révocation de Khalifa Sall en 2017, par le président de la République, Macky Sall, Soham El Wardini a été la première femme à occuper le fauteuil de la capitale sénégalaise. Depuis, elle a pris de la place et a réussi à tisser sa toile. L’appétit venant en mangeant, la militante et responsable de l’Alliance des forces de progrès de Moustapha Niasse ne cache pas ses ambitions de rempiler à la tête de la mairie. Dans une sortie médiatique récente, elle a clamé tout haut, son ambition de voir une femme diriger la mairie de Dakar, à l’issue des élections municipales et départementales de janvier 2022 prochain. ‘’Je suis dans une coalition et le moment venu, nous nous réunirons pour choisir notre candidat. Peu importe la personne qui va la diriger, cette liste, nous souhaitons que ce soit une femme. Je ne peux pas me prononcer pour l’instant. La coalition choisira et si je suis choisie, je serais prête à être la candidate de cette coalition’’, a déclaré la responsable progressiste qui n’en demande pas moins un leadership féminin dans les différentes collectivités territoriales du pays, à travers le slogan ‘’Osons les mairies’’. Une candidature qui aura tout son sens au vu de son actif à la tête de la mairie de Dakar et de son jeu d’équilibrisme pour parvenir à composer avec sa coalition, son parti et la mouvance présidentielle, sans frustrer aucune partie. C’est dire qu’au moment des investitures, elle peut être un cheval de Troie pour la mouvance présidentielle si jamais elle venait à être écartée des listes de Taxawu Sénégal comme tête de liste. Son entente avec le président de la République pourrait ainsi jouer en sa faveur, dès lors qu’elle peut négocier avec le régime, à défaut d’être investie tête de liste par Macky Sall.

Vers une guerre interne

Sa déclaration de candidature à peine voilée, intervient dans un contexte où le maire de Mermoz-Sacré Cœur Barthélemy Dias a officialisé la sienne pour sa succession. L’ancien Secrétaire général du Mouvement national des jeunesses socialistes qui se sent légitimement en droit de succéder à Khalifa Sall, semble catégorique sur sa décision de briguer le suffrage des dakarois, avec ou sans l’onction du leader de sa coalition, aujourd’hui dans une posture peu confortable pour trancher le débat au moment des investitures qui s’annoncent aussi compliquées pour l’ex-édile de Dakar que pour son adversaire d’en face. Entre Barthélemy Dias, Soham El Wardini et accessoirement Bamba Fall, Khalifa Sall aura du mal à faire son choix et à concilier les différentes positions sans pour autant frustrer certains. Qui pourraient à cet effet, soit présenter des listes parallèles, soit rejoindre la mouvance présidentielle.  

L’info