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PANNES RECURENTES DES FORAGES: Les conducteurs indexent la réforme de l’hydraulique rurale

«Avec la récente réforme de l’hydraulique rurale, l’alimentation en eau du monde rural est plus que jamais problématique dans certaines zones, avec des pannes récurrentes, des suspensions de la fourniture d’électricité faute de paiement de factures». C’est l’avis de Cheikh Wagne, Président de la Fédération Nationale des conducteurs et gérants de forages du Sénégal, qui faisait hier face à la presse à Thiès.

Face à la presse hier à Thiès, Cheikh Wagne, Président de la Fédération Nationale des conducteurs et gérants de forages du Sénégal a vivement fustigé la réforme entreprise par l’Etat du Sénégal, dans la gestion de l’hydraulique rurale. Pour lui, avec cette réforme, l’alimentation en eau du monde rural est plus que jamais problématique dans certaines zones, avec des pannes récurrentes, des suspensions de la fourniture d’électricité faute de paiement de factures. La position des conducteurs, dit-il, a été constante dès le départ avec un accord parfait sur la réforme du sous-secteur de l’hydraulique rurale. Mais, s’empresse-t-il d’ajouter, l’Etat du Sénégal a lancé des délégations du service public, autrement dit il a privatisé les forages sans une réelle concertation avec les acteurs, et des fermiers ont été choisis dont Aquatech pour la région de Thiès. Et depuis, le début de cette gestion, le constat est qu’il y a beaucoup de manquements. C’est ainsi que des retards de paiement de salaire sont notés pour la plupart des travailleurs, ainsi que des compressions de personnels. Il s’y ajoute un problème d’approvisionnement en carburant pour les groupes électrogènes ; ce que les anciens de l’Association des Usagers des Forages Ruraux (ASUFOR) faisaient de façon remarquable. Selon lui, en ce qui concerne les forages connectés au réseau du Sénégal comme Mérina Dakhar, Thilor, l’électricité est régulièrement suspendue par la Sénélec, comme c’est le cas actuellement, pour faute de non paiement des factures. Pour le cas de Mérina Dakhar, révèle Cheikh Wagne, l’électricité est coupée au niveau du forage chaque deux mois. Celui de Thilor est tombé en panne pendant 21 jours et les populations ont connu toutes les souffrances du monde parce que tout simplement la société qui devait agir promptement ne l’a pas fait. De l’avis du Président de la Fédération Nationale, du temps de lagestion des ASUFOR, qui travaillaient de concert avec les conducteurs, de pareilles situations ne se sont jamais produites dans la commune de Mérina Dakhar. Pour lui, c’est parce qu’il y a un déficit d’organisation au niveau de ces fermiers, surtout Aquatech. C’est pourquoi, dit-il, « nous lançons un appel à l’Etat du Sénégal, pour qu’il prenne ses responsabilités avant que le pire ne se produise ». Il ajoute que dans cette perspective, la fédération nationale tend la main à l’Etat, pour donner des propositions concrètes afin que la réforme soit inclusive et réussie, pour le bonheur de tous. Sur les accusations des responsables d’Aquatech, faisant état d’une démarche de sabotage de certaines Asufor du processus de mise en œuvre de la réforme, Cheikh Wagne répond qu’il n’est pas au courant de telles initiatives. Pour lui, il faut aussi comprendre que quelqu’un qui a des limites dans ce genre de situation est toujours enclin à accuser gratuitement les autres. Mais, dit-il, la vérité est que si Aquatech pouvait véritablement faire grand-chose, la réforme ne serait pas aujourd’hui à ce stade dans la région de Thiès. Ce qui est constant, dit-il,est qu’Aquatech est sur pied d’œuvre depuis un an, mais c’est un échec patent. Il poursuit : « nous alertons l’Etat du Sénégal pour dire que nous sommes constants dans ce que nous disons tous les jours. Nous sommes pour la réforme du sous-secteur de l’hydraulique rurale dans sa phase de gestion. Mais dans les faits, il est maintenant clair que la décision prise par l’Etat dans ce sens n’est pas du tout la bonne car Aquatech ne parvient même pas à approvisionner les forages en carburant, ou payer les facturesà temps ».

PAPE BAYE DIOP, RESPONSABLE D’AQUATECH A THIES «AUCUNE TRANSITION NE PEUT SE FAIRE DE FAÇON RÉUSSIE À 100%»

Interrogé sur les récriminations de la fédération des conducteurs de forages, Pape Baye Diop, responsable d’Aquatech à Thiès, répond : « on est dans une phase de transition et la vérité est qu’aucune transition, surtout liée à un contrat avec l’Etat, ne peut se faire de façon réussie à 100%. L’Etat du Sénégal devrait faire une remise à niveau de toutes les installations, sachant qu’elles sont d’une vétusté avérée. C’est à la suite de cette mise à niveau que devrait se faire un inventaire contradictoire avant leur gestion, pendant toute la durée du contrat de 10 ans. Mais, même si l’inventaire contradictoire a été fait, il n’en est pas de même pour la remise à niveau. Nous avons pris sur nous la décision de démarrer en attendant la remise à niveau. Le résultat est que nous avons trouvé des installations dans un état assez critique pour certains cas, mais aussi des situations de fait dans le monde rural avec des abonnés sans compteurs, sans système de comptage, notamment pour les maraîchers. C’est ainsi que beaucoup de difficultés ont surgi et dès le démarrage le 1er avril 2018, des urgences se sont signalées et il fallait parer au plus pressé, notamment les forages en panne». En ce qui concerne l’électricité, il affirmebqu’il y a un problème de changement de police d’abonnement car les factures sont toujours émises au nom de l’ex ASUFOR qui était une association à but non lucratif. «Nous procédons au changement de police au fur et à mesure car il y a beaucoup de forages à gérer. C’est pourquoi nous recevons souvent les factures en retard. Il y a des GIE assez réactifs qui répercutent très tôt les factures qu’ils reçoivent tandis que d’autres ne le font pas, et ne les amènent qu’après la coupure pour défaut de paiement. En tout cas, nos techniciens sont sur le terrain et nous commençons maintenant à apercevoir le bout du tunnel, sachant que la remise à niveau sonnera le véritable départ d’autant plus que la banque Mondiale a maintenant décaissé les financements et l’OFOR a lancé tous les appels d’offre pour les remises à niveau dans la région de Thiès et Diourbel.

( Mbaye SAMB )