CORRUPTION : Policiers et gendarmes en tête, suivis des députés et des conseillers municipaux et départementaux
La corruption a pris l’ascenseur au Sénégal ! C’est le constat qu’on fait à la lecture du rapport Afrobaromètre 2021. Au moins 75% des sénégalais, contre 10%, affirment que la corruption a augmenté dans le pays. Et les policiers et gendarmes sont placé en tête du podium, suivis des députés, les conseillers municipaux et départementaux, des magistrats, de la présidence de la république…
Le rapport d’Afrobaromètre 2021 sur la corruption est publié ! Et le constat est amer. «La grande majorité́ (75%) des Sénégalais affirment que la corruption a augmenté́ dans le pays au cours des 12 derniers mois», lit-on dans le document. Qui ajoute par rapport à l’ampleur de la corruption que «Seuls 10% soulignent une baisse du niveau de la corruption». Environ une personne sur 10 révèle avoir octroyé́, en 2021, un cadeau ou une faveur pour obtenir des soins médicaux dans des structures sanitaires publiques (10%) ou des services d’écoles publiques (8%), contre 3% en 2014. Pour obtenir les services dans les centres d’enregistrement de pièce d’identité́, de passeport ou de permis, 23% des Sénégalais déclarent avoir versé́ des pots-de-vin pour acquérir lesdits papiers, soit 21% de plus qu’en 2014.
84% parmi les partisans de l’opposition affirment que le niveau de corruption est en hausse, contre 69% des partisans du pouvoir.
Cette hausse du niveau de corruption est perçue différemment selon les caractéristiques socio- démographiques des citoyens. La perception est plus élevée chez les citadins (78%) contre 72% chez les ruraux. Entre hommes et femme, la différence n’est que d’un point (76% contre et femmes 75%). Par contre, les plus instruits (80%) perçoivent le plus la hausse du niveau de corruption comparativement aux personnes n’ayant aucune instruction formelle (73%). Cependant, les plus pauvres (78%) sont plus enclins à constater une corruption intensifiée que leurs compatriotes mieux nantis (72%). L’appartenance impacte aussi la perception des Sénégalais sur la corruption. En effet, plus de 8 personnes sur 10 (84%) parmi les partisans de l’opposition affirment que le niveau de corruption est en hausse, contre 69% des partisans du pouvoir.
Les policiers et les gendarmes les plus corrompus, selon 47% des Sénégalais
Selon l’enquête d’Afrobaromètre, «la hausse de la corruption est plus perçue chez les policiers et gendarmes : presque la moitié́ (47%) des citoyens estiment que «la plupart d’entre eux» ou «tous» sont corrompus. Soit une augmentation de 18 points de pourcentage depuis 2017. De manière plus explicite, parmi ceux qui ont eu affaire à la police au cours de l’année écoulée, 4 personnes sur 10, soit 40%, déclarent avoir dû verser des pots-de-vin pour éviter des problèmes. Ce qui fait une hausse de 35% par rapport à 2014. Environ une personne sur huit (13%) atteste avoir payé́ des pots-de-vin pour obtenir l’assistance de la police, comparé à 5% en 2014.
Plus de la moitié des hommes, des moins nantis et des opposants pensent que «la plupart» ou «tous» les policiers et gendarmes sont corrompus
En outre, le rapport montre que la perception que « la plupart » ou « tous » les policiers et gendarmes sont corrompus varie légèrement selon les caractéristiques socio-démographiques des citoyens. Les hommes (52%) perçoivent plus la corruption des forces de sécurité́ que les femmes (43%). Par ailleurs, la perception de la corruption chez les policiers et gendarmes semble croitre avec le degré́ de pauvreté́, allant de 36% des mieux nantis à 59% des pauvres. Suivant l’affiliation politique, plus de six personnes sur 10 (62%) proches de l’opposition pensent que « la plupart » ou « tous » les policiers et gendarmes sont impliqués dans des affaires de corruption, contre 45% des partisans du pouvoir et 46% des personnes non affiliées à un parti politique.
Les députés en seconde position, les magistrats 4ème, la présidence 5ème…
Les députés sénégalais n’ont sans doute plus bonne presse aux yeux de l’opinion. Et pour cause, le rapport d’Afrobaromètre sur la corruption les place en seconde position des plus corrompus, après les policiers et les gendarmes. Les parlementaires passent de 24% en 2017, à 37% en 2021, soit une augmentation de 13%. En seconde position, il y a les conseillers municipaux ou départementaux dont le niveau de corruption a évolué de 23% à 36% entre 2017 et 2021, soit 16 points d’augmentation. Les juges et magistrats, pourtant très souvent indexés, n’arrivent qu’en 4ème position, avec une augmentation de 12%, passant de 24% à 36%. La présidence de la république et les officiels de la présidence arrivent en 5ème position, avec une hausse de 11%, passant de 23% à 34%. Suivent les fonctionnaires et membres du gouvernement, 33%, avec une augmentation de 7%. Les chefs traditionnels et les chefs religieux ferment la liste, avec respectivement 12% et 8%.
77% des Sénégalais jugent «plutôt mal» ou «très mal» les performances du gouvernement dans la lutte contre la corruption
Pendant que la corruption galope, les Sénégalais constatent que l’Etat ne fait pas beaucoup d’effort pour la combattre. L’écrasante majorité des personnes sondées apprécie négativement les performances de l’Etat dans la lutte contre la corruption. En effet, selon l’enquête, plus de trois quarts (77%) des Sénégalais jugent «plutôt mal» ou «très mal» les performances du gouvernement en matière de lutte contre la corruption au sein de l’administration publique. Une augmentation très importante, car cette proportion qui a plus que doublée, était de 32% il y a juste 6 ans. Seule 17%, environ 1 personnes sur 6, estime qu’en 2021, les performances du gouvernement sont «plutôt bien» ou «très bien», contre par exemple 55% en 2013.
3/4 des Sénégalais redoutent des représailles en cas de dénonciation de la corruption
Toutefois, malgré ce constat de l’augmentation de la corruption, peut de Sénégalais sont enclins à dénoncer. En effet, selon le rapport, «malgré la conscience de l’ampleur du problème de la corruption, 77% des Sénégalais affirment que les citoyens risquent des représailles ou autres conséquences négatives s’ils dénoncent des actes de corruption». Cette perception est plus forte chez les ruraux, avec 79%, contre 75% chez les citadins. Elle est plus élevée chez les plus pauvres (79%), que chez les mieux nantis (73%). De même, les partisans de l’opposition (85%) redoutent le plus des représailles en cas de dénonciation d’actes de corruption que les personnes apolitiques (78%) et les partisans du pouvoir (73%). D’ailleurs, souligne le rapport, on note une baisse tendancielle du nombre de plaintes enregistrées auprès de l’OFNAC pour signaler des cas de corruption, qui sont passés de 618 en 2015 à 73 en 2018 (OFNAC, 2018).
Le rapport Afrobaromètre de 2021 concerne 34 pays. Au Sénégal, les enquêtes ont été dirigées par le Consortium pour la Recherche Economique et Sociale (CRES), qui s’est entretenue avec 1.200 adultes sénégalais en décembre 2020 et janvier 2021. Un échantillon de cette taille, selon le rapport, produit des résultats nationaux avec des marges d’erreur assez faibles de +ou-3 points de pourcentage et un niveau de confiance de 95%. Avant Celles de 2021, 6 autres rapports Afrobaromètre ont été produits pour le Sénégal (2002, 2005, 2008, 2013, 2014 et 2017).
L’info