LA CHRONIQUE DE MLD Réinventer et humaniser le service public…
Le décès pour défaut d’assistance de notre concitoyenne Astou Sokhna à l’hôpital régional de Louga remet en lumière l’état de déliquescence avancée du service public au Sénégal.
Le secteur de la santé dont il est particulièrement question est pour le moins névralgique et transversal.
En conséquence, l’Etat est responsable des manquements notés dans la gestion au quotidien des hôpitaux, centres de santé et autres postes de santé.
Dans ce dossier délicat, il faut saluer le professionnalisme de la presse (le Quotidien Libération en particulier) qui a tôt fait d’informer et d’alerter l’opinion publique ; les réseaux sociaux ayant assuré comme d’habitude le service après –vente.
En vérité, c’est ce qui est à l’origine de la promptitude notée dans les réactions des plus hautes autorités de la République, le Chef de l’Etat au premier chef.
Le Directeur de la structure sanitaire a été limogé en conseil des ministres et les agents impliqués pourraient être traduits en justice pour homicide involontaire.
Mais il reste intéressant de se poser la question de savoir si ces mesures d’urgence prises dans le feu de l’action par le Président de la République ne peuvent pas être assimilées à de la poudre aux yeux, du saupoudrage destiné à calmer les esprits le temps de retourner à nos sénégalaiseries.
Des interrogations du reste légitimes car il en était ainsi de la récente affaire des bébés calcinés de l’hôpital Magatte Lo de Linguère.
Et visiblement rien n’a changé dans le management des hôpitaux !
Le mal est plus profond, donc mieux vaut prévenir que guérir.
Le leadership commande de prêcher par l’exemple.
Mais en l’état actuel des choses, les décideurs ne peuvent le faire et on reste sidéré de constater pour le déplorer que le Sénégal n’a tiré aucune leçon de la Covid d’autant que les évacuations sanitaires ont repris de plus belle pour les plus nantis parce que le plateau technique de nos structures de santé reste encore très en-deçà des standards en vigueur à l’international.
C’est clair : les plus riches d’entre nous ne fréquentent pas les structures publiques de santé ; le pire pour eux c’est de faire recours aux cliniques privées.
Dans un tel contexte, ce sont les plus populations défavorisées, les pauvres, qui vont encore et toujours trinquer et payer la note. Malheureusement, on risque de se demander demain à qui le tour car on est tout simplement dans un cercle vicieux.
Repenser le financement de la santé et de l’éducation
Au-delà cette affaire qui a mis tout le pays en émoi, se pose la question centrale et cruciale de notre rapport au service public.
Hormis l’indigence notoire de nos structures publiques, il ya très souvent un manque criant d’empathie envers les usagers. C’est d’ailleurs ce que la famille d’Astou Sokhna (paix à son âme) reproche au personnel de l’hôpital de Louga.
Or Voltaire disait : « Si l’on n’est pas sensible, on n’est jamais sublime ».
En France et ailleurs en Occident, même un vulgaire Sdf est pris en charge dans les hôpitaux dès qu’il se présente à l’accueil !
Au-delà du système sanitaire défaillant, ce sont tous les autres secteurs sociaux qui sont concernés et il urge de bâtir une nouvelle citoyenneté
Il en est notamment de l’éducation mais aussi de la gestion au quotidien de l’administration sénégalaise.
La corruption endémique a fini de gangréner nos espaces de vie.
Quand le personnel médical censé faire preuve de conscience professionnelle et d’empathie, déserte impunément la structure publique de santé pour faire du « xarr matt » dans le privé afin d’arrondir ses fins de mois, on est au bord de la rupture du système.
Idem pour l’enseignant du public qui dispense des cours dans le privé au profit des élèves de la classe moyenne.
Au point de sacrifier les apprenants issus des milieux défavorisés!
Sans oublier cet agent véreux de la collectivité territoriale du coin qui demande subtilement un petit billet avant de délivrer une quelconque pièce d’état-civil.
Il ne s’agit point de jeter l’anathème sur tous ces braves compatriotes qui donnent encore un sens profond à la notion de service public.
C’est juste que des brebis galeuses » on en trouve dans tous les corps de métiers.
Et Il est question de poser un débat de fond relativement à cette rupture de la relation de confiance entre les Sénégalais et le service public.
Ceux qui incarnent actuellement la puissance publique ont la mission historique de réfléchir sérieusement sur les modalités urgentes de financements massifs des secteurs dits sociaux.
Dans le cas d’espèce, la santé et l’éducation ont grandement besoin d’un remède de cheval afin de redonner espoir à ce vaillant peuple.
Surtout que ces deux mamelles vitales de notre vivre-ensemble sont les fondamentaux d’un capital humain sain et performant.
Il faut donc les ériger en surpriorités afin de ne plus en faire un luxe.
Tout est lié!
De ce point de vue, toute l’énergie déployée pour les dossiers Adji Sarr ou la hausse du nombre de députés nous éloigne de cet essentiel lié à nos angoisses existentielles.
Oui les Sénégalais sont fatigués pour reprendre la célèbre phrase du regretté Kéba Mbaye.
Par ailleurs, nous sommes incorrigibles !