BREXIT: La «drôle de sortie» du Royaume-Uni de l’UE
DIPLOMATIE : Après une saga de près de quatre ans et deux tentatives avortées, le Royaume-Uni largue les amarres européennes ce 31 janvier suite à la signature à l’arraché d’un accord de divorce qui met un terme à la première phase de son retrait.
Mais si les Brexiters les plus ardents s’apprêtent à fêter bruyamment la sortie, pour la majorité des Britanniques, le cœur n’y est pas.
« – Je peux vous demander ce que vous ferez le 31 janvier ? – Le 31 janvier ? Ah oui, le Brexit ! Je ne sais pas, ce sera un jour comme les autres, je pense, pour moi… » Au grand étonnement des journalistes curieux de jauger l’état d’esprit d’une nation qui s’apprête à couper le cordon ombilical après 47 ans passés dans le giron européen, bon nombre de Britanniques ne semblent pas vraiment prêter attention à l’événement.
Certes, la date est avant tout symbolique : le départ du Royaume-Uni s’accompagne d’une période de transition jusqu’à la fin de l’année 2020, un laps de temps durant lequel Londres et Bruxelles vont tenter de négocier leur future relation.
Les Britanniques continueront d’appliquer les règles de l’Union européenne (UE), simplement ils ne prendront plus part aux décisions communautaires, autrement dit, ils n’auront plus voix au chapitre. Concrètement, au quotidien, rien ne va donc changer le 1er février, et c’est peut-être ce qui explique en partie cette indifférence générale.
Mais il y a autre chose qui explique cette drôle d’atmosphère, quelque peu apathique : le Brexit n’est ni un acte de libération d’un brutal oppresseur (n’en déplaise à certains Brexiters dont Boris Johnson qui n’hésitent pas à émettre des comparaisons douteuses entre l’UE, Hitler et Napoléon…), ni une révolution d’un peuple dans la rue déterminé à balayer l’establishment et faire table rase de tous les codes britanniques existants.
D’autant que nombre d’avocats de la sortie du bloc européen se réfèrent en réalité à un retour à un temps où le Royaume-Uni était un empire dominant une partie de la planète, temps désormais révolu que le Brexit ne peut pas raviver.
Surtout, les Britanniques ressentent une immense lassitude face à un feuilleton aux épisodes tragicomiques menant souvent à l’impasse et qui a semblé interminable à bien des électeurs persuadés que le résultat du référendum du 23 juin 2016 réglait une bonne fois pour toutes le problème. « Mais on a voté pour le Brexit il y a longtemps maintenant, pourquoi on n’est pas encore sortis ? », a-t-on entendu maintes fois durant les nombreuses crises qui ont émaillé le long chemin vers l’accord de retrait.
Un pays encore divisé
Il ne faut pas non plus oublier que si 51,8% des votants ont voulu sortir, 48,1% souhaitaient, eux, rester dans l’UE. Un pourcentage qui s’est d’ailleurs inversé avec le temps. La moyenne des six derniers sondages effectués par l’organisation non partisane WhatUkThinks entre le 4 décembre et le 10 janvier indique que désormais 53% des sondés voteraient pour le « Remain » (« rester ») et 47% pour le « Leave » (« sortir ») en cas de nouveau référendum. Et ce, malgré la large victoire de Boris Johnson aux législatives anticipées du 12 décembre dernier, reconduit avec une imposante majorité sur une promesse unique, un Brexit garanti le 31 janvier.
Toutinfo.net (RFI)