TABAGISME: Le phénomène se conjugue au féminin au Sénégal
SOCIETE : Le développement de la consommation de tabac au Sénégal a de quoi inquiéter. Surtout lorsque celle-ci se banalise et se féminise de plus en plus.
Le Sénégal est un pays de fumeurs. Mais, de plus en plus de filles et de femmes sont devenues accros à la nicotine. Un phénomène jadis exceptionnel mais qui se banalise maintenant.
En effet, il n’est pas rare de voir la gent féminine dans les établissements scolaires, universitaires, dans les lieux de travail et de loisirs s’adonner à la consommation assidue de la cigarette, associée à l’alcool.
Dans une société sénégalaise qui rejette la consommation de ce genre de «drogues douces», le phénomène à de quoi inquiéter. Surtout que ce sont les jeunes filles à la fleur de l’âge qui en font un sport favori. Et selon des études médicales « lorsqu’elles fument, les femmes consomment plus que les hommes ».
Celles qui sont tombées dans ce cercle vicieux de la consommation du tabac, le firent au début plus par mimétisme que pour autre chose. Puis l’habitude venant en fumant… De taille moyenne, noirceur d’ébène, visage large, grosses lèvres pulpeuses avec ses yeux de biche, son costume noir assorti d’un haut blanc et d’une jupe noire qui lui arrive jusqu’aux genoux pour laisser transparaitre ses belles jambes, Bineta Diop par sa beauté a de l’allure à revendre.
Au bas de l’immeuble qui abrite les bureaux de son entreprise de prospection minière, elle discute avec ses collègues dans une ambiance agréable, un café dans une main et une cigarette dans l’autre. Comme tous ses autres collègues hommes et femmes qui fument en sirotant leur café. Bineta Diop et ses autres collègues femmes ne semblent pas prêter attention aux regards inquisiteurs des passants, C’est que chez elles fumer est une habitude.
« Quand je fume je ne fais pas attention aux autres. Je n’ai pas à me cacher. Pourquoi devrais-je avoir plus peur des hommes que de Dieu ? », demande-t-elle en me regardant fixement dans les yeux.
Une phrase qui semble obtenir l’approbation de ses collègues de bureau qui continuent à tirer de plus belle sur leur mégot de cigarette, en rejetant par des gestes mécaniques la fumée blanche vers le ciel.
A vingt-huit ans, Bineta Diop a passé huit années de sa vie pendant lesquelles elle a régulièrement consommé au moins un paquet de cigarettes par jour.
« J’ai commencé à fumer pendant mes études en France. La plupart de mes amies étaient des fumeuses. Au début, je consommais des bouts de cigarettes, avant de devenir accro. Tant que je vivais en France ce n’était pas grave du tout. Mais ici, les gens ne voient pas d’un bon œil une femme qui fume. J’ai essayé de cacher cela à ma famille. Mais un jour ma mère m’a découverte. Et depuis lors, je me cache plus pour fumer », explique-t-elle.
Une dépendance qui pousse cette célibataire sans enfant à fumer un paquet de cigarette par jour.
Ce qui était parti comme une banale expérience pour « découvrir le gout du tabac » est devenu un vice, dont Marie Odile Niane, tout juste 21 ans, ne sait pas comment se débarrasser. Cette étudiante en Droit fait partie des nombreuses filles accros à la nicotine, qu’on rencontre dans le campus universitaire.
«C’est la grande sœur d’une copine qui m’a appris à fumer. Un jour, j’ai passé la journée chez elle. Après le repas, elle s’est mise à fumer devant nous. Nous l’avons imitée. Et depuis, lors on met toujours de l’argent de côté pour se payer de la cigarette. Notre cercle de fumeuses s’est agrandi au lycée. Lorsqu’on est venues à l’université, on a continué à s’adonner à la consommation de la cigarette qui est devenue un vice pour nous », révèle-t-elle.
Au fond d’elle-même, cette jolie liane à l’aise dans son pantalon Jean bleu qui fait ressortir ses rondeurs avec ses mèches lui retombant sur le dos, nourrit le doux rêve d’arrêter de fumer un jour. Mais, les résolutions d’arrêter de fumer qu’elle prend la veille ne sont pas suivies d’application le lendemain.
«Je veux arrêter. Mais je n’ai pas encore la force morale pour le faire. Peut-être quand je sortirai de l’université. Car, il faudra forcément arrêter un jour si l’on veut avoir des enfants en bonne santé », se convainc-t-elle.
Ces étudiantes fumeuses sont conscientes des conséquences sociales et sanitaires de la consommation du tabac. « Certes, le tabac est dangereux pour la santé. Mais, il n’est pas aussi dangereux que les autres produits. Tout dépend des précautions d’usage que prend la consommatrice. Le regard des gens ne changera pas de sitôt, mais il est appelé à changer inexorablement », croit savoir Marie Odile, qui assume sa dépendance au tabac.
Pour lutter contre le tabagisme, une loi antitabac interdisant de fumer dans les lieux publics a été votée par les autorités. Celle-ci prévoit des peines de prison et des amendes, pour les contrevenants, notamment au niveau des cités religieuses.
( Toutinfo.net )