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UN BUSINESS DE DIZAINES DE MILLIARDS POUR 200.000 ENFANTS RECENSÉS

LA MENDICITE AU SENEGAL DES CHIFFRES EFFARANTS

Dans son rapport publié le 11 juin 2019, Human rightsWatch a fait état de 100.000
talibés vivant au Sénégal et contraints par leurs maîtres coraniques ou marabouts de mendier de l’argent ou de la nourriture. Mais, les chiffres semblent être plus effarants que cela. car d’après les calculs, il est établi qu’environ 200.000 enfants sont recensés sur le territoire sénégalais pour une exploitation qui rapporte des dizaines de milliards Fcfa l’année.

«Il y a beaucoup de cas d’abus d’exploitation au Sénégal des enfants. Et même les estimations données par Human Right Watch sont très en deçà de la réalité.» C’est ce qu’a révélé, hier, Issa Saka, coordinateur des projets pour l’ONUDC lors d’un atelier de formation des journalistes sénégalais sur la traite des êtres humains transnationale en Afrique. A l’en croire, rien que dans la région de Diourbel, on compte 129.000 enfants mendiants; alors qu’au même moment Dakar et Saint-Louis enregistrent successivement 30.000 et 14.000 enfants talibés. Ce, dit-il, sans compter les autres régions. Ce qui fait environ 200 000 enfants partout dans le Sénégal. Les enfants étrangers, selon M. Saka, représentent 9% du chiffre donné et viennent essentiellement de la Guinée-Bissau. A supposer que les marabouts demandent des versements journaliers de 500 Fcfa, M. Saka reconnait, que l’exploitation rapporte une trentaine de milliards Fcfa environ l’année à ceux qui tirent profit de cette activité.
EXPLOITATION DE FILLES SENEGALAISES DANS LES PAYS DU GOLFE
Le coordinateur des projets pour l’ONUDC, Issa Saka, est revenu également sur une autre forme de traite notée au Sénégal: le travail domestique forcé. Malheureusement, il dit constater que beaucoup de filles à qui on fait signer des contrats en arabe vont voyager pour aller travailler comme domestiques dans des pays du golfe en Arabie Saoudite et au Koweït etc. Avant de préciser qu’on leur promet des salaires de 200.000 voire 300.000 Fcfa pour se retrouver finalement dans des conditions d’exploitation indescriptibles. «Vous avez vu le cas de Mbayang Diop qui a été finalement obligée de se battre pour se libérer. Et elle a tué son employeur. Donc, ce sont des cas réels qui sont également sous documentés. Ce sont des personnes qui partent dans la clandestinité, qui se cachent pour partir avant de finir par être exploitées. Et souvent, elles sont rapatriées dans des conditions dramatiques», s’est-il désolé. M. Saka de soutenir que, selon leurs informations, les recruteurs sont souvent proches des familles. Et précise-t-il, ces derniers, à qui les familles font souvent confiance, viennent proposer le travail, se chargent de toutes les paperasses pour le
voyage sans dire toute la vérité autour du travail proposé. «Les filles qu’on envoie là-bas ne parlent pas souvent arabe. Et selon
nos informations par rapport aux filles qui avaient été retournées, Pout et Sébikhotane
constituent les principaux lieux de provenance des jeunes filles qui vont travailler dans les pays du golfe. Ceux qui recrutent sont des gens qui ont des connexions en Arabie saoudite», a-t-il déclaré.
PROSTOTUTION FORCÉE, PRATIQUES MYSTIQUES A KEDOUGOU
Abordant la question de la prostitution forcée, M. Saka souligne que le phénomène est très répandu à Kédougou où des filles viennent principalement du Nigéria où elles sont recrutées. «Des filles à qui on promet des voyages en Europe comme la France ou l’Italie ; des filles à qui on promet des métiers de coiffeuse, de mannequin ou de restauratrice, mais qui se retrouvent dans la forêt de Kédougou sur les sites d’extraction. Et une fois sur place, leurs bourreaux confisquent leur document de voyage avant de les contraindre de se prostituer. Si certaines filles sont bastonnées ; d’autres subissent des pratiques mystiques comme le «Djoudjou» qui font qu’elles sont terrorisées et vont être obligées de se prostituer et de procéder à des versements à leurs bourreaux», renseigne-t-il. En définitive, pour ce qui est des poursuites et des condamnations que ce soit pour la mendicité comme pour la prostitution forcée, Issa Saka estime qu’elles sont timides. Il ajoute qu’il y a plus d’actions judiciaires par rapport à la prostitution forcée qu’à l’exploitation de la mendicité, par exemple. «Pour la mendicité, il y a des connexions avec la religion et la tradition qui font que c’est très sensible», dit-il avant de déplorer le fait qu’il y ait, à chaque fois, une volonté politique affichée, mais qui n’est jamais réalisée à 100%. Cependant, Issa Saka ne désespère pas de voir le phénomène s’estomper progressivement. «Je suis rassuré de voir que le Sénégal a été déclassé sur le classement du département d’Etat américain. Le pays est déclassé, l’année dernière, pays à surveiller niveau 2. Cette année, on a gagné une place, on a perdu «à surveiller». J’espère que les efforts sont en train d’être mis en œuvre pour que le phénomène puisse s’estomper. Mais, cela continue parce que c’est un phénomène très complexe», a-t-il conclu.


( Seydina Bilal DIALLO avec Toutinfo.net )