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FLUX FINANCIERS ILLICITES: L’Afrique perd entre 50 et 73 milliards de dollars par an

Pendant deux jours, des acteurs de la société civile venus despays de la sous-région et de l’Afrique de l’Est vont échanger surles Flux Financiers Illicites (FFI). Les pertes causées par les FFI sont estimées entre 50 et 73 milliards de dollars par an. Les secteurs des mines, des hydrocarbures et du commerce sont les plus touchés par ce fléau.

Pour le secrétaire exécutif de Trust Africa, Ebrima Sall, les flux financiers illicites constituent un des phénomènes qui font du continent africain celui de tous les paradoxes. D’autant que c’est le continent le plus riche de par sa population, mais aussi de par ses diverses ressources. Seulement, se désole l’ancien directeur exécutif du Codesria, l’Afrique constitue la partie du monde qui concentre le plus grand nombre de pauvres et de démunis. «Une des explications de ce phénomène est que nos ressources, qui devraient servir à changer la vie des gens, sont concentrées ailleurs et très mal redistribuées», s’émeut Ebrima Sall. En dépit des taux de croissance réalisés par certains pays du continent, affirme-t-il, cette croissance est mal gérée. Par ailleurs, il a tenu à rappeler que l’Afrique est le continent où se trouvent les cinq sociétés les plus inégalitaires. «C’est pour cette raison qu’il y a un problème dans la répartition des ressources et l’appropriation de ces dernières. Les Flux Financiers Illicites font partie des phénomènes qui contribuent à appauvrir le continent africain, du fait que les ressources qui y sont créées ne lui permettent pas d’améliorer les conditions de vie des populations», a déclaré le secrétaire exécutif de Trust Africa. Ce phénomène a de nombreuses répercussions sur l’économie du continent. D’après le rapport du panel présidé en 2015 par l’ancien Président sud-africain, Thabo Mbeki,l’Afrique perdrait chaque année 50 milliards de dollars. Un autre document plus récent (datant de 2017) parle de pertes estimées à 73 milliards de dollars à cause des FFI. Ebrima Sall estime que ce fléau touche pratiquement tous les pays et affecte tous les secteurs. Il cite entre autres le secteur des mines, les hydrocarbures, l’agriculture etle commerce.

INTÉRÊTS POLITIQUES, CORRUPTION ET SYSÉME JIRIDIQUE PEU FIABLE

Selon le chercheur et ancien directeur exécutif du Codesria, les FFI ont contribué, de manière indirecte, à la montée des frustrations. Cela est dû à l’absence de transformations sociales et économiques positives et durables et d’amélioration des conditions de vie des populations du continent. «Nous sommes devant un problème dont le plus grand reste celui de la gouvernance des ressources naturelles, et celles publiques. Les mécanismes et les circuits que les flux financiers illicites empruntent sont connus de tous. Et les paradis fiscaux en sont les principales destinations», a clamé Ebrima Sall lors de la réunion.qui avait pour thème : «Gagner la lutte contre les FFI en provenance d’Afrique : Quelle est la prochaine étape ?». De l’avis de la directrice de l’ONG Trust Africa, Coumba Touré, les richesses créées sur le continent ne vont pas dans des secteurs prioritaires. «Je pense que ces grosses sommes d’argent peuvent être dépensées dans des domaines qui sont utiles pour les africains», a indiqué Coumba Touré. Le représentant du président de la GIABA, Mahazou Oumarou, a relevé des défis qui, de son avis, empêchent ceux qui mènent le combat contre les FFI d’être efficaces. A ce propos, il cite l’incompréhension du concept. Il considère que les gens ont du mal à s’accorder sur la signification des FFI et éprouvent des difficultés à retracer le volume des fonds qui sont des sommes exorbitantes. Il y a aussi les intérêts politiques liés aux flux financiers illicites, la corruption qui est l’une des grandes causes du développement des FFI, un système juridique peu fiable et simpliste ou encore une faible coopération internationale. Représentant le ministre de l’Economie et des Finances, le directeur Adjoint de la Monnaie et du Crédit, Oumar Diallo, a soutenu que «ces pertes qui font le double de l’aide publique que reçoit le continent pouvaient servir à financer les plans et programmes de développement des pays africains». Pour Oumar Diallo donc, l’un des grands défis est de trouver comment repérer, suivre et arrêter les FFI dont les formes, les destinations et les circuits changent tout le temps. L’autre défi consiste à rapatrier les ressources sorties du contient.

( Amadou THIAM )