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ENTREPRENEURIAT AGRICOLE ET EMPLOI DES JEUNES : La Macky formula

Pour à la fois combattre le chômage des jeunes et assurer la sécurité alimentaire des populations sénégalaises, l’État a initié simultanément plusieurs projets et programmes dans le secteur agricole et annonce d’importants financements. 

Sous la pression du taux de chômage qui frappe durement la jeunesse sénégalaise, le gouvernement de Macky Sall mise désormais sur le secteur agricole pour créer le maximum d’emplois.  Ainsi, plusieurs projets ont été lancés simultanément dans ce secteur en vue d’apporter des solutions sur cette situation. Il s’agit du projet ’’Agri-jeunes Tekki ndawni’’. Lancé en mars, ce projet vise à terme, d’assurer l’insertion socio-professionnelle de plus de 45 000 jeunes ruraux des régions de Kaolack, Fatick, Diourbel, Louga, Thiès, Ziguinchor, et Sédhiou. 

Financée à hauteur de 54 milliards par le Fonds international de développement agricole (FIDA) pour une durée de 6 ans, cette initiative vient renforcer le dispositif de promotion de l’emploi et de l’entrepreneuriat des jeunes. Pour la première année d’opérationnalisation (2021) du dispositif d’appui, le Comité national de pilotage a fixé un objectif de 11 000 jeunes bénéficiaires pour un budget de 7 milliards dont 1,5 milliards en renforcement de capacités, trois milliards en subvention directe pour financer 7500 jeunes en formation et insertion.  

Parallèlement au projet ’’Agri-jeunes Tekki ndawni’, l’Etat a aussi lancé le Projet d’appui à la réduction de la migration à travers la création d’emplois ruraux au Sénégal (PACERSEN) pour créer 150 fermes familiales dont 70 fermes regroupées autour de 7 exploitations agricoles. Conçue par l’Agence nationale de réinsertion et de développement agricole (Anida), en relation avec ses partenaires techniques et financiers, ce projet va, d’après le ministre de l’Agriculture et de l’Équipement rural, permettre la création de 3000 emplois dont 70% constitués par des jeunes et des femmes et 25 % composés d’émigrés. A noter que la composante Percersen Bis intervient dans les régions de Louga, Diourbel, Fatick, Kaffrine et Tambacounda. Au total, ce sont 24 fermes villageoises ‘’Natangué’’ dont 10 fermes intégrées à des productions animales, 5 avec productions laitières, 5 avec des productions avicoles équipées de réseaux d’irrigation sous pression, ainsi que des forages, et 5 fermes ‘’War Wi’’ composées de 50 fermes familiales ‘’Natangue’’. Cette réalisation a permis de créer 1480 emplois directs et 2500 emplois indirects selon les autorités. 

La ruée vers le secteur agricole s’explique en grande partie par le retour ces dernières années, de fortes précipitations dont l’hivernage pluvieux de 2020 qui a permis à l’économie sénégalaise d’échapper à « la récession » avec « des récoltes qui ont battu tous les records ». 

Disponibilité de terres arables et de l’eau en abondance

Pour l’entrepreneur agricole, Lamine Ndiaye, l’engouement que suscite le secteur de l’agriculture s’explique par la disponibilité des terres arables et de l’eau en quantité. ‘’Le Sénégal dispose bien des potentialités pour une réussite de ces projets agricole par une disponibilité des terres arables et de l’eau en quantité suffisante dont le 1/3 n’est pas encore exploité. Mais aussi par l’existence d’un grand marché avec une forte demande pour certains produits agricoles’’, a expliqué M. Ndiaye. Bien que les conditions soient favorables à la mise en œuvre des projets lancés, l’ingénieur a posé le problème de la gestion du foncier qui demeure et reste selon lui, un grand problème pour l’agriculture sénégalaise, et l’accès à la terre et à l’eau qui doit être facilité par l’État aux investisseurs nationaux. 

Diversification des productions, maitrise de l’eau, bonne gestion des subvention… : les gages de la réussite des projets agricoles

Pour une bonne réussite de ces projets, le secteur doit être réorganisé et bien accompagné. ‘’Ce que l’on constate aujourd’hui au Sénégal est que tout le monde produit la même chose et au même moment. De ce fait, le marché se retrouve souvent inondé par certains produits favorisant une baisse considérable des prix pouvant aller même à une mévente’’, a-t-il déploré. Aussi, relève-t-il : le marché est très libre entraînant une variation des prix pouvant aller à 10 fois au moins ou 10fois plus que les prix habituels. 

De son côté, l’ingénieur agroéconomiste, Toffène Dione voit deux solutions pour la réussite des projets lancés dans le secteur de l’agriculture par le gouvernement. Le premier obstacle à lever reste la disponibilité de l’eau. ‘’La grande révolution que je vois et qui pouvait apporter la solution à tout le monde, c’est la maitrise de l’eau’’, a indiqué M Dione. Selon l’agroéconomiste, partout au Sénégal où l’eau existe en saison sèche, les populations se débrouillent pour se lancer dans la production agricole. A titre d’exemple, il cite la zone des Niayes, la Vallée du fleuve Sénégal et le bassin de l’Anambé. ‘’Même dans les villages où il y le peu d’eau, les gens se débrouillent pour cultiver à de petites échelles. Pour régler le problème de la maitrise de l’eau, ce gestionnaire du volet production végétale et suivi évaluation, invite l’Etat du Sénégal à faire passer un canal qui divise le Sénégal en 2 ou 3 et l’eau passe partout. Ainsi, même sans aucun financement, dès que l’eau est disponible, les Sénégalais se mettront à travailler pour produire. 

Le second problème que Toffène Dione a constaté dans le secteur de l’agriculture, c’est la gestion des subventions. ‘’Le problème de l’agriculture, c’est les subventions. Quand l’État met 100 francs pour la subvention des producteurs, peut-être 30% de ces subventions n’arrivent pas aux producteurs. Où sont passés les 70% de la subvention que l’État a fait ? Nous avons beaucoup de poches ou beaucoup de gens mal intentionnés qui ne font que détourner ce que l’État prépare pour les producteurs’’, a-t-il déploré. Et d’ajouter : ‘’Ça, c’est un problème qu’il faut impérativement régler dans l’agriculture.  Ça retarde le travail que l’État veut faire dans le secteur. Il y a vraiment un assainissement qu’il faut impérativement faire dans ce domaine des subventions’’, a estimé l’agroéconomiste.  

L’agrobusiness, un secteur très prometteur…

Dans sa politique d’emploi et d’insertion des jeunes, le Président Macky Sall mise beaucoup sur l’agrobusiness. Rien que dans le cadre de l’extension de la Convention Etat-Employeurs, l’Etat ambitionne de créer 15 000 emplois.  Pour Toffène Dione, l’agrobusiness est l’un des secteurs qui peut aider l’Etat du Sénégal à régler plusieurs problèmes économiques et sociaux. ‘’Aujourd’hui, l’avenir du Sénégal repose dans l’agrobusiness si nous voulons atteindre l’autosuffisance alimentaire. C’est aussi le secteur qui peut aider si nous voulons atteindre la souveraineté alimentaire’’, a estimé Toffène Dione.  Selon lui, vue les moyens utilisés par l’agriculture familiale dans ce contexte où la croissance démographique ne cesse d’augmenter, il sera très difficile d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. ‘’Dans l’agrobusiness aujourd’hui, chaque jeune ou chaque Sénégalais qui a les moyens de produire, peut se lancer dans la production et se faire fortune. Nous avons des terres. L’agrobusiness au Sénégal a un avenir qui est prometteur dans la mesure où il y a beaucoup de jeunes sénégalais, mais aussi des étrangers qui ont compris que le Sénégal a un potentiel dans le secteur de l’agrobusiness’’, a soutenu l’ingénieur agronome, le chargé de la production végétale et suivi évaluation de l’Ong agronome vétérinaire sans frontière. 

Mise en place d’unités de transformation

Toutefois, l’ingénieur agronome a indiqué que le potentiel seul ne suffit pas pour tirer le maximum de profit qu’offre le secteur de l’agrobusiness. D’après lui, la promotion de l’agrobusiness dépend aussi de la mise en place d’unités de transformation.  ‘’Au moment où on est en train de faire des aménagements pour la production, on doit aussi réfléchir sur les unités de transformation. Ce qui permettra aux producteurs de signer des contrats avec ceux qui font la transformation. De ce fait, dès que les producteurs auront fini de produire, ils livrent automatiquement aux unités de transformation.  Et ceux qui font la transformation peuvent aussi signer des contrats avec les consommateurs, les grands magasins, les grandes surfaces pour que la distribution puisse se faire en même temps’’, a recommandé Toffène Dione. Avant de poursuivre : ‘’cela fera de sorte que dès que les gens produisent, le produit arrive au niveau des usines qui les transforment puis les distributeurs sont là pour faire la distribution. C’est vraiment un système qu’il faut revoir de la base jusqu’à la consommation finale’’.

Le développement de l’agriculture familiale

Parallèlement à l’agrobusiness, l’Etat devrait aussi songer à développer l’agriculture familiale dans sa politique de création d’emploi et d’insertion des jeunes. Étant donné que tout le monde ne peut pas se lancer dans le secteur de l’agrobusiness, il est donc impératif de développer l’agriculture familiale en dotant les ménages qui s’y activent, de machines agricoles modernes, de semences et de produits phytosanitaires. Aussi faudra-t-il, selon les spécialistes du secteur, favoriser la culture bio pour lutter contre certaines maladies, et faire revivre les terres dans certaines parties du pays à travers des systèmes de traitement moderne et efficace. ‘’Quand on arrivera à régler ces questions tout en prenant compte des nombreuses recommandations issues des recherches de l’Institut sénégalaise de recherche agricole (Isra) sur l’agriculture familiale, le Sénégal fera de bons progrès dans ce secteur’’, s’est convaincu Toffène Dione.

L’info