EL HADJ AMADOU KANE DIALLO, PRESIDENT DU MOUVEMENT BAMTARE : «Je suis un homme libre. Mon blanchiment n’a pas été négocié»
A l’approche de la présidentielle de 2019, le président du mouvement «Bamtaré» s’engage à fond pour la réélection du candidat de Bennoo Bokk Yakkar, Macky Sall, au premier tour. L’ancien Directeur du Cosec organise un grand meeting à Ndioum le 10 décembre prochain. Mais Amadou Kane Diallo entend joindre l’utile à l’agréable : faire le bilan des signatures collectées dans une atmosphère de fête, avec en toile de fond une prestation de Baaba Maal. Dans cet entretien avec «L’As », l’ancien maire de Ndioum précise que son ralliement à la mouvance présidentielle n’a pas été une condition de son blanchiment par la justice.
L’As : Pourquoi avez vous attendu maintenant pour rejoindre le président Macky Sall, alors que «Bamtaré» avait voté Non au referendum.. ?
Amadou Kane Diallo : Notre ambition, c’était de mettre en œuvre notre vision du développement au niveau de l’Etat. Pour ce faire, il faut soit être président de la République soit être un élément important du gouvernement pour être écouté. Dès le départ, nous avons visé le pouvoir. Car on ne fait de la politique que pour conquérir le pouvoir et l’exercer. Nous sommes allés avec nos propres moyens aux élections législatives et nous étions présents dans les 45 départements du Sénégal et dans la diaspora. Nous sommes partis seul sans coalition, sans moyens. J’ai fait deux fois le tour du pays. Au finish, on s’est classé 26e sur 47 listes, mais sans avoir un député. Il est donc irréaliste de chercher à présider le Sénégal alors qu’on n’a pas été élu. C’est ainsi que les membres du Mouvement Bamtaré ont décidé de choisir un candidat pour la présidentielle de 2019. Notre analyse nous a fait ressortir qu’il y avait deux candidats qui pouvaient nous intéresser, c’est-à-dire d’où on venait, le PDS, ou le candidat sortant. Malheureusement, au Parti de démocratique sénégalais personne ne nous a contactés. Le régime en place nous a revanche contactés pour une alliance. La base a adhéré et exigé qu’on soutienne le candidat Macky Sall en direction de la présidentielle de 2019.
On sait que vous avez été blanchi par la justice dans une affaire de détournement de deniers publics. N’était ce pas là un moyen de vous tenir et vous contraindre à rejoindre la mouvance présidentielle ?
Non !!! Justement si c’était le cas, j’aurais accepté la main tendue de mon oncle (frère de mon père), le ministre Mansour Elimane Kane, depuis trois à quatre ans, ou celle de Thierno Madani Tall, entres autres. Même si le président Macky Sall me convoquait à cette époque, je n’aurais pas répondu parce que j’avais les mains liées. J’avais un dossier judiciaire. Et pour aller travailler avec le président Sall, il faut avoir les mains propres. Macky avait bien compris. J’étais très dur, je présidais le front du non du département de Podor lors du référendum. Je suis quelqu’un qui croit en ce qu’il fait. Moi, je ne fais pas de coup bas, je donne des coups directs. A l’époque, presque tout le monde était intervenu pour que je rejoigne la mouvance présidentielle. Alors si je voulais être blanchi, je pouvais le négocier, mais je refusais. On a rejoint le président Macky Sall au moment le plus difficile. On ne l’a pas fait lorsqu’il était facile de le faire, c’est-à-dire en début de mandat pour avoir notre part du gâteau. Je connais Macky Sall depuis longtemps, c’est un frère. Mais la politique, c’est la politique ; et les coups se paient cash, les erreurs se paient aussi. J’ai été agressé politiquement, j’ai toujours répondu et j’ai fait face à la justice pendant 6 ans. Personne ne me soupçonne aujourd’hui d’avoir rejoint le président Sall pour avoir une liberté ou des prébendes. Le juge d’instruction qui avait mon dossier avait demandé depuis trois ans qu’on m’accorde un non-lieu. Il faut rappeler que le dossier ne concerne pas seulement Amadou Kane Diallo, mais aussi Ameth Fall Braya et trois autres directeurs du Cosec. Nous étions inculpés pour les mêmes motifs, mais le juge d’instruction a estimé qu’il n’y a pas matière à juger. Mais politiquement, c’est normal qu’on fasse trainer le dossier : une manière de me mettre la pression. Mais quand ils se sont rendus compte que cette pression était inutile, qu’à chaque élection j’augmentais mon électoral et que cela pourrait être dangereux pour eux, les gens ont laissé la justice faire son travail correctement. Finalement, je suis blanchi. Le dossier n’a rien ; je n’ai pas pris de l’argent, je n’ai pas vu la couleur de l’argent. C’était des problèmes de maitrise de procédures de marchés publics. C’est tout. Et le rapport 2008 de l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP) se trouve dans le net. Il y avait 84 entreprises qui étaient auditées, dont le Cosec. Le point de vue de l’auditeur, c’était que le Cosec a fauté dans le respect des procédures ; mais dans le fond, il s’agit d’un petit nombre de marchés pour des montants non significatifs. Est-ce que cela doit amener quelqu’un en prison ? C’est cela l’opinion de l’auditeur ! Ce n’est pas une négociation, du tout ! Je suis vraiment un homme libre, avec un mouvement libre et implanté un peu partout dans ce Sénégal.
Quels sont les objectifs visés à travers le méga-meeting à Ndioum pour le 10 décembre ?
Le mouvement «Bamtaré» et ses alliés organisent le 10 décembre à Ndioum un méga meeting politique, culturel et inclusif, dans le but de soutenir notre candidat Macky Sall. Ce sera sous la présence du ministre Abdoulaye Daouda Diallo. Nous révèlerons le nombre de signatures que le mouvement Bamtaré a récolté pour le parrainage du président Macky Sall et remercierons ma base naturelle, Abdoulaye Maal représentant de la diaspora, les Ndioumois et tous les militants. A travers ce meeting, nous visons à transformer les parrains en électeurs. A partir de ce jour, on va transformer les parrains en vrais électeurs. Et puis cette date correspond à la fin du parrainage. C’est pourquoi on tient au slogan : «Ila Macky Sall». Il faut que les Sénégalais acceptent de laisser Macky Sall terminer son travail. Cinq ans, ce n’est pas beaucoup.
Pourquoi avez-vous couplé le meeting à la clôture des « Blues des fleuves » de Baaba Maal ?
L’artiste Baaba Maal est le concepteur de cette manifestation ; c’est lui-même qui a fixé la date du 10 décembre, après le festival «les Blues des fleuves». Il clôture l’évènement avec le méga-meeting politique, culturel et inclusif du Mouvement «Bamtaré». Baba Maal et moi avons des relations très profondes. On a le même combat, c’est-à-dire le combat pour l’épanouissement culturel de la communauté et le développement. D’ailleurs, mon dernier fils porte le nom du lead vocal de Dande Lenol, Baaba Maal Diallo.
Interview réalisée par, Ousseynou BALDE & Aïssatou Diao Kane