Migrants africains en méditerranée : 10 000 morts ignorés au profit de l’immigration circulaire (Boubacar Sèye)
Boubacar Sèye, président de l’ONG Horizons Sans Frontières, met en lumière les dérives des politiques migratoires européennes et leur impact dévastateur sur le continent africain. Selon lui, l’immigration circulaire ne peut être considérée comme une solution face à la tragédie des migrants africains qui se noient en Méditerranée. Ce concept, selon Sèye, relève d’une manipulation de la part de l’Europe, qui ne fait qu’exploiter la misère humaine en fonction de ses intérêts économiques et sécuritaires. Avec plus de 10 000 morts dans les eaux méditerranéennes, l’appel à l’immigration circulaire semble cynique, notamment lorsque l’Europe ferme ses portes et ne les ouvre qu’en fonction de ses besoins.
L’Afrique, poursuit Sèye, doit se ressaisir face à cette situation. Le président de l’ONG dénonce la faiblesse de nombreux dirigeants africains, qui restent prisonniers des politiques d’aide au développement, utilisées par l’Europe comme instrument de pression. Selon lui, il est crucial que les États africains unissent leurs forces pour peser dans le débat mondial sur les migrations, et particulièrement sur les politiques migratoires qui affectent la jeunesse africaine. Le Sénégal, en particulier, pourrait jouer un rôle clé en prenant la tête d’une initiative africaine sur la migration internationale.
En outre, Sèye pointe l’hypocrisie de l’Europe qui, d’un côté, crée des politiques d’immigration restrictives, et de l’autre, appelle à l’immigration circulaire pour des raisons économiques, en particulier dans des secteurs comme l’agriculture. Il rappelle que le vieillissement de la population européenne et les enjeux géopolitiques et économiques imposent à l’Europe d’accepter des migrants. Toutefois, ce processus ne doit pas se faire au détriment de la dignité humaine des migrants. Le contraste entre les valeurs humaines revendiquées par l’Europe et ses pratiques réelles est frappant, selon le président de Horizons Sans Frontières.
Sèye insiste également sur la nécessité pour l’Afrique d’adopter une approche collective et cohérente face à la question migratoire. Le continent africain doit sortir de la fragmentation de ses positions et développer une vision unifiée, qui plaide pour des solutions durables et respectueuses des droits humains. L’ouverture d’un bureau de la multinationale Matt au Sénégal témoigne de l’importance stratégique du pays en tant que porte d’entrée vers l’Afrique et du rôle potentiel qu’il pourrait jouer pour impulser cette dynamique.
Enfin, il appelle à une réflexion globale sur la mobilité des populations dans un monde de plus en plus globalisé. L’immigration, selon Sèye, doit être vue comme un phénomène complexe qui dépasse les frontières nationales. Il est impératif que l’Afrique prenne la tête du débat, sans se laisser manipuler par les discours des grandes puissances. Le Sénégal, par sa souveraineté et son influence croissante, a une occasion historique de redéfinir le rôle du continent dans les discussions internationales sur les migrations. L’avenir de l’Afrique, conclut-il, dépend d’une nouvelle approche de la mobilité humaine, bâtie sur l’unité et la coopération.
Avec DDakaractu