L’ONU réclame une commission d’enquête internationale sur le Venezuela
Zeid Ra’ad Al Hussein, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, a réclamé la création d’une commission d’enquête internationale sur le Venezuela et demandant un « engagement accru » de la Cour pénale internationale (CPI).
« Lamentable ». Zeid Ra’ad Al Hussein s’est montré lapidaire, vendredi 22 juin, pour qualifier la situation au Venezuela. À l’occasion de la publication d’un nouveau rapport sur la situation politique et humanitaire du pays, le très respecté Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme a appelé à « un engagement accru » de la part de la Cour pénale internationale. Il demandé également l’ouverture d’une commission d’enquête internationale par le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, comme il en existe pour la Syrie ou encore le Yémen.
« L’impunité doit cesser », a affirmé Zeid Ra’ad Al Hussein. « Étant donné que l’État ne semble ni capable ni disposé à poursuivre les auteurs de violations graves des droits de l’Homme, il y a de solides raisons de demander un engagement accru de la Cour pénale internationale. »
La publication du rapport fait suite à un premier rapport accablant du Haut-Commissaire, publié en août 2017, qui dénonçait déjà le « recours généralisé et systématique à une force excessive pendant les manifestations, et la détention arbitraire de manifestants et d’opposants politiques présumés ».
Usage de la force excessive, détentions arbitraires, tortures et mauvais traitements, incluant des simulacres d’exécution et des décharges électriques, se poursuivent selon le Haut-Commissariat, qui souligne que cette répression menée par les autorités de l’État a commencé en 2014. La CPI a déjà ouvert en février un examen préliminaire sur des crimes commis au Venezuela, théâtre de troubles politiques meurtriers.
Exécutions extrajudiciaires entre 2015 et 2017
Le nouveau rapport accuse par ailleurs diverses forces de sécurité vénézuéliennes d’avoir procédé, depuis 2015, à des centaines d’exécutions extrajudiciaires, visant surtout des jeunes dans les quartiers pauvres, dans le cadre d’opérations de lutte contre la criminalité.
Plus de 500 exécutions extrajudiciaires auraient ainsi été menées entre juillet 2015 et mars 2017, selon le rapport qui s’appuie sur des statistiques de l’ancien procureur général, désormais en exil.
« Quand une boîte de pilules contre l’hypertension coûte plus cher que le salaire minimum mensuel et le lait en poudre pour bébé plus de deux mois de salaire, mais que manifester contre une telle situation peut vous mener en prison, l’injustice extrême de tout cela est flagrante », a fait valoir le Haut-Commissaire.
Interviews à distance
Les autorités vénézuéliennes ayant refusé l’accès du pays aux experts de l’ONU, Zeid Ra’ad Al Hussein a chargé une équipe de spécialistes des droits de l’Homme d’interviewer à distance quelque 150 personnes, dont des victimes et leurs familles, ainsi que des témoins, des journalistes, des avocats et des médecins notamment.
Ces témoignages ont montré que les méthodes pour « intimider et réprimer l’opposition politique ou toute personne perçue comme étant une menace au gouvernement » se poursuivent mais que « ces détentions sont devenues plus sélectives que durant la période des manifestations », visant des activistes, des étudiants, des défenseurs des droits de l’Homme, des travailleurs des médias et des membres des forces armées.
Au moins 12 320 personnes ont été détenues dans le pays entre janvier 2014 et avril 2018, et plus de 7 000 d’entre elles ont été libérées avec comme condition de respecter un certain nombre de mesures limitant leurs libertés, pointe le rapport, utilisant des éléments communiqués par des représentants de la société civile. Au moins 570 personnes, dont 35 enfants, ont été détenues depuis août dernier.
Le président Nicolas Maduro, au pouvoir depuis 2013, a été récemment réélu jusqu’en 2025, au terme d’un scrutin vivement critiqué à l’étranger.
Avec AFP