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DR ABDOURAHMANE SARR, ECONOMISTE : ‘’Les Dts ne sont pas dans l’intérêt du Sénégal’’

Responsable du Centre d’étude pour le financement du développement local (CEFDEL), le Dr Abdourahmane Sarr est d’avis que les DTS ne sont pas dans l’intérêt du Sénégal.

Au lendemain du sommet de Paris sur la relance des économies africaines, les critiques fusent de toute part. Les unes plus acerbes que les autres. La dernière en date, est celle du Docteur en économie à l’Université Georges Washington aux USA, et ancien fonctionnaire du Fonds monétaire international (FMI). Abdourahmane Sarr, contrairement au Président Macky Sall qui s’est exprimé lors du sommet de Paris, en faveur de cette opération d’endettement de l’Afrique par les DTS, pense que cette option n’est pas dans l’intérêt du Sénégal. Etant donné que le pays a une dette soutenable, a accès aux marchés internationaux et aux instruments classiques du FMI, et a besoin d’une autonomie monétaire et du leadership de ses petites entreprises, ce qui ne l’empêche pas de saisir des opportunités d’investissements extérieurs. A en croire l’ancien fonctionnaire du Fonds monétaire international, ‘’l’hypothèse d’une capacité d’absorption d’un endettement plus élevé en devises à des taux concessionnels pour financer une croissance potentielle handicapée par la contrainte de financement extérieur, est du déjà-vu. Elle s’est souvent soldée par des déficits excessifs et par l’augmentation des risques budgétaires, même quand il s’est agi de projets en partenariat public-privé qui, souvent dans un contexte de pauvreté, nécessitent un soutien financier des États aux marges limitées’’. A cet égard, il pense qu’il nous faut essayer l’alternative qui est le déblocage du potentiel de croissance de l’Afrique, par l’inclusion financière de son secteur privé, dans une monnaie nationale compétitive, dans un cadre macroéconomique assaini, faisant de l’endettement en devise l’exception et la liberté économique la norme. ‘’Pour que l’endettement en devises soit l’exception, il faut renforcer nos banques centrales, et donner confiance aux investisseurs étrangers qui souscriraient à nos bons et obligations d’État, en notre monnaie du fait d’une gestion vertueuse’’, conseille Dr Abdourahmane Sarr. 

‘’L’Afrique n’a pas besoin d’un ‘’New Deal’’ post-covid’’

Pour éviter ce scénario de dépendance de l’extérieur, à travers des instruments modernes qui répéteraient l’histoire (exploitation et domination de l’Afrique après la traite négrière, la colonisation et l’endettement), l’économiste rejette en effet, le ‘’New Deal’’ particulier en dehors de mécanismes éprouvés de financement de projets viables. Il exhorte ainsi le Président Macky Sall à rester dans cette orthodoxie. Pour autant, il se dit partisan d’un ‘’New Deal’’ qui favoriserait les projets publics privés aux risques partagés. ‘’L’Afrique pouvait être une importante locomotive de la croissance mondiale, mais qu’il ne fallait pas faire de cette locomotive un objectif de l’extérieur financé principalement par l’endettement en devises et l’investissement étranger, facilités par des régimes de change fixes sans inclusion financière du secteur privé national’’, tranche-t-il. 

‘’L’Afrique n’a pas besoin de New Deal post-covid’’

Selon le Dr Sarr, l’Afrique n’a pas besoin d’un traitement spécial du FMI et des bailleurs. Mais d’une mobilisation optimale des ressources locales, leur utilisation efficace, une transparence dans un état de droit, et un environnement économique propice à l’essor du secteur privé surtout national, aidé en cela par des monnaies plus flexibles. ‘’C’est ce que nous avons appelé le libéralisme patriotique par opposition au libéralisme internationalisé socialisant qui viserait à partager les fruits de la croissance avec l’Afrique tout en la dominant’’, soutient-il. Soulignant ainsi que le monde a un potentiel de croissance par une capacité de production sous exploitée qu’une demande provenant de l’Afrique pourrait soutenir. Dans la mesure où l’Afrique n’a pas la capacité de financement nécessaire dans son paradigme actuel de gouvernance, les pays avancés doivent selon lui, l’aider à le faire, soit directement, soit à travers le FMI et les institutions de financement du développement. Ceci, relève-t-il, serait un modus operandi complémentaire et en concurrence avec les méthodes de pays adeptes du capitalisme d’état comme la Chine, la Russie, la Turquie, etc.