[Portrait] Le général Tchiani, un homme à poigne à la tête du Niger
Homme de l’ombre et « à poigne », le général Abdourahamane Tchiani, chef de la garde présidentielle du Niger à l’origine de la chute du président élu Mohamed Bazoum, va désormais diriger un pays miné par la violence jihadiste et la pauvreté.
Jusqu’alors, ce militaire âgé d’une cinquantaine d’années et commandant de la garde présidentielle s’était fait discret sur la scène publique. Vendredi, il est apparu au grand jour à la TV nationale en tant que président de la junte qui a pris le pouvoir.
« On ne le connaît pas beaucoup en dehors des milieux militaires, il n’a pas de présence publique affichée. C’est un homme de l’ombre, puissant, mais pas une figure très consensuelle », décrit Ibrahim Yahaya Ibrahim, chercheur pour International crisis group.
Réputé fidèle de l’ex-président Mahamadou Issoufou, qui l’avait nommé chef de la garde présidentielle durant ses deux quinquennats de 2011 à 2021, Abdourahamane Tchiani a été reconduit à son poste par Mohamed Bazoum, dauphin d’Issoufou, alors fraîchement élu à la présidence.
Mais, selon des proches du président Bazoum contactés par l’AFP, les relations entre le général Tchiani et le chef de l’Etat s’étaient dégradées depuis plusieurs mois, Mohamed Bazoum ayant récemment exprimé sa volonté de le remplacer à la tête de sa garde.
Le général « assistait très rarement aux cérémonies officielles et aux activités du président », se faisant souvent représenter par son adjoint, le colonel Ibroh Amadou Bacharou, membre de la nouvelle junte, a affirmé à l’AFP un proche du président déchu sous couvert d’anonymat.
« Valeureux » et « populaire »
« Son remplacement et une refonte en profondeur de la garde présidentielle devaient être décidés dès ce jeudi (27 juillet) en conseil des ministres », confie un autre proche de Mohamed Bazoum.
Le général Tchiani est originaire de Filingué, une zone très aride et enclavée, à quelques 200 km au nord-est de Niamey, dans la région de Tillabéri, théâtre d’attaques des groupes jihadistes depuis des années.
Ses détracteurs le disent « controversé » au sein de l’armée.
Mais ses proches le décrivent comme « homme à poigne », « valeureux » et surtout « populaire » auprès des quelque 700 éléments de son unité.
« Comment aurait-il pu entrainer ses éléments dans le putsch s’il n’avaient pas confiance en lui ? », relève Issa Abdou, un acteur de la société civile.
« Conformément aux directives de Mahamadou Issoufou, il a transformé la garde présidentielle en une puissante machine dotée d’armements sophistiqués », souligne de son côté un fonctionnaire.
Selon les autorités, le général Tchiani a déjoué plusieurs tentatives de coups d’Etat, en 2021 et 2022 notamment.
« Le général Tchiani est un officier ayant fait ses preuves sur le terrain », commente l’ex-militaire, Amadou Bounty Diallo.
La nouvelle junte est dirigée par des officiers de haut rang, dont certains ont été identifiés par l’AFP comme des figures importantes de l’armée nigérienne, dont le général Salifou Mody, ancien chef d’état-major des Armées, limogé en avril.
Certains avaient déjà participé à de précédents coups d’Etat dans un pays à l’histoire jalonnée de putschs et tentatives depuis son indépendance de la France en 1960.