ABACAR KHALIFA NDIAYE,ANCIEN CHEF SERVICE SPORTS DU «SOLEIL» «Depuis le lycée, j’avais décidé de devenir journaliste»
Votre rubrique «Passion Foot» reçoit Babacar Khalifa Ndiaye, journaliste sportif, formateur au CESTI. Journaliste chevronné, il a passé toute sa carrière au quotidien national «Soleil» où il a eu à occuper différents postes. Chef du service Sport, il a parcouru le monde pour couvrir de grandes manifestations sportives telles que les JO,la CAN,le «Paris-Dakar». Dans cet entretien, il revient sur sa longue expérience, mais également l’importance pour un journaliste de couvrir des évènements d’envergure comme le mondial.
D’où vous est venue votre passion pour le football ?
Comme tout jeune, j’ai commencé à jouer au football dans notre quartier. Chez moi, on ne pouvait pas pratiquer un autre sport, si ce n’est le football ou peut-être la lutte sur la plage de Bargny. Nous avons toujours pratiqué le football. Déjà à l’école primaire, j’étais assez bon pour intégrer l’équipe de l’UASSU, mais pas assez bon pour être titulaire. Il y avait des joueurs plus forts que moi et j’étais tout le temps remplaçant. J’avais la passion du football et ça a évolué en navétane. Je pouvais jouer en première division, mais j’avais privilégié les études. Quand j’étais enseignant à Ziguinchor, j’avais la possibilité de jouer au Casa Sports. Des dirigeants du club m’avaient contacté. Mais je leur avais dit que je suis venu en tant que professeur, pas pour jouer au football. Si c’était le cas, je serais resté à Dakar pour jouer avec le Jaraaf ou la JA. J’avais un niveau qui pouvait me permettre de jouer en L1. Pour moi, c’était les études d’abord. Par la suite, je suis devenu journaliste et j’ai commencé à travailler dans tous les services du Soleil. Je ne me limitais pas seulement au sport. Par contre, j’étais plus à l’aise dans le sport et j’y suis resté jusqu’à ma retraite.
Quel était votre modèle dans le domaine du journalisme ?
Je n’ai jamais eu de modèle dans le journalisme. Quand j’étais au lycée, j’avais décidé de devenir journaliste. En début d’année, les professeurs nous remettaient des fiches pour mettre notre nom et les métiers qu’on aimerait faire dans l’avenir. Et je mettais journaliste chaque fois, d’année en année. C’était devenu une obsession chez moi et Dieu a fait que je suis devenu journaliste. Heureusement, j’ai eu la chance de travailler avec de grands journalistes tel que Mamadou Koumé qui m’a encadré au Soleil. Ils ont guidé mes premiers pas dans la profession. Je leur suis reconnaissant.
A quand remonte votre première sortie en tant que journaliste ?
Ma première sortie en Afrique comme journaliste sportif, c’était au championnat d’Afrique de judo en 1986 en Egypte. Après, j’ai eu à couvrir la Can 1990 en Algérie. Je pense pouvoir dire que j’ai couvert toutes les CAN, sauf celle de 1986. A l’heure où je vous parle, je suis à 14 Can. Chaque campagne est assez originale. Pour la coupe du monde, c’est depuis celle de 1998 en France. J’ai toujours été là et cette année, j’y serai inch’Allah. J’ai eu la chance de couvrir beaucoup de manifestations internationales comme les Jo il y a deux ans à Rio. C’était mon denier challenge en tant journaliste actif. Je pense que j’ai vraiment eu une carrière assez riche. J’ai aussi couvert le Rallye Paris-Dakar pendant deux ans, les championnats d’Afrique de karaté, de basket, de Judo. J’ai eu à couvrir plusieurs disciplines, mais le football est ma préférée.
Qu’est-ce qui fait la particularité de ces compétitions ?
La particularité, c’est qu’il y a beaucoup de gens qui se croisent. Ce sont des événements qui intéressent tout le monde. C’est important d’y être et de vivre ça en tant que journaliste. Un journaliste qui ne couvre pas des manifestations de cette envergure, il lui restera toujours des choses à faire. Le journalisme sportif, ce n’est pas seulement de rester dans son bureau et de faire des papiers et des analyses. Il faut aller sur le terrain et sentir ce qui se passe. Aller à l’entraînement et être au cœur de l’événement, si on n’est pas acteur direct, c’est important de dire que j’y étais.
Quatorze CAN, c’est quand même une sacrée expérience…
Il n’y pas de secret. Si j’ai fait autant de Can, c’est parce que j’ai été là avant les autres. Ce n’est pas un mérite particulier. Je souhaite que les jeunes puissent en faire autant. Il faut se dire que quelles que soient les circonstances, je vais donner le meilleur de moi-même. Il ne faut pas y aller pour seulement dire que j’y étais. Il faut se dire que c’est le prolongement du travail qui se fait à Dakar. Il faut se dire que l’événement, ça se passe d’abord chez nous. Il faut apprendre à couvrir les événements nationaux de moindre envergure pour pouvoir prétendre faire autre chose. Peut-être que dans la nouvelle génération, quelqu’un aura 20 Can.
Quelle doit-être la posture d’un jeune reporter dans un évènement comme le mondial ?
Que ça soit un match de Jaraaf ou autre chose, le rôle du journaliste c’est de donner une information et de relayer la bonne information. C’est un événement planétaire qui intéresse tout les Sénégalais. Il faudra donner le meilleur de soi-même. On a la chance d’être des journalistes et de faire un métier où on est lu, regardé, écouté parla majorité de nos compatriotes. On n’est pas plus intelligent. Il faut avoir l’humilité de faire son travail. Je l’ai toujours dit et répété. Même quand on choisit d’être voleur, il faut faire ce qu’on doit faire. Même si c’est une brève, il faut le faire avec une bonne volonté. Il faut donner des informations crédibles et fiables.
Quelles sont les chances du Sénégal dans cette poule H ?
Le Sénégal a autant de chances que les autres équipes. C’est un groupe homogène. On ne peut pas dire que tel ou tel est favori, même si les autres équipes sont un peu au-dessus de nous. C’est le football et nous sommes tous au même niveau. Il faut se battre pour décrocher la qualification. La poule de 2002 était beaucoup plus compliquée et nos joueurs se sont donné à fond. Ces jeunes sont dans un groupe homogène et il n’y a pas de grand favori. Le plus important, c’est qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes. Il faut qu’on joue nos chances. Contrairement à 2002, pour ce Mondial, les joueurs évoluent presque tous dans des grands clubs.
Peut-on craindre un manque d’engagement comme leurs aînés de 2002 ?
C’est ça le défi car autant les joueurs de 2002 avaient envie de prouver pour gagner en notoriété et d’évoluer dans des clubs plus huppés, autant ces jeunes qui jouent dans des grands clubs doivent prouver. Ce n’est pas pour rien que dans quelques jours, Sadio Mané va jouer la finale de la Ligue des champions contre Cristiano Ronaldo. C’est la preuve que même s’il n’est pas l’égal de Ronaldo, ils sont tous les deux arrivés dans le même stade de la compétition. Ils doivent prouver qu’ils peuvent être aussi performants en équipe nationale qu’ils le sont en club. Ils ont beaucoup plus de responsabilité que la génération de 2002. En 2002, on avait des guerriers. Il manque juste la rage de vaincre à cette génération. On n’a pas eu la chance lors de la Can 2017. Maintenant on a cette deuxième chance pour essayer de franchir une autre étape. Je pense que c’est le moment d’écrire leur histoire. Ils en ont les capacités.
D’une manière générale, où est-ce que vous situez les autres équipes africaines dans ce Mondial ?
Je dis que toute équipe qui se qualifie en Coupe du monde à des chances. Ce n’est pas pour rien qu’il y a les éliminatoires. Les qualifications en Afrique étaient compliquées. Quand on arrive à ce niveau, il faut se battre. Lors de la dernière Coupe du monde l’Afrique avait eu deux équipes au deuxième tour (Nigéria, Algérie). Je pense que cette année, c’est l’occasion de réaliser la même performance. Il faudra cette fois-ci essayer de passer les quarts de finale. Je pense que c’est la ligne rouge qu’aucune équipe africaine n’a pour l’instant franchie. Le Ghana était à un pénalty de passer, mais malheureusement ça ne s’est pas passé ainsi. Cette année, les équipes africaines ont des chances. Il suffira de se battre et tout peut arriver. Je prie et je suis convaincu que l’Afrique aura deux équipes en quarts de finale.
Toutinfo/Assport