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Il faut de la tempérance, du « saggo » pour gouverner. Par Moussa TINE

Je rappelle ici quelques vérités simples.
1- Nous vivons une situation pareille à celle actuelle de la France, avec à la fois les mêmes mécanismes constitutionnels et la même situation politique.
2- En France, le président de la République, n’ayant pas la majorité parlementaire, n’a toujours pas réussi à nommer un Premier ministre, de peur que celui-ci ne fasse l’objet d’une motion de censure s’il n’est pas accepté par la majorité des députés. Au Sénégal, avec une majorité parlementaire identifiée et indiscutable, le président de la République a pu nommer un Premier ministre de son camp malgré une majorité parlementaire hostile.
3- En France, depuis quelques jours, le président de la République a entamé des consultations afin de nommer rapidement un Premier ministre. C’est parce qu’au plus tard le 1ᵉʳ octobre, le gouvernement devra déposer le projet de loi de finances à l’Assemblée nationale. Au Sénégal, le projet de loi de finances doit être déposé au plus tard le 15 octobre. Néanmoins, le gouvernement s’apprête à dissoudre le Parlement tout en sachant que les élections subséquentes devront se tenir obligatoirement entre 60 jours et 90 jours après.
4- Le président de la République devra nommer un nouveau Président du conseil économique, social et environnemental, un nouveau Président du Haut conseil des collectivités territoriales et continuer à payer les salaires des membres des deux institutions.
5- La dissolution de l’Assemblée nationale prévue n’entraînera pas la perte de mandat pour les députés, même si l’Assemblée ne pourra plus se réunir. On devra aussi continuer à payer les salaires des députés qui ne pourront plus voter de loi ni prendre aucune initiative parlementaire.
6- Le nouveau régime n’aura pas le choix que de reconduire mensuellement le budget de Macky Sall et continuer à dérouler le programme de ce dernier, et ce, avec les mêmes institutions, y compris le CESE et le HCTT.
7- Un conflit d’ordre du jour n’est pas un conflit de session. Le président de la République a une priorité sur l’ordre du jour de l’Assemblée, S’IL LE DEMANDE. Mais, il s’agit là de deux sessions convoquées alors qu’aucun texte ne prévoit ni ne résout ce genre de conflit, par ailleurs inédit.
8- La doctrine, le droit et la pratique parlementaire donnent une priorité logique à la programmation de la motion de censure.
9- Si l’Assemblée est dissoute et qu’on veuille organiser des élections en 2024, où trouvera-t-on les crédits budgétaires pour organiser de nouvelles élections, puisque le budget en cours d’exécution ne les a pas prévus et que seule l’Assemblée nationale a le pouvoir en la matière (loi de finances initiales ou d’une loi de finances rectificatives) ? Or, l’Assemblée nationale dissoute ne pourra pas se réunir, même si les députés demeurent des représentants du peuple.
10- Ce pays n’appartient ni à l’ancienne majorité présidentielle devenue non moins majorité parlementaire, ni à l’actuelle majorité présidentielle restée minorité parlementaire. Tant que nous sommes, le Sénégal nous survivra.
Au demeurant, l’actuel régime émane de la dernière volonté exprimée par le peuple, mais ne doit pas ignorer les prérogatives de la majorité parlementaire dans un régime politique comme le nôtre. En cela, la force majoritaire reste une réalité politique incontournable et détient du coup un pouvoir constitutionnel de faire et de défaire.
En réalité, peu de gens connaissent les véritables motifs de cette guéguerre. À vrai dire, c’est maintenant que sonne la véritable heure d’un dialogue. Les facilitateurs, surtout les mêmes, doivent y aider. À ceux-là, qu’il leur plaise de ne pas le garder secret.

Président Alliance Démocratique Pencoo