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La Chronique de MLD : Les Sénégalais et la culture de l’accessoire

Affaires Mbougar, Diary Sow, Mamico Coco et maintenant le dossier

Amina Badiane avec plus de 200 plaintes déposées contre la Présidentedu comité national Miss Sénégal…Nous sommes finalement prisonniers d’un tourbillon de nature à nous donner des vertiges. C’est clair et net : dans ce pays, nous avons la curieuse manie d’entretenir  cette spirale de l’actualité People sans fin. A chaque jour suffit sa peine ! En vérité, l’affaire Amina Badiane n’est pas banale, elle est même assez sérieuse en ce qu’elle nous permet d’interroger sérieusement notre rapport à la femme, cette mère-nourricière, sœur ou épouse au cœur de la vie sociétale. Les questions sociétales sont loin d’être anodines d’autant qu’elles sont consubstantielles au progrès économique et social ; le problème c’est que nous les abordons avec très peu de recul et de distance et nous y consacrons surtout beaucoup d’émotion. Pis nous perdons énormément d’influx nerveux et  d’énergie dans de tels  débats. Il y’a aussi beaucoup d’excès et de folklore voire une certaine théâtralisation du dossier, ce qui est de nature à heurter tout observateur surtout que jusque-là la justice n’a encore prononcé aucune sentence contre qui que ce soit. Il n’empêche nous sommes nombreux à avoir déjà jugé pour rendre un verdict implacable et clouer au pilori la pauvre Amina vertement canardée pour avoir maladroitement fait « l’apologie du viol » à en croire ses contempteurs. Globalement  il y a visiblement  des gens qui vivent de l’accessoire, du factice, du bling-bling  et de la facilité notamment une bonne frange de la presse fortement arrimée à cette croyance qui veut que le lectorat vit du People donc il faut lui en servir à profusion. Le drame avec le People c’est qu’il est le plus clair du temps infantilisant, il abrutit nos concitoyens et entretient le train de vie et les intérêts d’une caste d’individus triés sur le volet. Parmi ces acteurs, on retrouve les  animateurs du  fameux système Lmd (lutte musique danse) mais aussi les politiciens  professionnels plus préoccupés par cette tendance à polir leur image que la propension à résoudre les problèmes et  autres drames existentiels des Sénégalais. Il y a aussi une forte dose d’obscurantisme  et de populisme dans ce People dégradant et dévalorisant. Nous sommes devenus une société de voyeurs et d’inquisition dénuée d’empathie : on s’occupe trop des affaires de son prochain, on rigole de ses déboires, de ses démêlées judiciaires, on le voue  constamment aux gémonies. Bref, on est satisfait de le voir souffrir…C’est ce qui explique d’ailleurs cette forte tendance à brûler des idoles qu’on avait adorées dans un passé récent. Nous vivons dans une société déshumanisée ou l’autre est devenu l’ennemi à abattre et pour beaucoup c’est presque jouissif de procéder de la sorte pour exister et se rendre indispensable. Pourtant l’artiste, auteur-interprète français Ken Samaras alias Nekfeu disait : «On est tous responsables, en partie, du monde que l’on bâtit, l’égoïsme et le manque d’empathie, tout le monde en pâtit.» Par ailleurs, peu de Sénégalais s’intéressent à des problématiques de fond et de survie comme la commercialisation arachidière, la crise de la filière pêche, la conférence sociale qui aborde des thématiques centrales comme la gestion des retraites, les pertes massives d’emplois, la relance de l’entreprise. Au contraire, ils trouvent cela ringard ; des sujets  trop sérieux, trop lourds et pas sexy du tout. Ces questions  stratégiques de développement  intéressent plutôt le monde rural, le landerneau citadin  qui vit dans sa bulle s’en fiche éperdument : une véritable  injustice de notre part ! Qui parlait du Sénégal de tous et du Sénégal pour tous ?