La Libye menace de suspendre les activités d’entreprises étrangères, dont Total
Le gouvernement de Tripoli a menacé de suspendre les activités d’une quarantaine d’entreprises étrangères sur son sol. En quête de soutien face au général Haftar, Fayez al-Sarraj veut ainsi mettre la pression sur les Européens.
Le décret a été publié en toute discrétion, au lendemain de la visite du Premier ministre libyen Fayez al-Sarraj à Emmanuel Macron, à Paris, mercredi 8 mai. Le gouvernement de Tripoli menace de suspendre les activités d’une quarantaine d’entreprises, dont le pétrolier français Total. Les autorités libyennes reconnues par la communauté internationale donnent trois mois à ces entreprises pour renégocier leurs droits d’exploitation, faute de quoi leurs activités seront suspendues. Une façon pour Fayez al-Sarraj de mettre la pression sur les Européens, notamment sur Paris.
« Officiellement, ces 40 licences devaient arriver à expiration maintenant », affirme Jalel Harchaoui, chercheur au Clingendael Institute. « En réalité, le décret est motivé par le désir de montrer aux pays européens que leur clémence envers la faction est-libyenne a des conséquences immédiates sur leur intérêts économiques. »
Total est l’un des principaux groupes pétroliers présents en Libye, dont la production s’élève à plus d’un million de barils par jour. C’est par ailleurs la seule des 40 firmes visées à y avoir conclu des contrats importants. Parmi les autres, figurent le groupe industriel allemand Siemens et l’entreprise de télécommunications Alcatel-Lucent, filiale du finlandais Nokia.
Lutte contre le terrorisme
Le gouvernement libyen reproche à Paris de soutenir le maréchal Khalifa Haftar, qui tient l’est et le sud du pays. Selon les experts, l’Égypte, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis soutiennent le maréchal Haftar, tandis que Fayez al-Sarraj est appuyé par le Qatar, la Turquie et l’Italie.
La France justifie ce soutien par la nécessité de lutter contre le terrorisme, tandis que le gouvernement libyen accuse Haftar de fomenter un coup d’État. Les forces de ce dernier ont d’ailleurs lancé début avril une offensive en direction de Tripoli.
Le président français a appelé à un cessez-le-feu mais selon les termes de celui-ci, les troupes du maréchal Haftar n’auraient pas à reculer vers l’Est, le laissant bénéficier d’un important gain territorial. Une option qui rend Sarraj furieux, explique Jalel Harchaoui.
Tournée européenne et visite de Sissi
Confronté aux troupes du maréchal Haftar, Fayez al-Sarraj a entrepris cette semaine une tournée européenne pour tenter d’engranger des soutiens internationaux.
De son côté, le maréchal Khalifa Haftar a reçu jeudi le soutien du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi lors de sa deuxième visite au Caire en moins d’un mois.
« Le président [Sissi] a affirmé le soutien de l’Égypte aux efforts [de Khalifa Haftar] dans la lutte contre le terrorisme et les groupes et milices extrémistes, afin de parvenir à la sécurité et la stabilité en Libye », a déclaré le porte-parole de la présidence égyptienne Bassam Radi, selon un communiqué.
De son côté, le maréchal Haftar, dont la dernière visite au Caire remonte au 14 avril, a dénoncé « l’ingérence étrangère dans les affaires intérieures libyennes », selon le communiqué.
( Avec AFP et Reuters )